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  • 2021-06-18 (xsd:date)
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  • Les vaccins anti-Covid "toxiques"? Attention aux affirmations de cet immunologue canadien (fr)
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  • Un immunologue canadien clame que la protéine créée par les vaccins anti-Covid et servant à fabriquer des anticorps serait "toxique pour l'homme" et qu'elle se propagerait dans l'organisme via le plasma sanguin. Ces affirmations sont fausses et résultent d'interprétations erronées de deux études, selon les experts interrogés par l'AFP. Les tests conduits par les autorités sanitaires en Europe ou aux Etats-Unis ont par ailleurs conclu à l'innocuité de cette protéine.D'abord lancées le 28 mai à l'antenne d'une radio canadienne, les affirmations alarmistes du Pr Byram Bridle ont proliféré sur les réseaux sociaux et ont été reprises dans de nombreux pays par ceux qui mettent en doute l'innocuité des vaccins à ARN messager utilisés contre le Covid-19.Dans cet entretien à Global News Radio 980 CFPL, ce professeur d'immunologie virale à l'Université de Guelph au Canada assure avoir découvert que ces vaccins produiraient une protéine Spike "toxique et dangereuse" qui circulerait dans le sang et se propagerait dans de nombreux organes (foie, rate, moëlle épinière...). "La protéine de pointe (Spike) est elle-même toxique et dangereuse pour l'homme", assure-t-il dans cet entretien, repris notamment par un article du site France Soir partagé plus de 11.600 fois sur Facebook depuis le 2 juin. La publication se retrouve sous de nombreuses autres formes sur Facebook. Ces affirmations, si elles étaient avérées, seraient explosives : les vaccins à ARN messager transportent des informations permettant aux cellules de reproduire la protéine Spike caractéristique du virus du Covid-19 et de produire ainsi des anticorps, mais cette protéine est considérée comme inoffensive et est censée rester dans le tissu musculaire autour du point d'injection.Les affirmations du Pr Bridle sont toutefois fausses : pour soutenir que la protéine Spike produite par les vaccins est toxique et se propagerait dans l'organisme, ce professeur s'appuie sur deux études bien réelles mais en interprète leurs résultats de manière erronée, selon les experts interrogés par l'AFP. Contacté par email, M. Bridle n'a pas donné suite. L'"étude" japonaise Pour appuyer ses dires, M. Bridle s'appuie sur une "étude" obtenue auprès du régulateur japonais des médicaments sur "la bio-distribution" du vaccin à ARN-messager, c'est-à-dire sur sa circulation au sein de l'organisme.Il s'agit en réalité de l'un des "documents techniques" présenté par Pfizer à l'Agence japonaise des produits pharmaceutiques et médicaux (PMDA) pour obtenir l'autorisation de mise sur le marché de son vaccin Pfizer-BioNTech, a expliqué à l'AFP une porte-parole du géant pharmaceutique américain, Maki Yamaguchi. Ce vaccin a reçu le feu vert des autorités nippones le 14 février 2021. Ces documents ont par ailleurs été déjà évalués par l'Agence européenne des médicaments (EMA, dont le rapport est disponible ici en anglais) et par ses homologues britannique et américaine qui ont toutes approuvé la mise sur le marché de ce vaccin.Dans le rapport japonais (traduit ici par des sources non-identifiées), Pfizer étudie la circulation de son vaccin en injectant à des souris des nanoparticules lipidiques, qui sont de petites capsules transportant l'ARN messager jusqu'aux cellules où il va délivrer les informations génétiques permettant la création de la protéine Spike. Tous ces éléments ont été "marqués radioactivement" pour suivre leur itinéraire dans le corps des souris.Ses résultats contredisent les conclusions qu'en tire le Pr Bridle: seules les nanoparticules lipidiques -- et pas la protéine Spike -- ont circulé dans le corps des souris, principalement dans le muscle où elles ont été injectées et