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Depuis au moins une quinzaine d'années, des rumeurs au sujet d'une prétendue "extinction des roux" circulent largement sur internet. Le réchauffement climatique serait en cause, car il augmenterait l'ensoleillement et, à terme, ferait s'éteindre les personnes rousses, plus sensibles aux rayons ultraviolets (UV). Ces derniers jours, des publications prétendant citer le magazine "National Geographic", assurent même que cette extinction pourrait survenir d'ici "2060". C'est faux : toutes ces affirmations, incorrectement sourcées, sont scientifiquement infondées, et la science ne prévoit pas d'extinction des roux, comme l'ont expliqué quatre chercheurs à l'AFP. Le "National Geographic" a fait parvenir à l'AFP son seul article sur le sujet, plus exactement une brève consacrée aux rumeurs d'extinction, qui précise bien que c'est infondé."Les roux pourraient disparaître d'ici l'an 2060 selon le National Geographic". Le message de ce tweet aimé plus de 11.500 fois et partagé à plus de 1.200 reprises depuis le 17 octobre, qui nous a été signalé sur WhatsApp, a relancé cette rumeur infondée qui circule depuis au moins une quinzaine d'années sur internet. Le compte qui a relayé le message, "Savoirs du monde", avait lui-même déjà mis en garde contre la prétendue extinction des personnes rousses en octobre 2019 et en décembre 2021.Et il n'est pas le seul à avoir diffusé ces allégations. "Les roux en voie d'extinction à cause du réchauffement climatique", titrait par exemple La Dépêche en juillet 2014. Plusieurs autres médias français (1, 2), belges, et anglophones avaient alors relayé les mêmes affirmations, qui ont également circulé sur des blogs (1, 2, 3) et sur Facebook (1, 2, 3, 4, 5) depuis au moins 2007. Capture d'écran Twitter, prise le 28/10/2022 Capture d'écran du site de La Dépêche, prise le 28/10/2022 Capture d'écran Facebook, prise le 28/10/2022 Elles sont pourtant scientifiquement infondées, comme l'ont expliqué deux généticiens, un spécialiste de la peau ainsi qu'une chercheuse spécialiste du climat auprès de l'AFP.15 ans de rumeur aux sources douteusesDès 2005, des rumeurs annonçant la prochaine disparition des roux circulaient sur internet, relayées sur des blogs et des médias en anglais. En guise de source, elles citaient notamment des prédictions de la "Oxford Hair Foundation", un "institut qui étudiait toutes sortes de problèmes liées aux cheveux en Angleterre".Le site de cet organisme n'existe plus en octobre 2022, mais des archives disponibles en ligne permettent de constater qu'il était lié à la multinationale américaine Procter & Gamble (P & G), spécialisée dans les produits d'hygiène et de beauté, dont des teintures et autres produits capillaires. Les recherches de l'AFP dans ces archives n'ont pas permis de retrouver trace de publications évoquant une extinction des roux.En 2007, la rumeur a été relancée par des articles en anglais, citant incorrectement comme source un article du magazine National Geographic, et prétendant que l'extinction des roux pourrait survenir "d'ici aussi tôt que 2060", le gène récessif menant à cette couleur de cheveux finissant par disparaître de la population. Contacté par l'AFP au sujet de ces rumeurs, le magazine a transmis le 28 octobre 2022 à l'AFP la page 14 de son numéro en anglais de septembre 2007, qui mentionnait plusieurs informations sur les personnes rousses. Néanmoins, il n'y était nullement écrit que les roux pourraient s'éteindre d'ici à l'année 2060.A côté d'une photo pleine page d'une personne aux longs cheveux roux et bouclés, un court article faisait référence à l'existence des rumeurs, sans pour autant indiquer qu'elles seraient fondées."Cette année, des médias ont rapporté que les 'vrais roux' pourraient être éteints d'ici 2100, puisque deux porteurs du 'gène poil de carotte' ont de moins en moins de chances d'être en couple avec l'augmentation du nombre de relations internationales (et puisqu'un enfant a généralement besoin d'une copie du gène provenant de chacun des parents pour avoir les cheveux roux). Mais si le nombre de personnes rousses pourrait décliner, le potentiel de roux n'est pas en train de disparaître", y est-il écrit. Capture d'écran de la page 14 de l'édition de septembre 2007 du National Geographic, fournie à l'AFP par le magazine le 28 octobre 2022Il est également mentionné que les particularités du gène menant à la couleur rousse étant