PropertyValue
?:author
?:datePublished
  • 2022-07-01 (xsd:date)
?:headline
  • 70 milliards d'euros reversés à l'Etat au titre des taxes sur les carburants ? Un chiffre très surestimé (fr)
?:inLanguage
?:itemReviewed
?:mentions
?:reviewBody
  • L'Etat profite-t-il de la hausse drastique des prix à la pompe ? Depuis plusieurs semaines, des internautes accusent les pouvoirs publics de remplir les caisses grâce aux taxes en vigueur sur les carburants. L'Etat toucherait ainsi près de 70 milliards d'euros par an via ces impôts indirects, qui représenteraient par ailleurs 60% du prix à la pompe, selon plusieurs publications très virales sur Facebook. En réalité, cette estimation repose sur des chiffres erronés sur la consommation de carburant en France comme sur le montant réel des taxes. Les recettes tirées de ces taxes devraient ainsi être plutôt de l'ordre de 40 milliards d'euros pour 2022, selon les estimations du ministère de l'Economie obtenues par l'AFP. A l'heure actuelle, l'Etat touche même moins d'argent qu'en début d'année du fait de la remise de 15 centimes mise en place par le gouvernement pour tenter d'atténuer l'impact de la flambée des cours."Maintenant, vous savez qui paye le 'quoi qu'il en coûte'". Depuis plusieurs mois, le gouvernement français se retrouve régulièrement accusé de profiter de l'explosion des prix à la pompe grâce aux taxes sur les carburants. Ces derniers jours, plusieurs publications sur Facebook, partagées des milliers de fois, se sont ainsi essayées à un calcul pour établir l'ampleur du "racket" qui frapperait les automobilistes.Selon ces internautes, l'Etat toucherait ainsi 70 milliards d'euros par an grâce à la vente de carburant. Les consommateurs verraient en effet passer 60% de leur plein d'essence en taxes qui atterriraient directement dans les caisses de l'Etat - "soit 1,29€ pour 1 litre à 2,15€". Multiplié par les 160 millions de litres qui seraient vendus chaque jour en France, cela représenterait près de 70 milliards d'euros, affirme un visuel repris par plusieurs publications. Capture d'écran de la publication partagée sur Facebook (capture d'écran du 30 juin 2022)Or ces publications s'appuient sur des chiffres erronés sur les volumes de vente de carburant en France et sur le niveau actuel des taxes, ce qui conduit à gonfler les recettes fiscales que l'Etat récupère sur le carburant.Les automobilistes français achètent ainsi moins de 160 millions de litres de carburant par jour. En 2021, l’Union française des industries pétrolières (Ufip) estimait plutôt leur consommation quotidienne à environ48,2 milliards de litres par an, soit 131,5 millions par jour.D'autre part, s'il est vrai qu'en moyenne ces dernières années la part des taxes sur le prix du carburant était plus ou moins équivalente à 60%, ce niveau est retombé ces derniers mois sous la barre des 50% Au final, l'Etat devrait donc récupérer au total environ 40 milliards d'euros en 2022 grâce aux ventes de carburant, selon nos calculs réalisés à partir de chiffres publics et des estimations données par le ministère de l'Economie à l'AFP.Moins de 50% du prix des carburants lié aux taxes C'est la flambée des cours du brut qui a mécaniquement fait baisser la part de la fiscalité dans le prix des carburants. Une part importante de ces taxes provient en effet d'une taxe au montant fixe, la TICPE (taxe inférieure de consommation sur les produits énergétiques), qui a été gelée depuis 2019 et le mouvement des "gilets jaunes" et s'établit à 0,61 euros pour le gazole et 0,69 euros pour l'essence. Elle représente environ deux-tiers des taxes totales sur le prix final, auxquelles s'ajoutent la TVA à 20% et une TVA spécifique à la TICPE.Ce montant étant fixe, il est plus faible en proportion quand les prix augmentent à la pompe comme c'est le cas depuis plusieurs semaines. Ainsi, depuis mars 2022, l'Etat a récupéré moins de 50% de la somme dépensée par les automobilistes pour faire le plein (voir ci-dessous). A