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Un homme présenté comme un "docteur d'Oxford", multiplie de prétendues "révélations" sur les vaccins contre le Covid-19 dans une vidéo partagée plusieurs centaines de fois en quelques jours sur les réseaux sociaux. Il prétend pêle-mêle que "l'inventeur" de la technologie de l'ARN messager est contre son utilisation, que le vaccin contre le Covid-19 facilite les infections mais aussi que les personnes vaccinées ne peuvent plus donner leur sang, deviendront stériles et mourront dans les six mois. Mais cet homme, qui n'est pas médecin, fait des déclarations fausses ou trompeuses, comme l'ont expliqué des experts à l'AFP. "Le Dr. Shawn Brooks fait des révélations glaçantes sur la vaccination...", titre une vidéo anglophone traduite en français et partagée en tout des centaines de fois sur Facebook, Twitter (1,2,3) et plusieurs médias en ligne (1, 2,3) en quelques jours. Des posts similaires circulent en serbe et en anglais. Dans la vidéo, un homme se présentant comme le "docteur Sean Brooks, Oxford", fait plusieurs affirmations fausses ou trompeuses sur les effets des vaccins anti Covid. Capture d'écran prise sur Facebook le 27/08/2021.Le "Docteur Sean Brooks" n'est pas médecinLa vidéo a été filmée lors d'une réunion du conseil d'administration de plusieurs établissements scolaires du district scolaire de Talawanda dans l'Ohio aux Etats-Unis, le 16 août 2021. Ces réunions publiques ont lieu tous les mois et couvrent les villes d'Oxford et de Hamilton. Sean Brooks s'est exprimé lors d'une session de questions/réponses avec le public et s'est présenté comme "docteur" et "d'Oxford". Il affirme avoir "étudié la médecine" ("health medicine") et être "dans le secteur de la physiologie depuis environ vingt-et-un ans". Son prénom est orthographié "Shawn", "Shaun" ou "Sean" selon les publications, mais est bien "Sean". Si Sean Brooks est bien "docteur" car titulaire d'un doctorat ("PhD" en anglais), il n'a pas fait d'études de médecine et n'est pas médecin. Il a obtenu un diplôme en éducation de l'université de Miami, située dans la ville d'Oxford dans l'état américain de l'Ohio, et un doctorat en éducation de l'université en ligne de Walden. Il n'y a donc pas de lien avec la prestigieuse université britannique d'Oxford. Selon nos confrères de Checknews, Sean Brooks n'a jamais publié d'article universitaire. Il a confirmé qu'il s'agit de lui dans la vidéo partagée en ligne, et confirme qu'il n'est ni médecin, ni diplômé de l'université britannique d'Oxford. Outre le fait qu'il se présente de façon quelque peu trompeuse, ses propos concernant les vaccins de Covid reposent sur une utilisation trompeuse des données et tirent des conclusions erronées. 1. Dr Malone est l'"inventeur" des vaccins à ARNm et a déclaré que personne ne devrait jamais être vacciné avec: Trompeur"Le Dr Robert Malone, qui a créé le vaccin à ARNm, a déclaré que personne ne devrait jamais subir ces injections," affirme Brooks dans la vidéo. Robert Malone est un scientifique dont les travaux de recherche à la fin des années 80 ont contribué au développement des vaccins ARNm, technologie utilisée dans les vaccins anti-Covid de Moderna et Pfizer/BioNtech. Il se considère comme "l'inventeur du vaccin à ARNm", mais en réalité de nombreux scientifiques sont impliqués dans cette recherche depuis plusieurs décennies. Robert Malone a une position floue sur les vaccins contre le Covid-19, que beaucoup d'opposants au vaccin interprètent comme une opposition tacite, mais Malone n'a pas dit que personne ne devait être vacciné avec. Il critique cependant le schéma de vaccination universelle, affirmant qu'il serait plus optimal de "vacciner uniquement les plus menacés." Tous les vaccins contre le Covid-19 n'utilisent pas la