récessives, cette dernière "se cache dans le génome", et était ainsi en réalité présente chez des personnes résidant dans plusieurs pays monde. Le magazine mentionnait également trois chiffres : "2% de la population mondiale mondiale est estimée être naturellement rousse", "13% de la population de l'Ecosse est rousse. Deux personnes sur cinq portent le gène" dans ce pays, et "123 millions de dollars ont été dépensés dans des teintures rousses en 2006 aux Etats-Unis".Le service de communication du National Geographic a par ailleurs indiqué à l'AFP ne pas avoir publié d'autre article sur ce sujet depuis ce "court article dans notre magazine en 2007, qui n'est pas disponible en version numérique", mais étudier "la possibilité de rédiger un nouvel article sur ce sujet", précisant qu'il "serait [leur] seul article depuis lors" sur la potentielle disparition des personnes rousses.En 2014, la rumeur est redevenue virale sur les réseaux sociaux lorsque les propos du dirigeant d'une entreprise écossaise spécialisée dans la réalisation de tests ADN ont été largement relayés, de façon plus ou moins alarmiste, dans des médias et sites, aussi bien anglophones (1, 2, 3) que francophones (1, 2, 3, 4, 5). Capture d'écran d'un article de The Independant, prise le 31/10/2022 Capture d'écran d'un article de CNews, prise le 31/10/2022 Alistair Moffat, cité dans les articles, suggérait que le réchauffement climatique pourrait mener à cette disparition de la population rousse. "Nous pensons que les cheveux roux en Ecosse, en Irlande, et dans le Nord de l'Angleterre sont une adaptation au climat. Nous ne recevons pas assez de soleil et devons capter toute la vitamine D que nous pouvons", estimait-il, selon The Independent. "S'il s'avérait qu'il y ait moins de nuages et plus de soleil, il pourrait y avoir moins de personnes porteuses du gène [roux]", résumait-il.Son entreprise de tests d'ADN, "ScotlandsDNA" n'existe plus en octobre 2022, tout comme le groupe dont elle découlait, "BritainsDNA". Elle avait a fait l'objet de critiques de scientifiques, qui ont notamment questionné les méthodes des recherches menées à partir des tests d'ADN proposés.Alistair Moffat, qui se présente sur son site comme un "écrivain ayant gagné des prix, historien et ancien directeur de l'Edimbourg Festival Fringe [un festival artistique, NDLR], et directeur des programmes à la télévision écossaise", a par ailleurs tenu sur des plateaux télévisés des propos au sujet de l'ADN des populations du Royaume-Uni qui ont été réfutés par d'autres scientifiques.En 2014, le quotidien Le Monde avait même publié un rectificatif après avoir relayé dans une note de blog l'article de "The Independent". "La thèse proposée à ses lecteurs par The Independent – la possible disparition future d'un phénotype humain en raison du changement climatique – n'existe pas au sens scientifique du terme" et "les prémisses mêmes de cette thèse sont fausses puisque le changement climatique en cours n'augmentera pas la quantité de rayonnement ultraviolet", expliquait le quotidien. Des allégations similaires, tout aussi infondées, sur le disparition prévue des personnes blondes ou aux yeux bleus, circulent aussi régulièrement. Le média de vérification anglophone Snopes y avait consacré un article en 2013.Qu'entend-on par "gène roux" ?Paul Verdu, généticien des populations humaines et chercheur CNRS au Museum national d'Histoire naturelle, explique le 25 octobre à l'AFP qu'il y a en réalité "beaucoup de gènes dans le génome humain qui contrôlent la couleur des cheveux, des yeux, de la peau. Dans certains d'entre eux, on connait des mutations, c'est-à-dire des changements ponctuels de lettres. Le gène, on peut l'imaginer comme un chapitre de livre, à l'intérieur duquel est écrite la recette de cuisine pour fabriquer telle ou telle protéine. Les mutations, les changements de lettres à l'intérieur de ce livre de recette, changent le produit fini".Le gène appelé communément "gène roux" est celui du récepteur MC1R, qui est situé sur les chromosomes 16. Tout le monde a ce gène, mais chez les personnes rousses, il contient des variations qui impliquent cette couleur de cheveux. Paul Verdu souligne qu'il y a d'ailleurs "plusieurs types de roux", dont les couleurs de cheveux sont dues à "des combinaisons de différentes mutations qui peuvent donner différents phénotypes". "La plupart du temps, ces mutations ne sont pas indépendantes, on va souvent retrouver la mutation