titre de comparaison, ce taux était de 69% en mai 2020 quand le prix du carburant était plus bas. Par exemple, au 24 juin, le litre de gazole, carburant qui représente trois quarts des achats à la pompe, a coûté 2,13 euros au consommateur. Sur cette somme, 61 centimes de TICPE et 35 centimes de TVA, soit 96 centimes --et non 1,29 euro comme l'affirment les publications-- sont arrivés effectivement dans les caisses de l'Etat, selon l'Ufip, qui décompose les prix des carburants semaine après semaine. Une somme qui représente moins de 45% du coût total.Même chose pour le sans-plomb 95 : moins de 50% du prix (1,04 euro sur 2,09) est lié aux impôts indirects.Des recettes difficilement calculables En refaisant le calcul avec les bons chiffres, les recettes de l'Etat ne s'élèvent pas à près de 70 milliards d'euros mais se situeraient aux alentours de 46 milliards d'euros.Sauf que ce montant pourrait lui-même être surévalué car il ne prend en compte ni les différentes exonérations de TVA, notamment pour les professionnels, ni les différentes aides mises en place ces derniers mois par le gouvernement.Le budget lié à la TICPE est pour sa part connu : quatrième impôt le plus important pour les pouvoirs publics (après la TVA, l'impôt sur le revenu et celui sur les sociétés), il a généré 31,6 milliards d'euros de recettes en 2021, selon le rapport du Sénat sur le projet de loi de finances 2022. Sur cette enveloppe partagée avec les collectivités territoriales, 17,5 milliards d'euros sont arrivés dans les caisses de l'Etat. Selon les projections gouvernementales, il devrait rapporter cette année 33 milliards d'euros au total.Concernant la TVA, le ministère de l'Economie a indiqué à l'AFP le 1er juillet que l'Etat devrait percevoir 11 milliards d'euros cette année en 2022, soit environ 3 milliards d'euros de plus que la moyenne observée ces dernières années. Il n'est pas établi que l'Etat bénéficie de la crise : le gouvernement a en effet mis en place depuis avril 2022 une remise de 15 centimes d'euros par litre à la pompe, une mesure qui devrait être prolongée et devrait représenter un coût pour les finances publiques d'au moins 3,2 milliards d'euros cette année.Cela signifie que pour le mois de juin, les recettes de l'Etat sont passées à environ 80 centimes par litre de gazole du fait de cette remise, soit plusieurs centimes de moins qu'avant la flambée des prix à la pompe début 2022, alimentée notamment par la guerre en Ukraine. Les taxes sur le carburant, un sujet au coeur du débat politiqueRevenu en force avec l'invasion russe en Ukraine, le sujet des prix des carburants a été au centre du débat public ces derniers mois. Lors de la présidentielle, tous les partis y sont allés de leurs propositions pour tenter de compenser à la baisse de pouvoir d'achat pour les consommateurs.Le 29 juin, le député communiste Fabien Roussel a déclaré vouloir déposer une proposition de loi pour "faire baisser immédiatement de 35 centimes les taxes sur l'essence". Comme annoncé lors de la campagne présidentielle, le RN veut pour sa part faire baisser la TVA sur les carburants à 5,5%, en plus d'annuler les augmentations de TICPE du premier quinquennat d'Emmanuel Macron.De son côté, la France insoumise et son leader Jean-Luc Mélenchon prônent depuis plusieurs semaines un blocage des prix sur les carburants. Récemment, le parti Les Républicains a déclaré vouloir plafonner les prix des carburants à 1,50 euro."C'est promettre la lune !", a répondu le ministre de l'Economie Bruno Le Maire à cette dernière proposition dans un entretien aux Echos le 28 juin. "Avec un prix du litre aujourd'hui à 2,20 euros sans remise de 18 centimes, cela représenterait une dépense de 50 milliards d'euros pour l'Etat, soit plus que le budget du ministère de la Transition écologique". Le gouvernement entend de son côté prolonger la remise de 15 centimes au moins jusqu'au mois d'août, voire jusqu'à fin décembre. (fr)
?:reviewRating
rdf:type
?:url