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L'Etablissement français du sang (EFS) privilégierait les dons du sang de personnes non vaccinées, car celui des vaccinés présenterait des "problèmes de coagulation", affirment des publications virales sur les réseaux sociaux en ce début février. C'est pourtant infondé : l'EFS a démenti l'existence d'une consigne de ce type, rappelant que tous les citoyens sont invités à donner leur sang. Il n'y a par ailleurs pas de différence de coagulation entre vaccinés et non-vaccinés, ont déjà souligné des spécialistes auprès de l'AFP."Discussion avec un pharmacien aujourd'hui : 'Ils ont besoin de sang d'urgence et si possible de non-vax pour des questions de coagulation'", prétend un post Twitter publié le 11 février, depuis partagé plus de 2.600 fois sur la plateforme et dont le texte a été repris et partagé à d'autres centaines de reprises par d'autres internautes sur Twitter et Facebook (1, 2). Capture d'écran Twitter, prise le 15/02/2022 Publications Facebook reprenant le texte du Tweet, capture d'écran prise le 15/02/2022 Pourtant, aucune consigne priorisant le don de sang des personnes non vaccinées contre le Covid-19 sur celui des vaccinés n'a été donnée, a confirmé le 15 février l'Etablissement français du sang (EFS) auprès de l'AFP. Il n'y a par ailleurs pas de différence de coagulation entre vaccinés et non-vaccinés, ont déjà précisé plusieurs spécialistes. Aucune nouvelle consigne de l'EFS sur les dons des personnes vaccinées contre le Covid-19L'EFS, chargé de la centralisation de la collecte à l'échelle française, a précisé à l'AFP que toutes les personnes qui le souhaitent, vaccinées ou non contre le Covid-19, peuvent, et sont d'ailleurs invitées à donner leur sang, sous réserve d'être éligibles aux autres conditions du don (qui incluent notamment une limite d'âge, de poids ou encore des contre-indications liées à des voyages dans des zones à risque).Cela est par ailleurs aussi précisé sur une page d'informations du site de l'EFS intitulée "don de sang et Covid-19", qui indique également que "ni le pass sanitaire, ni le pass vaccinal ne sont nécessaires pour donner son sang", et qu'il "n'est pas nécessaire de présenter un test pour donner son sang". Capture d'écran du site de l'EFS, prise le 15/02/2022L'établissement avait déjà démenti en janvier auprès de l'AFP toute différence de consigne entre les dons du sang effectués par des personnes vaccinées et non vaccinées. "Nous prélevons aussi bien les personnes vaccinées, sans aucun délai par rapport à la date de vaccination, que les personnes non-vaccinées", avait assuré Pascale Richard, directrice médicale de l'EFS, le 17 janvier 2022. "Il n'y a pas de contre-indication au don du sang en rapport avec la vaccination", avait-elle conclu.Ces recommandations s'appuient sur sur un avis du Haut conseil de la santé publique (HCSP) du 2 février 2021, dans laquelle l'instance avait recommandé "qu'il n'y ait pas d'exclusion, même provisoire, de donneurs ayant reçu un vaccin" autorisés contre le Covid-19 en France.Il existe en revanche des contraintes pour les donneurs ayant été infectés par le Covid-19, ou étant cas contact. Le site de l'EFS, mis à jour le 15 février, indique ainsi que les personnes présentant un schéma vaccinal complet doivent attendre "7 jours après le début des symptômes" ou "après la date du test positif pour les personnes asymptomatiques" pour donner leur sang. Ce délai peut être réduit à "5 jours à l'issue d'un test antigénique ou PCR négatif et en l'absence de signes d'infection dans les dernières 48 heures".Pour effectuer un don, les personnes non vaccinées ou ayant un schéma vaccinal incomplet doivent elles "attendre 10 jours après le début des symptômes" ou "après la date du test positif pour les personnes asymptomatiques". Ce délai peut se réduire à 7 jours après un test négatif et en l'absence de symptômes au cours des dernières 48h, indique aussi le site de l'EFS. Capture d'écran du site de l'EFS, prise le 15/02/2022 Capture d'écran du site de l'EFS, prise le 15/02/2022 Par ailleurs, comme l'indique le site de l'EFS, les seuls cas dans lesquels un don du sang réalisé après une injection de vaccin pourrait être contre-indiquée, impliquent des vaccins fonctionnant avec la technique du virus atténué. Or, aucun des quatre vaccins contre le Covid-19 autorisés en France à ce jour n'utilisent cette technique, qui s'appuie sur l'utilisation d'agents pathogènes vivants, mais dont la virulence a été atténuée. C'est le cas des vaccins contre la tuberculose (BCG), la varicelle ou encore le trio rougeole-oreillons-rubéole (ROR), indique cette page de l'Inserm.Aucune différence de coagulation entre vaccinés et non-vaccinésLa coagulation du sang est un processus complexe, mobilisant