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Des publications, partagées plus d'un millier de fois sur Facebook et Twitter en France en 24h, affirment que "toute obligation de vaccination est désormais illégale", citant à l'appui une "résolution" adoptée par l'Assemblée du Conseil de l'Europe. Problème, si cette résolution existe bel et bien, elle n'a pas de valeur coercitive, et les Etats ne sont pas contraints de la transposer dans leur législation."Toute obligation de vaccination est désormais illégale par défaut Le Conseil de l'Europe (...) a décidé le 27.01.2021 dans sa résolution 2361/2021, entre autres, que personne ne peut être vacciné contre sa volonté, sous la pression", peut-on lire dans ces publications, qui refont surface dans un contexte de polémique sur la vaccination des soignants contre le Covid-19 en France, et l'opportunité ou non de la rendre obligatoire.Elle ne l'est pas à ce jour pour les soignants, mais cette éventualité n'a pas été écartée par le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal. Elle n'est à ce jour pas non plus obligatoire en France pour des particuliers, contrairement à 11 autres vaccins. Le Conseil de l'EuropeLe Conseil de l'Europe, qui siège à Strasbourg, est une institution fondée par le traité de Londres en 1949. Indépendante de l'Union européenne, elle réunit aujourd'hui 47 états membres, dont ceux de l'UE, mais aussi la Russie, la Turquie ou encore l'Islande par exemple, avec entre autres pour ambition de défendre l'Etat de droit, les droits de l'Homme et d'oeuvrer pour la stabilité démocratique en Europe. Le Conseil est notamment composé de deux organes : un comité des ministres des Affaires étrangères (ou de leurs représentants), et une Assemblée parlementaire composée de 648 membres représentant les pays (leur nombre est pondéré en fonction de la population). La délégation française par exemple est composée de 36 députés et sénateurs (titulaires et suppléants confondus). C'est cette dernière qui a adopté fin janvier la résolution qui nous intéresse. Une résolution non contraignanteIntitulée "vaccins contre la covid-19: considérations éthiques, juridiques et pratiques", et adoptée le 27 janvier 2021 par une forte majorité des présents (115 pour, 2 contre et 13 abstentions), la résolution préconise effectivement au paragraphe 7.3 de "s'assurer que les citoyens et citoyennes sont informés que la vaccination n'est PAS obligatoire et que personne ne subit de pressions politiques, sociales ou autres pour se faire vacciner, s'il ou elle ne souhaite pas le faire personnellement". Toutefois, les auteurs de ces publications sur les réseaux sociaux manquent de préciser que la résolution préconise cela pour "assurer un niveau élevé d’acceptation des vaccins", comme elle le dit noir sur blanc à la ligne précédente. Capture d'écran de la résolution adoptée par l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, prise le 09/03/2021Plus important encore, ils font fausse route lorsqu'ils en concluent que "toute obligation de vaccination est désormais illégale". "Ces résolutions n'ont aucun effet contraignant. C'est une simple prise de position. C'est un acte de nature politique", explique à l'AFP Loïc Azoulai, professeur de droit à Sciences Po. Cette résolution "ne créé pas de règle juridique proscrivant l'obligation de se faire vacciner". Les membres de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe "prennent une position politique, qui n'a aucune valeur juridique", abonde Tania Racho, docteure en droit européen (université Paris-II). C'est d'ailleurs également ce qu'explique l'Assemblée elle-même sur son site. Elle précise qu'elle n'a "pas le pouvoir d'adopter des lois contraignantes". Capture d'écran du site de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, prise le 09/03/2021"Cette résolution n'est pas anti-vaccin mais cherche au contraire les moyens de faciliter l'administration du vaccin dans les Etats de droit que sont les Etats européens, en dehors donc des moyens de la coercition", souligne Loïc Azoulai. En revanche "elle ne résout pas la question de la conformité de l'obligation de vacciner au regard des standards européens de protection des droits fondamentaux", fait-il valoir.Selon Tania Racho, si cette résolution doit avoir une portée elle serait avant tout "politique". "On peut en retenir tout de même que des élus de 47 pays ont quand même réussi à s'accorder sur cette question", pointe-t-elle. Il existe un organe qui a le pouvoir de condamner des pays membres du Conseil de l'Europe: la cour européenne des droits de l'Homme, qui prononce des arrêts après avoir été saisie sur un cas. Elle avait par exemple condamné en juillet dernier la France en raison des conditions de vie de migrants sur son territoire. Mais ses arrêts n'ont pas un effet automatique sur les décisions prises par les juridictions françaises. "C'est ensuite le comité des ministres du Conseil de l'Europe qui s'occupe de suivre l'exécution des arrêts. Après c'est un dialogue qui aboutit ou pas", explique Tania Racho.A la date du 9 mars 2021 en France, près 4 millions de personnes ont reçu une première dose de vaccin contre le Covid-19, et plus de deux millions sont vaccinées avec deux doses. Edit du 09/03/2021: change la photo de tête et corrige coquille
(fr)
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