dans le foie. Elles ont également été retrouvées, dans de plus faibles concentrations, dans la rate ou les ovaires.En aucun cas, cette étude ne montre la circulation de la protéine Spike, confirme à l'AFP le neurologiste japonais Amane Koizumi, de l'Institut national des sciences naturelles nippon, qui a accepté de lire le document japonais pour nous. "Cette expérience ne vise pas à étudier si la protéine Spike produite par l'ARN circule dans le sang", dit-il, joint le 15 juin. "Elle montre la circulation et le timing de la circulation dans chaque organe des lipides injectés".Son de cloche identique chez deux autres scientifiques joints par l'AFP. "A aucun moment, l'expérience n'examine le dépôt ou la concentration de protéine Spike", écrit le Pr Daniel Sauter, chercheur en chef du groupe Mécanismes de l'immunité antivirale innée à l'Université allemande de Tubingue, dans un mail le 11 juin. La présence de ces nanoparticules lipidiques dans certains organes "ne signifie pas que des protéines Spike y seraient également présentes, sans même parler de protéines Spike qui circuleraient librement" dans le corps, abonde Frank Kirchhoff, directeur de l'Institut de virologie moléculaire à l'hôpital universitaire de Ulm, en Allemagne. "Pour qu'une telle chose arrive, il faudrait d'abord que le vaccin se mêle aux cellules dans ces endroits, chose que le marquage radioactif ne montre pas", a-t-il expliqué par téléphone le 11 juin.Ce que le Pr Bridle omet par ailleurs de préciser c'est que, selon l'évaluation de l'EMA mentionnée plus haut, ces lipides ne restent pas longtemps dans l'organisme et en sont rapidement évacués: la concentration la plus forte était observée deux heures après l'injection mais tombait à seulement 1% vingt-quatre heures après.Autre faiblesse de l'argumentation du professeur canadien: il ne précise pas que cette étude a été menée sur des souris. Or il existe des doutes sur le fait que ces résultats seraient identiques en cas de test sur l'homme, selon le professeur Kirchhoff. "Cela peut donner de premières indications mais ne peut pas être directement transposé aux humains. Une injection dans un muscle humain est plus simple à exécuter. Les rats sont plus petits, leurs muscles sont plus petits et les distances dans l'organisme sont plus réduites", affirme-t-il.Enfin, dernier élément que M. Bridle ne mentionne pas, la dose injectée aux souris n'était, selon l'EMA, en rien comparable à celle utilisée pour l'homme: elle lui était ainsi entre 300 à 1000 fois supérieure.Cela ne signifie pas que ces vaccins ne sont associés à aucun effet secondaire: les autorités sanitaires en Europe ou aux Etats-Unis rappellent régulièrement que chaque médicament ou vaccin peut s'accompagner d'effets indésirables plus ou moins graves. Mais pour l'heure, en dépit de certains soupçons, les liens de causalité avec les affections les plus graves n'ont pas été établis formellement.Dans les pays où elle est menée en masse, la vaccination a par ailleurs réduit considérablement les cas de Covid-19 et les formes graves de la maladie. L'étude de Harvard C'est l'autre document sur lequel s'appuie le Pr Bridle: une étude menée par des chercheurs de l'Université américaine d'Harvard sur 13 professionnels de santé vaccinés avec Moderna qui montrerait, selon l'immunologue canadien, la présence de protéines Spike dans le sang de 11 d'entre eux.Là encore, sa lecture des conclusions est sujette à caution. C'est notamment ce qu'explique David Walt, professeur à l'école de médecine de Harvard et qui a collaboré à cette étude : "M. Bridle prend nos résultats et les interprète de manière totalement erronée", dit-il dans un mail du 11 juin.Le but de cette étude était de collecter des données scientifiques sur la circulation, post-vaccination, des antigènes, ces protéines spécifiques au Sars-Cov-2 qui vont permettre la création d'anticorps. Les résultats ? Des fragments de protéines Spike ont été retrouvés dans le plasma