technologie ARNm. La liste complète des vaccins contre le Covid-19 à différents stades de développement est disponible ici. La liste des vaccins approuvés au sein de l'Union européenne est disponible ici. 2. Toutes les personnes vaccinées mourront six mois après avoir reçu le vaccin à cause d'un système immunitaire détruit: FauxBrooks affirme également que toutes les personnes vaccinées "mourront dans les six prochains mois ou dans trois à cinq ans." C'est affirmation ne repose sur aucun élément : les essais cliniques et les campagnes de vaccination ont débuté il y a plus de six mois sans hécatombe et rien ne vient scientifiquement étayer l'idée que cela pourrait arriver à l'avenir.L'essai clinique du vaccin Pfizer avait débuté en avril 2020. Six mois ont passé également depuis le début des essais du vaccin Janssen et la publication des résultats de l'essai du vaccin Moderna. Au 24 août 2021, près de deux milliards de personnes dans le monde étaient complètement vaccinées. Au contraire, les données montrent que les vaccins sont efficaces.Selon un rapport sur la surveillance vaccinale du Covid-19 de l'Institut anglais de santé publique, publié le 19 août 2021, "les dernières estimations montrent que le schéma de vaccination a directement évité plus de 82 100 hospitalisations. L'analyse de l'impact direct et indirect des campagnes de vaccination sur les infections et la mortalité suggère que le programme de vaccination a évité entre 23,6 et 24,4 millions d'infections et entre 91 700 et 98 700 décès." Une étude de l'Université d'Indiana et de la RAND Corporation, publiée le 18 août 2021 dans la revue Health Affairs, estime que la vaccination a évité près de 140 000 décès aux Etats-Unis. Une autre étude, publiée en juillet 2021, dirigée par la Yale School of Public Health, a estimé que la campagne de vaccination contre le Covid-19 lancée aux Etats-Unis à la fin de l'année dernière a "sauvé environ 279 000 vies et évité 1,25 million d'hospitalisations."Contrairement à ce que prétend Brooks, tous les vaccins - compris ceux contre le Covid- sont conçus pour aider le système immunitaire à combattre le virus : ils ne le détruisent pas."La vaccination est le moyen le plus sûr d'acquérir une immunité contre les agents pathogènes que votre organisme peut rencontrer," explique la British Society of Immunology. "Les vaccins contiennent une forme inoffensive de bactéries ou de virus qui causent la maladie contre laquelle vous vous immunisez. Votre système immunitaire reconnaîtra la forme inoffensive de bactéries ou de virus contenus dans le vaccin, sans vous rendre malade et produira une réponse immunitaire spécifique. Donc si une personne vaccinée est par la suite exposée à une bactérie ou à un virus, son système immunitaire est prêt à les combattre rapidement et à prévenir le développement d'une infection." Une dose de vaccin Pfizer/BioNtech contre la Covid-19, le 29 juin 2021. ( AFP / MARTIN BUREAU)3. Les vaccins contre le Covid-19 produisent des anticorps qui agissent en faveur des virus: FauxSelon Brooks, "tout le monde" produit des anticorps qui agissent en faveur du virus. L'ADE ("antibody-dependent enhancement", ADE en anglais, littéralement "aggravation dépendante des anticorps") est un mécanisme par lequel -paradoxalement- les anticorps créés pour combattre la maladie ou en réponse à la vaccination peuvent faciliter l'infection au lieu d'empêcher les agents pathogènes de pénétrer les cellules. On parle en français d'"anticorps facilitants". Cette hypothèse a été notamment avancée dans des cas de dengue par exemple.Mais si la crainte que ce mécanisme se produise dans le cas du Sars-Cov-2 avait été évoqué l'an dernier, il avait ensuite été écarté par les scientifiques.Cet article de vulgarisation scientifique du dictionnaire médical