qui donne la couleur de cheveux 'roux poil de carotte' avec la mutation qui donne les tâches de rousseur et avec les mutations qui donnent certains types de couleurs de peau très pâles, mais ce n'est pas systématique : vous pouvez avoir aussi des roux à la couleur de peau foncée", ajoute-t-il encore. Des participants au "Red Love festival", premier festival dédié aux personnes aux cheveux roux près de Rennes, le 25 août 2018 ( AFP / JEAN-FRANCOIS MONIER)Le gène du récepteur MC1R est impliqué dans la production de mélanine, le principal pigment de la peau, détaille Thierry Passeron, chercheur Insermau Centre Méditerranéen de Médecine Moléculaire et dermatologue au Centre Hospitalier Universitaire de Nice, le 26 octobre auprès de l'AFP."Nous avons tous deux grands types de mélanine : les eumélanines, de couleur brun-noir et qui protègent la peau des radiations UV, et les phéomélanines, aux pigments bruns-roux qui au contraire des eumélanines génèrent des radicaux libres qui causent des dégâts sur l'ADN. Lorsque MC1R est activé, ce récepteur va activer la synthèse des eumélanines. Certains d'entre nous ont des variations alléliques qui vont faire que ce récepteur va moins bien fonctionner, et du coup produire plus de phéomélanines. Cela entraîne une peau plus claire et des cheveux et poils roux", élabore-t-il."Ce récepteur permet aussi une meilleure réparation des dégâts induits sur l'ADN. Les personnes ayant ces variations ont donc plus de risque de faire des cancers de la peau, en raison de la quantité de phéomélanines mais aussi car ils réparent moins bien les dégâts causés par les ultraviolets (UV)", abonde le spécialiste de la peau, qui ajoute qu'"une peau plus claire laisse passer plus d'UVB et donc permet de produire plus de vitamine D". Cependant, complète Paul Verdu, "la vitamine D est présente en abondance dans certains aliments et notamment dans certaines graisses de poissons -dont la fameuse huile de foie de morue- ou les abats des mammifères. C'est donc plutôt des carences alimentaires en vitamine D qui rendent le fait d'avoir la peau plus claire intéressant pour absorber plus d'UVB pour produire plus de vitamine D. D'ailleurs, les populations autochtones du Grand Nord comme les Inuits ont la peau beaucoup plus foncée : ça n'a pas d'importance, puisqu'ils mangent de la vitamine D en abondance".La répartition des populations, pas seulement une histoire d'ensoleillementPar ailleurs, il n'est pas pertinent d'expliquer la présence de personnes rousses plus importante dans certaines régions comme le Royaume-Uni uniquement par l'ensoleillement de régions, comme l'ont expliqué plusieurs spécialistes à l'AFP."Il y a des fréquences de phénotypes roux différentes à travers le monde. Dans tous les cas, ce sont des faibles fréquences et effectivement, c'est dans les îles anglo-saxonnes où il y a de plus grandes fréquences. Ce qui nous intéresse quand on fait de la génétique, c'est de comprendre comment ça se fait qu'il y ait cette diversité-là", détaille Paul Verdu."La meilleure façon d'expliquer cela, ce sont des histoires de peuplement, de fondations et de familles. La fréquence des roux sera plus grande parce qu'au départ il y avait un peu plus de personnes rousses qui ont peuplé le pays. Par hasard, parmi les fondateurs de l'Angleterre, il y avait une famille de roux en plus que dans d'autres pays. C'est mécanique, il n'y a pas besoin de parler d'ensoleillement. Cet 'effet fondateur' explique d'ailleurs beaucoup de la diversité humaine, pas seulement celle de la couleur de la peau et de la couleur des cheveux", détaille l'anthropologue généticien.Il note aussi que des "préférences culturelles" entrent en compte dans le développement de certains phénotypes localement : dans certaines cultures, il est valorisé d'avoir la peau plus sombre ou plus claire, ce qui peut entraîner que certains types de phénotypes soient plus présents.Quatre spécialistes consultés par l'AFP ont aussi souligné qu'avec la migration de Britanniques vers l'Australie, ce pays situé dans l'hémisphère sud a accueilli une large population de personnes rousses, qui ne s'est pas pour autant "éteinte".Néanmoins, "il est vrai que dans certaines régions de l'Australie, on enregistre une large proportion de cancers de la peau", qui est étudiée par des chercheurs, développe Frédéric Austerlitz, directeur de recherches CNRS et généticien au Musée National d'Histoire Naturelle, le 25 octobre à l'AFP. Il souligne