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  • 2022-09-07 (xsd:date)
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  • 29% des jeunes vaccinés contre le Covid par Pfizer victimes de problèmes cardiaques ? Attention aux interprétations trompeuses d'une étude thaïlandaise (fr)
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  • Des publications très partagées sur les réseaux sociaux affirment qu'une "nouvelle étude" montre que "29% des jeunes vaccinés contre le Covid par Pfizer ont souffert de problèmes cardiaques". Mais c'est trompeur. L'étude, menée par des scientifiques thaïlandais, ne porte que sur 301 adolescents. Un échantillon trop faible pour en tirer des conclusions sur la totalité des vaccinés, selon les chercheurs interrogés par l'AFP. Les inflammations cardiaques post-vaccination sont surveillées par les autorités sanitaires depuis 2021, et les données connues à ce jour montrent que les myocardites et péricardites chez des personnes vaccinées sont rares, transitoires et la plupart du temps peu graves. Elles surviennent par ailleurs dans des proportions plus faibles que lors de complications liées à une infection par le Covid-19, soulignent des experts auprès de l'AFP."Nouvelle étude: 29% des jeunes vaccinés contre le Covid par Pfizer ont souffert de problèmes cardiaques", alerte le titre d'un article du 11 août 2022 site "The Epoch Times" en français, qui relaie régulièrement des informations non-vérifiées voire des théories complotistes, selon une analyse de l'entreprise Newsguard, qui évalue la fiabilité des sites.Des allégations similaires ont été relayées à plusieurs centaines de reprises depuis le mois d'août dans des publications sur Twitter (ici, là) et Facebook, et reprises par d'autres blogs (ici, là), laissant à penser que ces chiffres font référence à la totalité des "jeunes vaccinés". Capture d'écran du site "The Epoch Times", prise le 06/09/2022 Capture d'écran d'une recherche Facebook, prise le 06/09/2022  En anglais, des affirmations semblables mettant en garde contre la vaccination anti-Covid chez les adolescents ont été partagées dans des tweets et vidéos YouTube. Plusieurs personnalités très suivies, dont le PDG de l'une des plus influentes organisations anti-vaccination aux Etats-Unis, Del Bigtree, et le cardiologue américain Peter McCullough, qui a déjà diffusé des allégations fausses ou trompeuses liées à la pandémie de Covid-19, s'en sont également fait les relais.Ces allégations diffusées sur les réseaux sociaux renvoient vers des recherches publiées en août par des scientifiques thaïlandais. Cependant, ces dernières ont été menées sur 301 adolescents, un échantillon faible, qui rend trompeuse l'extrapolation de ces données à grande échelle, ont indiqué des chercheurs à l'AFP. Les myocardites et péricardites, inflammations cardiaques, survenant après la vaccination anti-Covid, sont surveillées par les autorités sanitaires de plusieurs pays dont la France, depuis 2021, et sont considérées comme rares.Quelle "nouvelle étude" thaïlandaise ?L'étude, intitulée "Cardiovascular Effects of the BNT162b2 mRNA COVID-19 Vaccine in Adolescents" (ou en français, "Effets cardiovasculaires du vaccin contre le Covid-19 à ARNm BNT162b [nom du vaccin de Pfizer - BioNTech, NDLR] chez les adolescents"), a fait des vagues sur les réseaux sociaux dès sa prépublication le 8 août 2022. L'article de recherches a depuis été révisé par des pairs et publié le 19 août 2022 dans la revue "Tropical Medicine and Infectious Disease".Les chercheurs ont mené "une étude de cohorte prospective" (qui s'intéresse à l'occurrence d'événements pendant une période donnée sur un échantillon de patients), pour examiner les "manifestations cardiaques, particulièrement les myocardites et les péricardites" survenant chez 301 adolescents thaïlandais âgés de 13 à 18 ans. Ils ont commencé à surveiller ces patients avant leur deuxième dose de vaccin anti-Covid et ont poursuivi leurs