Vidal explique ce mécanisme et indique bien qu'"après environ 6 mois d'administration des vaccins contre la COVID-19 (vaccins à ARNm ou à adénovirus), sur plus d'un milliard de personnes à travers le monde, aucun événement de maladie aggravée associée à la vaccination n'a été observé". Un article publié dans le Journal of Infectious Diseases en août 2020 notait déjà que "la possibilité qu'un vaccin contre le SRAS-CoV-2 provoque une sensibilisation des receveurs à l'ADE fait l'objet d'une surveillance importante," mais qu'il est "peu probable" que des vaccins contre le Covid-19 pourraient conduire à l'ADE "parce que les maladies à coronavirus humain n'ont pas les attributs cliniques, épidémiologiques, biologiques ou pathologiques d'une ADE, tels que les virus de la dengue." L'épidémiologiste Dr Katelyn Jetelina affirmait en janvier 2021 que "ni la maladie Covid-19 ni les vaccins anti-Covid n'ont fourni de preuves de l'apparition d'ADE." Elle écrivait également que : "les test sont conçus pour trouver de potentiels problèmes comme l'ADE. Il n'y avait aucune preuve d'ADE dans les tests (vaccins) approuvés pour une utilisation d'urgence. S'il y avait des preuves d'ADE, ces vaccins ne réussiraient jamais et seraient rapidement retirés." En juillet 2021, les données sur la vaccination et l'infection réelle ont mené à la même conclusion. "Si les vaccins anti-Covid-19 avaient provoqué une ADE, les personnes vaccinées contre le Covid-19 auraient eu une maladie plus grave. Cela n'arrive pas. Au contraire, les personnes vaccinées ont généralement des symptômes très bénins ou rien du tout," explique le Dr Nada Fadul, spécialiste des maladies infectieuses au Département de médecine interne de l'Université du Nebraska.Dans la vidéo ci-dessous, le Dr Paul Offit du Vaccine Education Center du Children's Hospital de Philadelphie aux Etats-Unis explique la même chose. Plusieurs scientifiques ont exprimé le même avis dans des entretiens avec l'AFP, leurs réponses peuvent être trouvées ici. 4. Le test D-dimères prouve que toutes les personnes vaccinées ont des caillots sanguins: FauxBrooks affirme que toutes les personnes vaccinées contre le Covid-19 développent des caillots sanguins à cause du vaccin. Cette information est incorrecte comme l'a déjà écrit l'AFP.Cette théorie a notamment été popularisée par le médecin anti-vaccin canadien Charles Hoffe , qui affirme que les caillots sont trop petits pour apparaître à l'imagerie médicale, mais qu'il les a identifiés via le dosage dans le sang d'une substance appelée D-dimère, communément utilisée pour détecter la présence de caillots sanguins. Dans la vidéo, Brooks encourage les gens à passer un test D-dimère, affirmant que les caillots sanguins sont un des dangers mortels des vaccins.Cependant, des experts ont expliqué à l'AFP que l'expérience de Hoffe n'est non seulement pas une étude scientifiquement fiable, mais que, isolément, des niveaux élevés de D-dimères ne sont de toute façon pas une preuve de la présence de caillots sanguins. Un spécialiste peut prescrire un test aux D-dimères s'il y a suspicion de caillot sanguin.Mais des niveaux élevés de D-dimères chez les patients vaccinés ne sont pas nécessairement inquiétants."Quand on est vacciné, une inflammation survient souvent : on a de la température, des douleurs...ça prouve que le vaccin marche," explique à l'AFP Marie-Antoinette Sevestre-Pietri, présidente de la Société Française de Médecine Vasculaire le 15 juillet. "Cette réaction inflammatoire conduira à des niveaux élevés de D-dimères, mais cela ne signifie pas qu'une thrombose se produira." C'est également ce qu'affirme le Dr Nicolas Gendron, médecin au service d'hématologie de l'hôpital Georges-Pompidou à Paris. "Des niveaux élevés de D-dimères ne signifient pas que vous avez une thrombose", a-t-il dit à l'AFP le 20 juillet. Une thrombose est la formation d'un caillot sanguin dans le coeur ou dans un vaisseau sanguin. Cela signifie que "des examens supplémentaires, comme un scanner, seront nécessaires pour le confirmer", selon le Dr Gendron. 