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Bien qu'aucun vaccin à ARN messager ne soit actuellement autorisé pour le bétail en Australie, des publications prétendent que de nombreuses vaches sont mortes en Nouvelle-Galles du Sud, État situé au sud-est du pays, après avoir reçu des "injections mortelles de vaccins à ARNm". Ces assertions sont apparues sur les réseaux sociaux après la signature d'un accord pour accélérer le développement de vaccins à ARNm contre deux maladies virales qui menacent de toucher le pays : la fièvre aphteuse et la dermatose nodulaire contagieuse. Pour autant, au 26 octobre, aucun vaccin de ce type n'était disponible ou obligatoire pour les bovins en Australie.Des vaches ont-elles été tuées par une campagne de vaccination imposée à des éleveurs australiens ? C'est ce que prétendent des publications relayées plusieurs centaines de fois sur les réseaux sociaux, en finnois (1), en anglais (2) et en français, depuis la fin du mois d'octobre.Avançant çà et là différents ordres de grandeur, ces assertions s'accordent à dire qu'une quantité considérable de bovins a subitement trouvé la mort après avoir reçu une injection de vaccin à ARNm, qui repose sur la technologie de l'ARN messager.Ce type de vaccin, massivement déployé lors de la pandémie de Covid-19, n'utilise pas un virus vivant pour déclencher une réponse immunitaire comme l'explique le gouvernement canadien sur son site. Mais il enseigne plutôt aux cellules comment fabriquer une protéine qui, elle, déclenchera une réponse immunitaire."Australie. ALERTE. Les animaux ciblés par le WEF [Forum économique mondial, NDLR] : Près de 2 vaches sur 10 ayant reçu une injection de vaccin à ARNm MEURENT presque instantanément !", peut-on ainsi lire dans un post Twitter (3) publié le 28 novembre, s'appuyant sur un billet de blog de Pro Fide Catholica, site créé par un auteur "évoluant dans la mouvance catholique intégriste et antisémite" d'après Conspiracy Watch."INJECTIONS MORTELLES : 18 % des bovins MEURENT immédiatement après la 'vaccination' par l'ARNm", est-il aussi écrit dans une publication Twitter (4) datée du 21 octobre."Le bétail serait maintenant en train d'être piqué, dans une récente campagne de 'vaccination' de masse d'un troupeau australien. 35 des 200 animaux sont mort immédiatement", avancent encore, à tort, des publications Facebook (5, 6). Capture d'écran prise sur Twitter le 1er décembre 2022"On nous dit que les producteurs laitiers et d'autres sont maintenant obligés d'injecter leurs animaux contre la grippe Fauci afin de rester en activité, et que les animaux n'y réagissent pas bien", ajoutent-elles, faisant ici probablement référence à Anthony Fauci, membre le plus connu du "groupe de travail sur le Covid-19" instauré par Donald Trump et "M.Covid" du président américain Joe Biden. "La Nouvelle-Galles du Sud (NSW) a été la première à avoir des troupeaux de bovins injectés d’ARNm. La raison du gouvernement NSW pour la campagne de vaccination des animaux est de les protéger non seulement du coronavirus de Wuhan (COVID-19) mais aussi de la fièvre aphteuse (FMD) et de la dermatose nodulaire", précisent les billets de blogs sur lesquels les publications s'appuient, Pro Fide Catholica mais aussi Cogiito (7) et plusieurs autres sites anglophones (8, 9, 10, 11).Ces messages évoquent également la théorie d'une altération de l'ADN par les vaccins, devenue un classique de la désinformation sur le sujet, bien qu'elle soit toujours infondée selon la communauté scientifique comme l'avaient expliqué plusieurs experts à l'AFP lors d'un précédent article de vérification. Ils sont tirés d'un post Instagram en anglais, publié par le militant anti-vaccins australien David Oneeglio, qui diffuse régulièrement des propos hostiles à la vaccination aux près de 70.000 abonnés de sa chaîne Telegram. S'il est vrai que l'Australie travaille au développement de différents vaccins ARNm pour protéger le bétail de maladies, et que des vaccins Covid destinés à divers animaux sont en cours d'élaboration, aucun vaccin utilisant la technologie de l'ARNm n'est actuellement utilisé sur les bovins en Australie. C'est ce qu'on déclaré plusieurs sources interrogées par l'AFP : porte-paroles gouvernementaux, association et organisme agricoles, universitaire.Aucun vaccin Covid ou ARNm utilisé pour les bovins"La Nouvelle-Galles du Sud (NSW) a été la première à avoir des troupeaux de bovins injectés d’ARNm", prétendent les messages relayés sur les réseaux sociaux.L'AFP a contacté le département en charge de l'agriculture de cet État, situé au Sud-Est de l'Australie, afin de savoir si des vaches ont effectivement reçu des vaccins ARNm (notamment contre le Covid-19). Un porte-parole de ce département a déclaré à l'AFP par email, le 14 