plusieurs protéines, qui s'activent en cascade pour aboutir à la création de caillots. Ce phénomène se met par exemple naturellement en place en cas de petites blessures pour permettre au sang présent hors du corps d'arrêter de couler, comme l'expliquait Manuel Cliquennois, chef du service d'hématologie du CHU Saint-Pierre, à Bruxelles dans cet article de l'AFP en septembre 2021.Cependant, plusieurs spécialistes déjà interrogés par l'AFP ont expliqué qu'il n'existe aucune différence entre les propriétés sanguines, dont justement la coagulation, des personnes vaccinées et non vaccinées. "Nous n'avons aucun signal, ni aucune raison physio-pathologique qui nous feraient dire qu'il y aurait un problème" lié à la coagulation chez les personnes vaccinées, expliquait fin janvier Pascale Richard de l'EFS. La directrice médicale avait aussi précisé que la plateforme d'hémovigilance, chargée de repérer les anomalies liées aux transfusions sanguines, n'a fait remonter "aucun signal sur un souci en lien avec la vaccination".Nicolas Gendron, hématologue à l'hôpital Georges Pompidou à Paris, avait aussi confirmé que les doses de vaccin anti-Covid n'ont pas d'effet sur la viscosité du sang. "Les tests étudiant la viscosité du sang ont même démontré que seuls les patients Covid avaient un sang beaucoup plus visqueux que les autres. Ce n'est pas le cas chez les patients vaccinés", détaillait-il, citant le travail scientifique d'une équipe de recherche italienne qui a étudié les propriétés sanguines de personnes ayant reçu le vaccin de Pfizer-BioNTech. Dans un article de recherche publié en août 2021 dans la revue scientifique "Thrombosis Update", ces chercheurs indiquaient n'avoir mesuré "aucun changement de paramètres ni d'activation de coagulation chez des sujets sains vaccinés". Un homme donne son sang lors d'une campagne de dons organisée par l'EFS le 21 décembre 2017 à Tours. ( AFP / GUILLAUME SOUVANT)Des cas de caillots de sang (ou thromboses, qui sont les symptômes d'une coagulation excessive du sang) ont par ailleurs été recensés chez certains patients vaccinés avec AstraZeneca, mais selon Nicolas Gendron, l'incidence de ces thromboses demeure très faible.Au Royaume-Uni, pays qui a massivement vacciné avec le produit d'AstraZeneca, 395 cas de thromboses ont été recensés, sur 45,2 millions de doses administrées, rappelait-il fin janvier. Ces risques très limités "doivent être mis en balance avec les risques de la Covid-19, qui elle-même entraîne des effets indésirables, en particulier la thrombose veineuse et le décès", écrivait ainsi l'hématologue dans le magazine Biologistes Infos en novembre 2021.Par ailleurs, il est très peu probable que des poches de sang, de personnes vaccinées ou non, puissent coaguler dans le cadre de dons du sang, soulignent les spécialistes. "Il faut savoir que toutes les poches de sang sont prélevées sur anticoagulants, par définition", indique Pascale Richard. En effet, hors du corps humain, le sang coagule naturellement.C'est pourquoi "un anticoagulant est ajouté dans tous les dons de sang, de manière systématique. Sinon, on aurait de gros caillots dans les poches, Covid ou pas Covid. Vaccin ou pas vaccin." Nicolas Gendron précisait par ailleurs en janvier que les poches de sang "se composent surtout de globules rouges, avec seulement un tout petit peu de plasma, qui est le liquide contenant les protéines de la coagulation".Une situation d'"urgence vitale" par manque de stocks de sang, selon l'EFSLe besoin "urgent" de dons décrit dans les publications partagées sur les réseaux sociaux est par ailleurs, selon l'EFS, une réalité. L'établissement fait en effet état depuis plusieurs mois d'une baisse de ses réserves de sang, liée en grande partie à la crise sanitaire, qui a déstabilisé la collecte.C'est dans ce contexte que l'EFS a publié le 8 février un "bulletin d'urgence vitale", appelant "tous les citoyens", vaccinés comme non-vaccinés, à "donner leur sang dès que possible". Ce dernier indique notamment que "le stock de produits sanguins est en dessous du seuil de sécurité et cela depuis plusieurs jours. 70.000 poches de globules rouges sont aujourd'hui en réserve alors qu’il en faudrait 100.000".L'EFS rappelle aussi dans son bulletin qu'en France, "10.000 dons sont nécessaires chaque jour pour soigner les patients dont une grande majorité trouve dans les transfusions sanguines la seule alternative pour être soignés". La situation est critique. https://t.co/pqa4UQ8b7zpic.twitter.com/FeZTB4L8D5 — Établissement français du sang (@EFS_dondesang) February 10, 2022 Des affirmations trompeuses sur les dons et la coagulation du sang chez les personnes vaccinées avaient déjà été vérifiées par l'AFP en septembre 2021 et en janvier 2022.
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