5. Les vaccins anti Covid-19 provoquent la stérilité et des fausses couches: FauxBrooks affirme que les personnes vaccinées vont devenir stériles à cause du vaccin contre le Covid-19, et que les femmes enceintes font des fausses-couches à cause de la vaccination. C'est faux. L'AFP avait déjà écrit à ce sujet, par exemple en juin 2021.De telles rumeurs ont circulé notamment après la publication d'une étude dans le New England Journal of Medicine le 17 juin 2021. L'étude utilise les données du système américain de déclaration des événements indésirables vaccinaux (VAERS), la sécurité système de surveillance après vaccination (V-Safe) et le registre de grossesse après le vaccin Covid-19 pour donner un premier aperçu de la sécurité du vaccin Covid-19 chez les femmes enceintes. Les données ont été récoltées entre le 14 décembre 2020 et le 28 février 2021. Aucun risque établi n'a été trouvé pour les femmes enceintes qui ont reçu le vaccin à ARNm contre le Covid-19, mais l'étude précise qu'"un suivi à plus long-terme est nécessaire, y compris le suivi d'un grand nombre de femmes vaccinées plus tôt dans la grossesse." Une femme enceinte se fait vacciner à Surabaya en Indonésie, le 19 août 2021. ( AFP / JUNI KRISWANTO)Plus récemment encore, en août 2021, les Centers for Disease Control and Prevention (CDC) des Etats-Unis ont publié de nouvelles données sur la sûreté des vaccins contre le Covid-19 chez les femmes enceintes, montrant que les vaccins utilisés aux Etats-Unis (Moderna, Pfizer/BioNtech et Janssen) ne posent pas de risques sur une grossesse."La CDC encourage toutes les femmes enceintes ou les personnes envisageant une grossesse et l'allaitement à se faire vacciner pour se protéger du Covid-19," a déclaré la directrice du CDC, Dr Rochelle Wolensky. "Les vaccins sont sûrs et efficaces et il n'a jamais été aussi urgent d'augmenter la couverture vaccinale, car nous sommes confrontés à un variant hautement transmissible de Delta et nous constatons de graves conséquences du Covid-19 chez les femmes enceintes non vaccinées." Le Royal College of Obstetricians and Gynecologists au Royaume-Uni a confirmé en août 2021 que les données de plusieurs pays concernant les femmes enceintes, ainsi que la connaissance du fonctionnement des vaccins, montrent que les vaccins contre le Covid-19 ne présentent pas un risque plus élevé de fausse couche. "Les données des Etats-Unis et du Royaume-Uni, où plus de 200 000 femmes enceintes ont reçu le vaccin contre le Covid-19, ne soulèvent pas de problèmes de sûreté," indique le communiqué."Des études menées dans quatre pays, qui ont inclus plus de 40 000 femmes enceintes, montrent que le vaccin n'augmente pas le risque de fausse couche, de naissance prématurée, de mort à la naissance, ni le risque d'avoir un bébé prématuré ou le risque d'anomalies congénitales." Le 9 août 2021, l'American College of Obstetricians and Gynecologists, ainsi que d'autres organisations de soins de santé, ont publié une déclaration sur "un consensus médical fort pour vacciner les femmes enceintes contre le Covid-19". Il est également possible d'allaiter après la vaccination. 6. Les personnes vaccinées ne peuvent plus donner leur sang, leur plasma ou leurs organes: FauxLes personnes vaccinées peuvent donner du sang, du plasma et des organes. L'Etablissement Français du Sang le confirme ici. La vaccination contre le Covid-19 est recommandée pour les personnes qui reçoivent et qui donnent des organes.
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