néanmoins que ces types de cancers survenant généralement à un âge relativement avancé, et ainsi que les personnes qui sont touchées ont au préalable pu avoir des enfants, à qui ils ont pu transmettre les mutations liées aux cheveux roux.Selon lui, "il n'a pas de force assez importante pour contre-sélectionner le gène roux. Clairement, les forces sélectives ne pourraient pas avoir un impact suffisamment puissant pour éliminer ce gène d'ici d'ici à 2060".Son collègue Paul Verdu est du même avis, et souligne que cette "causalité entre des surexpositions locales aux ultraviolets (UV)" est aussi une conséquence du "manque de protection et de la surexposition" face au soleil, qui peut être dangereuses pour des personnes de "toutes les couleurs de peau".L'anthropologue généticien note aussi que "les gens se protègent du soleil, quelle que soit leur couleur de peau", et qu'il n'y aurait "pas de raison" à ce que les personnes rousses cessent de le faire d'ici 2060. La plage de Balmoral à Sydney, le 12 septembre 2021 ( AFP / DAVID GRAY)Le réchauffement climatique ne signifie pas nécessairement plus d'UVPar ailleurs, si le réchauffement climatique et son origine humaine font aujourd'hui l'objet d'un large consensus scientifique, cela ne signifie pas que les rayonnements ultraviolets (UV) vont augmenter partout sur la Terre.La couche d'ozone, qui est située dans la stratosphère (la partie haute de l'atmosphère), consiste en une première "barrière filtrante" qui limite l'impact de ces rayons sur la Terre.Dans les années 1970, des scientifiques ont constaté que certains produits chimiques industriels détruisaient cet ozone dans la stratosphère : un trou dans la couche d'ozone a été créé par la pollution anthropique, particulièrement par les chlorofluorocarbures (CFC) autrefois émis par l'industrie chimique pour la fabrication des réfrigérateurs, des climatiseurs ou pour d'autres applications. . Au cours des dernières décennies, la coopération mondiale a cependant donné à la couche d'ozone une chance de se reconstituer. Le Protocole de Montréal, signé en 1987 et ratifié maintenant par 195 pays, a supprimé les émissions de CFC et réduit la quantité de CFC dans l'atmosphère, mais ceux-ci ont une longue durée de vie dans l'atmosphère et la couche d'ozone mettra encore plusieurs décennies à se reconstituer complètement, selon des estimations du Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE) et de l'Organisation météorologique mondiale (OMM).Cependant, des chercheurs prévenaient en août 2022 que l'accentuation du changement climatique va augmenter la fréquence et l'intensité des feux de forêt ou de brousse comme ceux qui ont frappé l'Australie en 2019 et 2020, et que de ce fait, la projection de la fumée dans la stratosphère, pouvant affecter la couche d'ozone, deviendrait plus probable.Le phénomène de la destruction de la couche d'ozone par des activités humaines est néanmoins distinct du rejet, dans la partie basse de l'atmosphère, des gaz à effets de serre (GES), qui ont un impact direct sur l'augmentation de la température de la Terre et le dérèglement du climat."Le réchauffement climatique, ce n'est pas plus de soleil, c'est le fait que l'atmosphère retienne le rayonnement infrarouge de la Terre, qui est fourni par le soleil. Ce n'est pas le rayonnement UV qui joue", détaille Sophie Godin-Beekmann, directrice de recherches CNRS au Laboratoire Atmosphères et Observations Spatiales (LATMOS), le 26 octobre à l'AFP. Les variations des UV sur la Terre sont mesurées et étudiées par des chercheurs, et dépendent de plusieurs paramètres, dont "la couche d'ozone, elle-même régulée par le protocole de Montréal qui a interdit des gaz qui l'endommagent, les aérosols soumis aux réglementations sur la qualité de l'air, la nébulosité et la réflectivité de surface, qui peuvent varier avec le réchauffement climatique", développe la chercheuse. Les prédictions de variations de ces UV, notamment calculées par des chercheurs pour la fin du 21ème siècle dans un article paru en 2019 dans la revue spécialisée "Photochemical and Photobiological Sciences", ne tendent pas à montrer des variations qui pourraient mener à un changement d'indice UV radical, selon Sophie Godin-Beekman. "L'échelle de variation est entre -40% et +40%, avec les variations les plus fortes dans les régions polaires où les indices UV ne sont pas très élevés donc il ne va pas du tout une augmentation d'UV qui aboutirait a l'extinction