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La multiplication récente des cas de variole du singe serait la conséquence de l'utilisation du vaccin AstraZeneca contre le Covid-19, soupçonnent de nombreuses publications sur Facebook depuis le 21 mai. En guise de preuve, elles mettent en avant l'utilisation d'un adénovirus de chimpanzé dans le processus de création du vaccin. Attention, les experts interrogés par l'AFP expliquent que ces deux virus sont complètement différents. L'adénovirus utilisé dans le vaccin contre le Covid-19 a été a atténué de façon à ce qu'il soit inoffensif pour l'organisme, ajoutent-ils. De plus, si le virus responsable de la variole du singe a été découvert pour la 1ere fois chez des macaques il n'est pas particulier à cette espèce, note l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm)."Comme c'est bizarre", "adénovirus de singe (...) comme la variole", "quel hasard"... Les sous-entendus d'internautes qui partagent une image avec la composition du vaccin AstraZeneca sont nombreux sur Facebook, depuis le recensement de cas de variole du singe en Europe et en Amérique début mai. D'autres internautes sont encore plus directs : "La variole est un des effets secondaires de Astrazeneca", écrit un utilisateur de Twitter le 25 mai. "Réfléchissons, AstraZeneca provoque la variole du singe", affirme un autre. Capture d'écran réalisée sur Twitter le 1er juin 2022 Capture d'écran réalisée sur Facebook le 1er juin 2022 Sur l'image partagée dans les publications, on peut voir un document portant sur le vaccin AstraZeneca avec la mention "adénovirus de chimpanzé" entourée. Mais tous les experts, interrogés fin mai par l'AFP sur un éventuel lien entre son administration lors de la pandémie de Covid-19 et l'apparition de cas de variole du singe en Europe, ont balayé une "théorie infondée"."Le virus responsable de la variole du singe et l'adénovirus du chimpanzé utilisés dans les vaccins d'AstraZeneca sont des virus complètement différents et ne doivent pas être confondus", a ainsi résumé le 26 mai à l'AFP le professeur Yoo Jin-Hong, épidémiologiste à l'Université catholique de Corée, où la fausse information a également circulé.Un adénovirus atténuéSelon ce document de l'Agence européenne des médicaments (EMA), le vaccin AstraZeneca comporte bien "un adénovirus de chimpanzé codant pour la glycoprotéine SArs-CoV-2 Spike (ChAdOx1-S)". Il s'agit d'une version génétiquement modifiée et atténuée du virus, explique l'université d'Oxford sur son site, qui a participé au développement du vaccin.Ce virus transporte le "code génétique de la protéine de pointe" utilisée par le Sars-Cov-2 [virus à l'origine du Covid, NDLR] pour pénétrer dans les cellules humaines. Une fois injecté, il est reconnaissable par l'organisme qui activera le système immunitaire lors d'une infection ultérieure. Teresa Lambe, professeur d'immunologie à l'Université d'Oxford et membre du groupe de recherche sur le vaccin Covid-19 d'Oxford, a déclaré à l'AFP le 26 mai que "l'adénovirus de chimpanzé utilisé dans le vaccin a été génétiquement modifié de telle manière à ce qu'il ne puisse se développer chez l'être humain".Il n'est "pas possible que cet adénovirus se transforme" en virus responsable de la variole du singe, a-t-elle affirmé, soulignant elle aussi les différences majeures entre les deux virus. ( POOL / ANDREW MATTHEWS)Selon Yannick Simonin, maître de conférences et virologue à l'université de Montpellier, ces deux virus présentent des différences dans leurs codes génétiques comparables "aux différences (de codes génétiques) entre une fourmi et un rhinocéros". Il est "impossible" qu'il y ait un lien entre l'adénovirus de chimpanzé utilisé dans le vaccin et la variole du singe, a-t-il expliqué à l'AFP le 25 mai.Les deux virus n'appartiennent tout simplement pas à la même famille, selon les spécialistes. "De nombreuses rumeurs et fausses informations se propagent déjà sur internet, notamment concernant un possible lien entre la maladie et les vaccins anti-Covid qui utilisent un adénovirus de chimpanzé comme vecteur viral. Ce lien n’est absolument pas fondé, tout d’abord parce que ce virus n’est pas spécifique aux singes (...) Ensuite, parce qu’il fait partie de la famille des poxvirus et non des adénovirus", détaille l'Inserm sur son site dans une fiche du 23 mai 2022.Ce que l'on sait de la variole du singeSi le nom attribué à cette maladie peut porter à confusion, la variole du singe est en réalité "une maladie infectieuse qui est causée par un virus transmis à l’Homme par des animaux infectés, le plus souvent des rongeurs (même si le virus a été découvert pour la première fois en 1958 au sein d’un groupe de macaques qui étaient étudiés à des fins de recherche, d’où son nom)", écrit l'Inserm."Contrairement au SARS-CoV-2 au moment de son apparition, il s’agit donc d’un virus que l’on connaît déjà bien depuis plusieurs décennies", ajoute l'Institut national de recherche médicale. L'incubation peut en général aller de 5 à 21 jours et les symptômes ressemblent, en moins grave, à ceux que l'on observait dans le passé chez les sujets atteints de variole ("smallpox" en anglais) fièvre, maux de tête, douleurs musculaires, dorsales, au cours des cinq premiers jours.Puis apparaissent des éruptions cutanées (sur le visage, la paume des mains, la plante des pieds), des lésions, des pustules et enfin des croûtes. Elle guérit en général spontanément et les symptômes durent de deux à trois semaines. Les cas graves se produisent plus fréquemment chez les enfants et sont liés à l'ampleur de l’exposition au virus, à l'état de santé du patient et à la gravité des complications.Quelle transmission ? L'infection des cas initiaux résulte d'un contact direct avec du sang, des liquides biologiques ou des lésions cutanées ou muqueuses d'animaux infectés. En l'état actuel des connaissances, la transmission secondaire, c'est-à-dire interhumaine, peut résulter de contacts étroits avec des sécrétions infectées des voies respiratoires, des lésions cutanées d'un sujet infecté ou d'objets récemment contaminés par des liquides biologiques ou des matières provenant des lésions d'un patient. L'Inserm précise qu'historiquement, "il s’agit d’un virus qui se transmet difficilement d’Homme à Homme, la transmission d’animal à l’Homme étant bien plus fréquente". Le taux de létalité de la maladie varie de 1 à 10% selon le variant (il en existe deux), des taux observés en zone endémique, dans des pays au système de santé défaillant. Dans les pays où la maladie a été repérée récemment, les cas observés sont pour la plupart bénins et il n'y a pas de décès recensés.Depuis que la Grande-Bretagne a signalé pour la première fois un cas confirmé de variole du singe le 7 mai, près de 400 cas ont été signalés à l'OMS dans près d'une vingtaine de pays habituellement non touchés par ce virus, alimentant des inquiétudes sur le développement d'une nouvelle crise sanitaire majeure après le Covid-19.Mais l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) a assuré le 31 mai ne pas redouter pour l'instant que la propagation du virus de la variole du singe au-delà des pays africains puisse déclencher une pandémie mondiale. Les fausses informations sur le sujet ont, elles, déjà commencé à traverser les frontières.2 juin 2022 ajoute mot-clé
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