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Une publication sur Facebook prétend depuis le 22 avril que Mahamat Saleh Annadif, Haut-Représentant de l'ONU pour l'Afrique de l'Ouest et le Sahel, aurait pris position contre le Conseil militaire de transition (CMT) au Tchad. Selon cette publication, le diplomate aurait déclaré sur les ondes de la Radio France Internationale (RFI) que cette transition militaire ne respecte pas la constitution tchadienne, deux jours après la mort du président tchadien Idriss Deby et de la reprise du pouvoir par son fils Mahamat Idriss Déby, à la tête du CMT. C'est faux : RFI indique que Mahamat Saleh Annadif ne s'est pas exprimé sur ses ondes suite à la mort de l'ancien président et le diplomate dément avoir tenu ces propos sur cette radio ou ailleurs. De plus, le représentant des Nations unies a un devoir de réserve dû à ses fonctions.Selon la publication trompeuse, voici les propos que Mahamat Saleh Annadif aurait tenus sur RFI: "La mise en place d'un conseil militaire de Transition est anticonstitutionnel, une violence de la constitution. C'est le Président de l'Assemblée nationale qui doit assurer l'intérim". Toujours selon ce texte, accompagné de sa photo, "le fidèle allié de Deby et ancien boss de la Mission des Nations Unies pour le Maintien de la Paix au Mali (MUNUSMA)" serait "la première personne fidèle à Déby à quitter le navire du mensonge" pour soutenir le "peuple martyrisé par ce système mafieux". Capture d'écran Facebook, réalisée le 22 avril 2021La publication a été partagée une centaine de fois sur Facebook (1,2,3,4,5) et Twitter depuis le 22 avril. Deux jours avant, Idriss Déby disparaissait à l’âge de 68 ans des suites de blessures subies au front, contre des rebelles dans le nord du Tchad, selon la gouvernance. Il a été à la tête du Tchad pendant 30 ans.Transition militaire controverséeLe pays est désormais dirigé par son fils, Mahamat Idriss Déby, 37 ans et général de corps d’armée mais aussi commandant de la Garde républicaine. Chef du Conseil militaire de transition, il dispose des pleins pouvoirs. Le CMT composé de 15 généraux connus pour être dans le cercle des plus fidèles du défunt chef de l’État promet de nouvelles institutions après des élections "libres et démocratiques" dans un an et demi.Plusieurs voix se sont élevées pour refuser ce Conseil militaire de transition qui a établi une charte abrogeant la précédente Constitution. Cette charte sera exécutée comme "loi fondamentale de la République", selon les termes du document, comme écrit dans la dépêche AFP.Pour de nombreux opposants, dont les plus farouches étaient régulièrement victimes d'intimidations et de violences, cette prise de pouvoir n'est rien d'autre qu'un "coup d’État institutionnel".Pourtant parmi ces voix ne figure pas celle de Mahamat Saleh Annadif comme le prétendent les publications. Mahamat Saleh Annadif, Bamako, mali. (AFP / Michele Cattani)Mahamat Saleh Annadif n'a pas tenu ses proposMonsieur Mahamat Saleh Annadif a déclaré à l’AFP qu’il n’a jamais tenu ces propos. Le 21 avril, il a bien été reçu par le Conseil militaire de transition à N’Djaména comme l’indique le site Tchad Infos mais "pour trouver des solutions", lit-on dans l’article.Joint par l’AFP le 23 avril, le réprésentant de l’ONU précise : "c’était d’abord pour lui (à Mahamat Idriss Déby, ndlr) présenter mes condoléances et puis nous avons eu un échange sur la situation politique et sécuritaire du pays". "Je suis conscient que le Tchad fait face à de nombreux défis à l’heure actuelle. Malheureusement il y a des compatriotes en quête de positionnement qui cherchent à manipuler une certaine opinion en utilisant mon nom", reconnaît-il.De plus, la rédaction en chef centrale de RFI confirme à l’AFP ne pas avoir reçu sur ses ondes le représentant spécial de l’ONU au Sahel et en Afrique de l’Ouest depuis la mort d’Idriss Déby. Transition civilo-militaire soutenue par le G5 SahelLe 23 avril, lors des obsèques de l’ex-président, plusieurs chefs d’Etats dont Emmanuel Macron et les quatre autres chefs d'Etat du G5 Sahel (qui comprend le Mali, le Niger, le Burkina Faso et la Mauritanie et dont Idriss Déby assurait la présidence tournante) ont témoigné au jeune général Déby leur "unité de vue" et leur "soutien commun au processus de transition civilo-militaire pour la stabilité de la région". Le président français Emmanuel Macron et le Mahamat Idriss Déby chef du Conseil militaire de transition au Tchad, lors des funérailles de l'ancien président Idriss Déby à N'Djaména le 23 avril 2021. (AFP / Christophe Petit Tesson)Emmanuel Macron, seul président occidental présent aux funérailles, a appelé le CMT à promouvoir la "stabilité, l'inclusion, le dialogue, la transition démocratique". La veille, il avait rencontré à N’Djaména le nouvel homme fort du Tchad. Un signe pour l'opposition et les experts: la France, qui a sauvé militairement au moins à deux reprises le régime de feu Idriss Déby menacé par des rebelles, en 2008 et 2019, et dont la base de l’opération Barkhane est basée dans le pays, semble maintenir son soutien à son successeur.
(fr)
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