des personnes rousses, ça n'a aucun fondement", explique-t-elle.Selon les calculs réalisé par cette équipe de scientifiques, toute la Terre ne serait par ailleurs pas concernée par des augmentations d'indices UV, ces dernières seraient localisées et certaines régions verraient par ailleurs leurs indices UV baisser."Il y aurait une baisse de l'UVI au niveau des pôles, principalement liée à l'ozone et la réflectivité, et dans les hautes latitudes, notamment parce qu'il pourrait y avoir moins de glace avec le réchauffement climatique et une augmentation plutôt dans l'hémisphère nord, induite par la réglementation sur la qualité de l'air et la baisse d’aérosols associée", résume la chercheuse.L'hypothèse infondée de l'extinction d'un gène récessif L'une des autres raisons supposées à l'extinction des roux serait la progressive disparition du gène (ou des mutations menant à la couleur de cheveux, donc) du fait de la sélection naturelle. Mais cette hypothèse est elle aussi sans fondement scientifique, selon les experts interrogés par l'AFP."La question de la disparition de ce phénotype, qui est régulièrement posée par le grand public, est légitime, on l'entend aussi avec les cheveux blonds, les yeux bleus...", note Paul Verdu.Les cheveux roux, ou les yeux bleus, "c'est ce qu'on appelle des phénotypes qui sont récessifs, c'est-à-dire qu'il faut en fait que les différents gènes et les différentes mutations aient été transmises à la fois par le père et par la mère pour qu'elles s'expriment chez l'individu. Si l'un des deux parents ne transmet pas cette mutation par la loterie de la génétique, elle sera toujours présente chez l'enfant mais elle ne s'exprimera pas, donc il ne sera pas roux mais sûrement brun", détaille le généticien.Pour autant, "ça ne veut pas dire que la mutation a disparu, simplement qu'elle ne s'exprime pas car elle est dominée par les autres mutations qui elles donnent en général plutôt les cheveux brun foncé. Mais quand la personne aux cheveux bruns qui a reçu la mutation va elle-même avoir des enfants, elle va potentiellement la leur donner, et ils pourront eux-mêmes devenir roux", explique encore Paul Verdu. Des Françaises et une Ecossaise posent pour une photo lors du "Red Love Festival" dédié aux personnes aux cheveux roux près de Rennes, le 25 août 2018 ( AFP / JEAN-FRANCOIS MONIER)Thierry Passeron ajoute qu'"avec le mixage des populations, les personnes ayant uniquement des variations MC1R le rendant très peu actifs pourraient naturellement diminuer, mais on a donc des phénotypes nouveaux : par exemple, une personne à la peau assez foncée mais avec des taches de rousseur. C'est ce qui fait la variété et la beauté de l'espèce humaine".Selon lui, il serait ainsi possible d'imaginer que les personnes au phénotype "typique" roux, avec la peau très claire, des tâches de rousseur et des cheveux très roux puissent devenir moins nombreux, tandis que d'autres phénotypes se développeraient. Mais cela ne signifie pas que le gène ou que les personnes rousses risquent totalement de disparaître."Faire disparaître complètement cette mutation, c'est très compliqué pour la simple et bonne raison qu'on ne la voit pas. La mutation peut diminuer en fréquence au cours du temps, sous l'effet de la sélection, mais ça va être très compliqué de la faire disparaître complètement parce que, justement, elle ne s'exprime pas dans ce cas là et la sélection naturelle s'intéresse principalement à ce qui s'exprime", confirme Paul Verdu.Il souligne aussi que le même principe s'applique à certaines maladies qui se transmettent via des mutations récessives et dont la présence est ainsi difficile à mesurer. "Ce sont des calculs très compliqués qui sont faits par des chercheurs pour essayer d'évaluer la fréquence de ces mutations", détaille-t-il, précisant que même sur le plan technique, il serait donc hautement improbable qu'une équipe de scientifiques puisse déterminer une date précise de disparition des roux.Il existe plusieurs articles ou vidéos qui ont démonté ces rumeurs ces dernières années, comme celui du média australien ABC News ou du magazine affilié à la Smithsonian Institution de Washington aux Etats-Unis. Ou encore ici ou là. 2 novembre 2022 Remplacement du mot "altitudes" par "latitudes" dans le paragraphe précédant le 4ème intertitre31 octobre 2022 Changement du format de la photo des participants au "Red Love festival"
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