observations après cette dernière. Parmi ces 301 patients (dont 99 adolescentes et 202 adolescents), les chercheurs notent qu'un cas de myopéricardite, une complication de la péricardite aiguë, a été confirmé. Une péricardite a été suspectée chez deux autres patients, et une myocardite subclinique (peu ou pas de symptômes) suspectée chez quatre autres. D'autres manifestations cardiaques et effets secondaires plus "légers" ont été recensés dans l'étude. "Les signes et symptômes cardiovasculaires les plus courants étaient la tachycardie (7,64 %), l'essoufflement (6,64 %), les palpitations (4,32 %), les douleurs thoraciques (4,32 %) et l'hypertension (3,99 %)", notent les auteurs. "Des manifestations cardiovasculaires ont été observées chez 29,24 % des patients, allant de la tachycardie ou des palpitations à la myopéricardite", écrivent-ils aussi, notant que ces effets étaient "légers et transitoires".Les auteurs ont conclu que "la présentation clinique de la myopéricardite après la vaccination était de façon générale bénigne et temporaire, et tous les cas se sont rétablis complètement dans les 14 jours", recommandant aussi de surveiller les adolescents vaccinés afin de détecter d'éventuels effets secondaires cardiovasculaires. Capture d'écran de l'étude publiée le 19 août 2022 dans la revue "Tropical Medicine and Infectious Disease", prise le 06/09/2022Mais ces recherches ne permettent pas de conclure que 29% de tous les jeunes vaccinés seraient atteints de troubles cardiovasculaires, et ne constituent pas de nouveaux signaux d'alerte au sujet de risques cardiaques liés à la vaccination anti-Covid, souligne Peter Liu, directeur scientifique et vice-président de la recherche à l'Institut de cardiologie d'Ottawa (Canada), auprès de l'AFP le 24 août.Il rappelle en effet que plusieurs autres études, portant sur des dizaines milliers de personnes vaccinées dans plusieurs pays, montrent que les cas d'inflammations cardiaques graves survenant après la vaccination sont "rares". Peter Liu précise aussi que parmi un peu plus de 300 participants, les auteurs de l'étude thaïlandaise n'ont trouvé qu'un seul cas confirmé d'inflammation cardiaque grave, et six cas suspectés. Tous les patients se sont par ailleurs rétablis moins de deux semaines. "Les gens utilisent ces cas pour confirmer leurs préjugés" anti-vaccination sur les réseaux sociaux, regrette-il auprès de l'AFP.Pour Jack Price, cardiologue pédiatrique à l'hôpital pour enfants du Texas, l'étude thaïlandaise n'ajoute pas non plus de préoccupations particulières au sujet des données connues liées au rétablissement des patients. "Dans tous les cas, les symptômes étaient légers avec un rétablissement complet dans les 14 jours", souligne-t-il auprès de l'AFP le 31 août.Les myocardites et péricardites post-vaccinationLes myocardites, des inflammations du muscle cardiaque, et les péricardites, des inflammations de la membrane qui entoure le cœur, sont causées, la plupart du temps, par une infection virale (comme le Covid-19) et surviennent plutôt chez des hommes jeunes. Dans la majorité des cas, l'état de santé des patients s'améliore de lui-même ou à l'aide d'un traitement, indique sur son site l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM)."La myocardite, c'est une maladie cardiaque rare qui a une présentation très hétérogène, très polymorphe, qui va de formes paucisymptomatiques (peu symptomatiques, NDLR) qui heureusement représentent la plupart des cas, à des formes très sévères qui peuvent aller en réanimation", précisait Mathieu Kerneis, cardiologue à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière et chercheur responsable de la filière "myocardites" au sein du groupe Action cœur, le 23 juin 2022 auprès de l'AFP."La myocardite touche préférentiellement les hommes, et les hommes jeunes, pour des raisons qui ne sont pas encore tout à fait comprises", ajoutait le chercheur, soulignant aussi que les myocardites et les