sanguin de 11 des personnels de santé étudiés, et en intégralité chez trois d'entre eux.L'étude n'a pas réussi à en expliquer les raisons mais elle a surtout montré que leur concentration décline à mesure que celle des anticorps produits augmente. Ainsi, les protéines Spike "partielles" avaient disparu 14 jours après la vaccination. Quant aux Spike "intégrales", elles n'étaient détectables qu'après la première dose et avaient totalement disparu après la seconde. Représentation du Sars-Cov-2, le virus responsable du Covid-19. ( AFP / JOEL SAGET)Cette présence, même éphémère, constitue-t-elle un "danger", comme l'affirme le Pr Bridle ? Non, selon David Walt. "M. Bridle confond les effets toxiques d'une concentration élevée de protéine Spike chez certains patients, avec les concentrations très faibles observées chez certains de nos participants vaccinés (...) Les niveaux que nous avons mesurés chez certaines personnes après la vaccination étaient incroyablement bas et nous n'avons pas trouvé de Spike entière chez la plupart des personnes vaccinées", dit le professeur de Harvard. "Notre conclusion était que le vaccin fonctionne comme prévu". Seules des concentrations très élevées de Spike pourraient causer des dommages dans l'organisme mais ce n'est pas le cas après la vaccination, avait déjà déclaré à l'AFP le 6 mai Christian Münz, professeur d'immunologie virale à l'université de Zurich, en Suisse.L'Agence européenne des médicaments (EMA) comme la Food and Drug administration (FDA) américaine ont d'ailleurs estimé que le vaccin était sans danger. Selon les essais cliniques de phase 3 menés par Pfizer avant la mise sur le marché sur la base de 43.448 injections, les effets secondaires graves étaient rares et répartis de manière égale entre le groupe ayant reçu le vaccin et celui ayant reçu un placebo.Plusieurs affirmations sans preuvesDans son entretien radiophonique, le Pr Bridle relaye aussi des affirmations sans citer la moindre étude scientifique. Comme indiqué plus haut dans notre article, il n'a pas répondu à nos sollicitations pour préciser quelles étaient ses sources.Plusieurs de ces affirmations ont déjà été démontées par l'AFP, notamment l'idée selon laquelle les protéines Spike créées par le vaccin pourraient franchir la barrière "hémato-encéphalique" et causer des dommages neurologiques. "C'est une +fake news+ totale", avait indiqué dans le 11 mai Daniel Dunia, directeur de recherche au CNRS dans cet article. "Le vaccin à ARN messager est injecté localement dans le muscle et l'expression de la protéine de pointe sera limitée aux cellules initialement visées pour déclencher la réponse immunitaire. L'ARN messager est instable et va être dégradé rapidement", avait-il.Sans citer d'études précises, le Pr Bridle a aussi affirmé que "l'ARN messager se transmet via le lait maternel", causant "des saignements dans le tractus gastro-intestinal", et affirme en avoir trouvé des preuves dans la base de données américaines recensant les signalements d'effets secondaires. L'AFP a déjà examiné cette affirmation après le décès, signalé en mai 2021 aux Etats-Unis, d'un bébé dont la mère avait été vaccinée. Dans notre article (en allemand), les experts s'accordaient à dire que l'ARNm des vaccins ne peut toutefois pas passer dans le lait maternel. Très relayées sur les réseaux sociaux, les déclarations du Pr Bridle n'ont pas connu le même succès auprès de certains scientifiques au Canada. Contacté par l'AFP, le groupe Canada's Science Up First, qui rassemble chercheurs, professionnels et lutte contre les fake news, appelle ainsi à contrer ces déclarations. "Nous sommes au courant de la désinformation qu'il propage, a indiqué un porte-parole, ajoutant: "Nous travaillons actuellement pour la réfuter". 29 juin 2021 Edit le 29/6/2021 à 17H23 : reformule l'avant-dernier paragraphe sur la transmission de l'ARN messager dans le lait maternel (fr)
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