octobre, que ces affirmations sont "fausses", renvoyant vers le site du ministère australien de l'Agriculture, de la Pêche et des Forêts, sur lequel une page est dédiée aux animaux domestiques et au Covid-19. Il n'est mentionné, à aucun moment, que les animaux de compagnie ou le bétail devraient recevoir une injection de vaccin ARNm contre le Covid-19.Tester les animaux n'est pas non plus recommandé par le ministère, qui note : "La propagation actuelle du virus est due à la transmission entre personnes, et non au contact avec des animaux domestiques. Les tests sur les animaux ne sont actuellement pas une priorité selon les dernières informations scientifiques."Ces informations ont été confirmées par un porte-parole de NSW Farmers, une association qui représente les intérêts des agriculteurs de la Nouvelle-Galle du Sud. Dans un email datant du 14 octobre, celle-ci a déclaré : "Nous ne sommes pas au courant de l'existence de vaccins Covid pour les vaches."De la même manière Dairy Australia, un organisme qui soutient l'industrie laitière australienne, a confirmé à l'AFP dans un email du 20 octobre 2022 : "Aucune vache n'a été vacciné contre le Covid-19 en Australie."L'allégation portée sur les réseaux sociaux est apparue après que la Nouvelle-Galles du Sud a annoncé, le 28 septembre, qu'elle avait conclu un accord avec une société de biotechnologie américaine pour accélérer le développement de vaccins à ARNm contre deux maladies virales touchant le bétail : la fièvre aphteuse et la dermatose nodulaire contagieuse (DNC)."La fièvre aphteuse est une maladie animale virale non transmissible à l’homme. Très contagieuse, elle affecte les animaux de la famille des Artiodactyles domestiques (bovins, ovins, caprins, porcins, …) et sauvages (cervidés, antilopes, lamas…)", explique l'Anses."La DNC est une maladie virale des bovins causée par un virus de la famille des Poxviridae, du genre Capripoxvirus. Elle est caractérisée par l’apparition de nombreux nodules sur la peau et les muqueuses internes", détaille aussi l'agence.En raison des lois australiennes très strictes en matière de biosécurité, destinées à protéger l'importante industrie agricole du pays, les autorités sont en état d'alerte après l'apparition de foyers des deux maladies en Indonésie. Un éleveur de bovins dans sa ferme du centre du Queensland, en Australie, le 2 mai 2019. ( AFP / PETER PARKS)Pour autant, ces vaccins ne sont pas attendus avant août 2023 et aucun vaccins ARNm n'a été approuvé pour une utilisation chez le bétail en Australie, au 26 octobre 2022."Il est impossible que le bétail ait été, ici, vacciné par l'ARNm, et encore moins qu'il en soit mort", a ainsi déclaré à l'AFP le 4 octobre Pall Thordarson, directeur de l'Institut de l'ARN de l'Université de Nouvelle-Galles du Sud.Un porte-parole du vice-premier ministre de Nouvelle-Galles du Sud a par ailleurs indiqué à l'AFP le 11 octobre : "Le gouvernement de Nouvelle-Galles du Sud n'a pas mandaté l'utilisation d'un vaccin pour le bétail - notre défi est d'en développer un."Pas d'impact sur le lait, la viande, le fromageLes publications diffusées sur les réseaux sociaux interrogent : "Est-il sécuritaire de consommer du lait et du fromage contenant de l'ARNm provenant d'une vache laitière 'entièrement vaccinée' ?", ou encore, "L'ADN du troupeau laitier est altéré [...] Le poulet et les autres viandes seront-ils les prochains ?"Ce n'est pas la première fois que les milieux antivax affirment que l'ARN messager des vaccins pourrait dangereusement intégrer et modifier l'ADN.La communauté scientifique a pourtant indiqué à de très nombreuses reprises que l'intégration de l'ARN messager à notre génome n'était pas possible et ce, pour plusieurs raisons, ne serait-ce que parce que l'ARN n'entre pas dans le noyau de la cellule (où se trouve notre ADN) mais reste dans le cytoplasme.Moult instituts de recherche, universités ou agences sanitaires l'ont expliqué, parmi lesquels l'Inserm, les CDC américains, l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM).Les vaccins à ARNm mis au point pour les animaux devraient fonctionner de la même manière que chez l'homme, a pointé à l'AFP M.Thordarson : "Notre ADN est très similaire à celui des autres mammifères (bovins, porcs, etc.) et à celui de tous les animaux (poissons et poulets inclus)." Présentation de la technologie des vaccins à ARN messager ( AFP)Les vaccins à ARNm n'auront "aucun impact sur les produits animaux tels que la viande ou le lait", a par ailleurs déclaré à l'AFP le 5 octobre un porte-parole du département en charge de l'agriculture dans l'État de Nouvelle-Galles du Sud.Retrouvez l'ensemble des articles de vérification de l'AFP consacrés à la pandémie de Covid-19 ici.
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