péricardites "sont certes des atteintes inflammatoires du cœur, mais la myocardite est potentiellement grave, tandis que la péricardite est généralement une pathologie plutôt bénigne avec laquelle on n'est pas forcément hospitalisé".Depuis l'été 2021, les myocardites et les péricardites sont considérées en France comme des effets indésirables pouvant survenir suite à une vaccination contre le Covid-19 par un vaccin à ARN messager (Pfizer-BioNTech ou Moderna). Le groupement de recherches français EPI-PHARE, qui réalise des études de pharmaco-épidémiologie à partir des données du Système National des Données de Santé (SNDS), "pour éclairer les pouvoirs publics dans leur prise de décision", publie depuis fin 2021 régulièrement des études résumant l'état des données sur ce sujet, comme déjà détaillé dans cet article.Dès le printemps 2021, des premières recherches avaient été publiées au sujet de la surveillance des myocardites et des péricardites survenues post-vaccination anti-Covid. Les autorités sanitaires américaines avaient ainsi dès avril 2021 indiqué suivre avec attention des signalements de cas de myocardites rapportés via le système de pharmacovigilance. Une soignante prépare une dose de vaccin Pfizer-BioNTech contre le Covid-19 à Mexico, le 27 juin 2022 ( AFP / Pedro PARDO)En novembre 2021, un rapport français d'EPI-PHARE avait conclu en la confirmation "de l'existence d’un risque de myocardite et péricardite dans les sept jours suivant une vaccination contre la Covid-19 avec un vaccin ARNm (Pfizer BioNTech et Moderna) chez les personnes âgées de 12 à 50 ans, particulièrement les jeunes de moins de 30 ans". Il notait également que "ce risque est plus élevé avec le vaccin Moderna. Cependant, le nombre de cas attribuables aux vaccins apparaît peu fréquent au regard du nombre de doses administrées", et "confirm[ait] également l'évolution clinique favorable des cas de myocardite et de péricardite suite à la vaccination".Les chiffres mis en avant dans l'étude faisaient part d'un nombre de myocardites atteignant au maximum environ 130 cas pour un million d'injections, pour les groupes les plus touchés (les hommes de moins de 30 ans, vaccinés avec Moderna). Par ailleurs, les myocardites répertoriées après la vaccination n'étaient pas considérées comme "graves", les patients quittant généralement l'hôpital quelques jours après y avoir été admis.Ces recherches avaient d'ailleurs été prises en compte par les autorités sanitaires françaises : début novembre 2021, la Haute Autorité de Santé avait publié un communiqué précisant que "dans l'attente de données complémentaires sur le risque de myocardites et (...) compte tenu de l'insuffisance de recul sur le risque de myocardites avec le vaccin Spikevax [celui de Moderna, NDLR] la HAS recommande, pour la population âgée de moins de 30 ans et dès lors qu'il est disponible, le recours au vaccin Comirnaty [de Pfizer-BioNTech, NDLR]".Les données sont depuis continuellement surveillées par des chercheurs du monde entier. EPI-PHARE a par exemple publié une seconde étude à ce sujet, en avril 2021, et une troisième en juillet 2022. La plus récente étude "montre l'existence d'un risque de myocardite après la première dose de rappel (troisième dose). Ce risque est plus faible qu'après la deuxième dose et diminue avec l'allongement du délai entre les doses successives", indiquent les chercheurs, précisant aussi que "pour autant, les myocardites associées aux vaccins à ARNm restent des évènements peu fréquents au regard du nombre de personnes exposées".Une autre étude réalisée en juin 2022 en Ontario, au Canada, proposait aussi des recommandations de vaccination différentes selon l'âge, et suggérait que des intervalles plus longs entre les injections pouvaient atténuer une partie des risques, sans compromettre l'efficacité du vaccin.Myocardites et Covid-19Les autorités sanitaires de la plupart des pays, dont les Etats-Unis, le Canada et la France, recommandent