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Une photo d'un homme et deux enfants retrouvés pendus dans des arbres a largement circulé début septembre sur les réseaux sociaux en RDC. Ces publications affirment que les faits se sont deroulés dans l’est du pays, où un père aurait pendu ses enfants avant de se suicider. Attention: cette image montre en réalité les victimes d’un drame familial en Angola.Au milieu des arbres, on distingue deux corps d’enfants inanimés, suspendus parmi des arbres. A proximité, on voit la silhouette d’un homme, également suspendu. Sur la capture d'écran, l'AFP a flouté les visages.Pour l’auteur d’une publication partagée près de 700 fois sur Facebook depuis le 10 septembre, il s’agit d’"un père qui s’est pendu avec ses enfants à cause des souffrances dans un village à quelques kilomètres de Bunia".Bunia est le chef-lieu de la province de l’Ituri, région de la partie est de la République démocratique du Congo (RDC) en proie depuis décembre 2017 à d’incessantes violences qui ont fait plus de 1.000 morts et un demi-million de déplacés, selon un rapport du centre d'analyse politique International Crisis Group (ICG) publié le 15 juillet. Capture d’écran réalisée sur Facebook le 22 septembre 2020.Cette histoire a été relayée des centaines de fois ces dernières semaines par plusieurs publications en RDC (1, 2, 3).Parmi les nombreux commentaires compatissants à ce drame, on remarque toutefois qu’un internaute affirme en lingala (l’une des quatre langues nationales de la RDC) que les faits se seraient déroulés en Angola. Capture d’écran d’un commentaire Facebook prise le 15 septembre 2020."Fausse info… intox, cela s’est passé dans une province en Angola, c’est mal de mentir", peut-on traduire en français.En menant une recherche d’images inversée sur Google Images, nous retrouvons en effet cette photo dans un article en portugais publié le 9 septembre sur un site d’information angolais Petalas de Angola.L’auteur de l’article, qui cite comme source "les réseaux sociaux", raconte qu’"un citoyen a tué ses deux enfants puis s’est suicidé parce qu’il ne pouvait subvenir à leurs besoins". L’article affirme que ce drame s’est déroulé dans la commune d’Equimina, dans la province de Benguela située dans le sud-ouest de l’Angola. Aucune trace d’un tel drame en Ituri Nous avons alors décidé de vérifier avec les autorités locales dans les deux pays.Contacté par l’AFP, le 15 septembre, le lieutenant Jules-Ngongo, porte-parole des Forces armées de la république (FARDC) en Ituri a indiqué ne pas avoir été informé d’un drame de ce genre, ni avoir vu cette photo."Nous n’avons aucune information en rapport avec ces images. A ma connaissance, ce n’est pas une image de l'Ituri par rapport à cet environnement" (végétation, ndlr), a-t-il déclaré.Adjio Gidi, ministre provincial en charge de l'Intérieur, a affirmé n'avoir lui non plus "reçu aucune alerte sur ce genre d'information, n'avoir aucune précision sur l'image et la localisation où a eu lieu cet événement". "Le paysage et l'arbre sur la photo ne reflètent pas l'image de la forêt dans les périphéries de la ville de Bunia", poursuit-il, en mettant en doute lui aussi que les arbres et la végétation visibles à l’image soient de cette région."Suite à la pression démographique et l'exploitation abusive de bois, la ville de Bunia est entourée de savane, la forêt est en voie de disparition, les rivières tarissent déjà", souligne-t-il.Contactées par l’AFP, les autorités locales de Ngongo, Kunda, Bambunya, Bavandi, Babuchuka, Tsere de Bunia, localités situées aux abords de Bunia, ont affirmé ne pas avoir eu connaissance d’une telle histoire.Une photo prise en Angola En faisant une recherche avec un extrait de l’article angolais sur l'outil d’analyse des réseaux sociaux CrowdTangle, plusieurs résultats apparaissent.L’image a circulé sur les réseaux sociaux lusophones. Capture d'écran CrowdTangle réalisée le 22 septembre 2020Contactées par l’AFP le 20 septembre, les autorités policières de la province de Benguela, où s’est déroulé le drame selon l’article angolais, ont reconnu la photo. Ce drame s’est déroulée dans le village de Upindi, sur la commune de Changoroi, a précisé Pinto Caimambo, porte-parole de la délégation du ministère de l'Intérieur dans la province de Benguela. Il a toutefois nuancé la version qui circule sur les réseaux sociaux angolais.Selon lui, il s'agit d'un paysan qui a tué ses deux enfants, âgés de un et quatre ans, par pendaison, puis a mis fin à ses jours de la même manière, en raison d'un différend familial sur fond de problèmes d’alcool.Les querelles récurrentes dans cette famille avaient amené la mère à quitter le domicile familial avec ses enfants, environ un mois plus tôt. "Quelques jours avant l'incident, il (le père) s'est rendu chez les parents de la femme pour aller chercher les deux mineurs en disant qu'il allait passer le week-end (avec eux). C’est alors (...) qu’il a pris la décision de mettre fin à la vie de ses enfants et de lui-même", a poursuivi M. Caimambo.Pour une raison inconnue, cette tragique histoire a été transposée en RDC par des internautes sur les réseaux sociaux.
(fr)
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