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Une vidéo vue plus de 53.000 fois depuis le 20 février prétend montrer les attaques racistes subies par les personnes d'origine asiatique par des Belges convaincus qu'ils sont porteurs du coronavirus. Il s'agit en réalité d'un extrait tiré d'une caméra cachée, réalisée avec des acteurs."Voilà (ce) à quoi est confrontée la communauté asiatique en ce moment, tout simplement honteux et scandaleux", affirme la page Facebook "Le média des enchaînés", dans la publication diffusant les images, partagée près de 1.500 fois. (Capture d'écran réalisée sur Facebook le 21 février 2020)Dans la vidéo, qui se déroule dans une rame de métro, une femme demande à trois personnes d'origine asiatique de sortir de la rame car elle "n'a pas envie d'être infectée" par le nouveau coronavirus. "Cela se propage partout", ajoute une autre femme en manteau orange, assise sur un siège à proximité.Face aux remarques racistes, les trois personnes d'origine asiatique décident de descendre à l'arrêt suivant, malgré la réaction de nombreux passagers qui prennent leur défense."Quand je vois la réaction de cette femme, j'ai honte d'être belge", regrette une internaute dans les commentaires de la publication. "Ce pays a perdu la boule et le racisme est son virus le plus mortel", commente un autre. De nombreuses personnes affirment toutefois qu'il s'agit d'une caméra cachée.L'inscription "Would you React" apparaît en effet sous forme de logo en haut à droite et en bas à droite de la vidéo : En effectuant une simple recherche sur Google, on retrouve une chaîne Youtube du même nom, qui a diffusé une vidéo bien plus longue contenant les mêmes images, trois jours avant la publication Facebook trompeuse.Cette vidéo commence par une introduction face caméra de Jonathan Lambinet, son producteur et réalisateur. Il précise bien qu'il s'agit d'un "scénario", dans le cadre d'une caméra cachée avec "des acteurs".Joint par téléphone le 21 février, Jonathan Lambinet a expliqué que la vidéo avait été tournée le 5 février 2020, dans le métro de Bruxelles."Nous avons trouvé trois acteurs d'origine asiatique et deux actrices pour jouer les agresseurs. On a installé des caméras, puis on a attendu qu'il y ait du monde dans la rame et on a lancé l'expérience", a-t-il détaillé.Dans la description de la vidéo, la chaîne remercie ses acteurs : Sur son site internet, "Would your React ?" explique que sa démarche relève de la caméra cachée et de l'expérience sociale. "Quand une personne regarde la vidéo, cela peut lui donner envie de réagir face à une situation injuste comme celle-ci", a estimé Jonathan Lambinet, qui déplore le "vol" et "le détournement" que constituent les extraits coupés puis diffusés sur les réseaux sociaux.Dans la vidéo complète -comptabilisant 885.000 vues au 21 février-, des échanges ont lieu après chaque expérience, entre les acteurs et les passagers de la rame sur le thème du racisme et des dangers liés au coronavirus : Dans sa vidéo, l'équipe de "Would You React" a également fait intervenir la microbiologiste belge Sandrine Roisin, pour évoquer le sujet. En Belgique, "on a plus de chance pour l’instant, d’attraper la grippe que d’attraper un coronavirus", explique-t-elle dans la vidéo. "Les seules personnes qui sont à risque, ce sont des personnes qui vont développer des syndromes respiratoires aigus et qui ont été en Chine dans les 14 jours précédents", dit-elle également."Tout le monde a soutenu les trois acteurs asiatiques à leur manière. Que ce soit avec de l’humour, du raisonnement ou encore un peu d’agressivité", raconte Jonathan Lambinet à la fin de son sujet."C'est un paradoxe assez bizarre car on sentait beaucoup de haine sur le sujet sur internet, et quand on va essayer de la sonder dans la réalité on découvre que les gens défendent beaucoup", a -t-il relevé par téléphone.Au 21 février, un seul cas de nouveau coronavirus a été détecté en Belgique, comme nous l'écrivions dans cette dépêche. Depuis l'apparition de l'épidémie, de nombreuses personnes d'origine asiatique à travers le monde ont été victimes de stigmatisation ou de réactions racistes, comme nous l'écrivions dans ces dépêches AFP (1,2,3,4).En Australie, dans la région de la Gold Coast, un patient a refusé de serrer la main de sa chirurgienne, Rhea Liang, invoquant le danger de contracter le virus. Elle a d'abord été choquée puis, après avoir raconté l'incident sur Twitter, elle a réalisé qu'il était loin d'être unique.Au Canada, un homme blanc a été filmé dans le parking d'un centre commercial lançant à une femme sino-canadienne "vous avez laissé votre coronavirus". En Malaisie, près de 500.000 personnes ont signé en une semaine une pétition pour "empêcher les Chinois d'entrer dans notre pays bien-aimé"."C'est un phénomène habituel", a observé le 4 février auprès de l'AFP Rob Grenfell, le directeur de la santé et de la biosécurité au CSIRO (Commonwealth Scientific and Industrial Research Organisation), un organisme public australien de recherche scientifique."Pour chaque épidémie au cours de l'histoire humaine, nous avons tenté d'incriminer certaines catégories de population", a-t-il poursuivi. Le nouveau coronavirus est "bien sûr apparu en Chine", a-t-il, "mais ce n'est pas une raison pour diaboliser les Chinois".L'épidémie de nouveau coronavirus a fait 2.200 morts et contaminé plus de 75.000 personnes en Chine et 1.100 ailleurs dans le monde au 21 février. De nombreuses fausses informations circulent à son sujet, retrouvez toutes nos vérifications ici.
(fr)
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