toujours la vaccination contre le Covid-19, tout en soulignant l'importance de la surveillance des signalements d'effets indésirables. Par ailleurs, les chercheurs interrogés par l'AFP précisent que des études ont montré qu'il existe plus de complications cardiaques survenues à la suite d'une infection au Covid-19 qu'à la suite de la vaccination.Mathieu Kerneis précisait déjà en juin qu'il convient de "mettre au regard" les myocardites signalées après la vaccination anti-Covid et celles signalées des suites d'une infection au Covid-19, citant notamment une étude réalisée par des chercheurs israéliens et publiée en septembre 2021 dans la revue The New England Journal of Medicine. Dans cette dernière, les chercheurs ont évalué à 3 pou 100.000 le nombre de cas de myocardites signalés après une vaccination avec le vaccin de Pfizer, tandis qu'il s'élevait à 11 pour 100.000 après une infection au Covid-19. "Tout ça ne doit pas être un frein à la vaccination, au contraire", estimait-il.Martina Patone, statisticienne au département des sciences de la santé primaire de l'Université d'Oxford Nuffield est l'auteure principale d'une analyse comprenant des données au sujet de 43 millions de personnes âgées de plus de 13 ans qui ont été vaccinées au Royaume-Uni. Elle indiquait en août 2022 à l'American Heart Association, un organisme américain de référence en matière de maladies cardiovasculaires, que parmi ces données, "le risque de myocardite après la vaccination contre le Covid-19 était assez faible comparativement au risque de myocardite après l’infection à la COVID-19".Peter Liu a aussi ajouté que "si l'on compare les complications cardiaques liées au Covid-19, les complications induites par le vaccin sont beaucoup moins nombreuses". Son institut de cardiologie a reçu des patients de venant de tout le Canada, et Peter Liu a précisé auprès de l'AFP avoir été "rassuré" par leur rétablissement rapide. "Plus de 90 pour cent des patients sont complètement rétablis. Il n'y a absolument aucun problème résiduel". Ces patients continueront à être suivis pendant au moins trois ans. "Je ne suis pas inquiet pour eux", a abondé Peter Liu. Une adolescente reçoit la première dose du vaccin de Pfizer-BioNTech contre le Covid-19 à Quito, en Equateur, le 13 septembre 2021 ( AFP / RODRIGO BUENDIA)Cela correspond aussi à ce que le cardiologue pédiatrique Jack Price, a dit à l'AFP avoir observé dans son hôpital chez des patients vaccinés : ils signalent des symptômes "légers et transitoires" et "se rétablissent rapidement".Jack Price, qui est également directeur de la branche dédiée à la pédiatrie pour la Myocarditis Foundation, dédiée notamment aux recherches liées à cette maladie et à d'autres infections cardiaques, relève aussi que les myocardites qui font suite à une infection virale sont plus grave et plus durables. Selon lui, la myocardite d'origine virale est beaucoup plus susceptible de laisser un patient avec "une vraie blessure ou une fonction cardiaque anormale", a-t-il précisé le 31 août à l'AFP.C'est aussi pourquoi il affirme continuer de conseiller à tous les patients éligibles à la vaccination contre le Covid-19 de recevoir les injections. Selon lui, il est impossible de savoir si un enfant fera partie de ceux qui souffriront d'une complication grave causée par une infection au SARS-CoV-2. "Ces situations sont également rares, mais elles se produisent et elles peuvent changer une vie. Si nous pouvons les éviter avec un simple vaccin, alors nous devrions", estime-t-il.Depuis le début de la pandémie de Covid-19, de nombreuses études ou publications scientifiques font l'objet d'interprétations trompeuses sur les réseaux sociaux. En mai 2020, l'AFP avait rappelé quelques repères pour s'y retrouver dans un article. L'AFP a réalisé plus de 790 articles de vérification en français liés au Covid-19 depuis le début de la pandémie, au 23 juin 2022. (fr)
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