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Un post Facebook partagé plus de 3.000 fois depuis le 5 février tient le masque pour responsable d'une série de troubles chez les jeunes enfants, mais il s'appuie sur une "étude" allemande sans valeur scientifique et affirme de manière erronée que les enfants sont totalement étrangers à la circulation du virus.Publié par le collectif Action 21 - Lyon 69, cette publication liste une série d'effets secondaires qui seraient provoqués par le port du masque chez les enfants à l'école : 57% seraient sujets à des maux de tête, 49% ressentiraient "moins de bonheur", 38% souffriraient de "troubles de l'apprentissage" et entre 15 à 30% d'entre eux seraient pris de "sensation d'étouffement" ou de "vertiges". Ce post, également visible sur Twitter, circule alors que le gouvernement a décidé d'interdire les masques artisanaux à l'école à partir du lundi 8 février. Capture d'écran réalisée sur Facebook le 09/02/2021Selon ce collectif lyonnais qui regroupe des parents "opposés au port masque à l'école", ces statistiques proviennent d'une "étude" menée en Allemagne par 363 médecins auprès de 25.930 enfants et adolescents le 26 octobre 2020 sous la supervision de l'université de Witten/Herdecke.Sans cette fois citer de sources, la publication affirme également que le port du masque à l'école, en plus de provoquer ces effets secondaires, n'aurait aucune justification de santé publique, les enfants n'étant pas "porteurs, réservoirs, transmetteurs" du nouveau coronavirus.Que dit "l'étude" allemande?Présentés comme une "étude" sur le post Facebook, ces travaux universitaires sont en réalité au stade de la "pré-publication" : ils n'ont pas fait pas l'objet d'un examen par des pairs – étape essentielle de validation dans le monde scientifique – et ne sauraient dès lors être "considérés comme conclusifs", comme l'indique un avertissement en haut de la première page. Capture d'écran du site researchsquare.com prise le 09/02/2021C'est en se fondant sur les réponses à un questionnaire qu'ils ont établi et mis en ligne pendant six jours que cinq chercheurs de l'université Witten/Herdecke ont listé une série de 24 troubles relevés –sur la foi de simples déclarations – par des parents sur leurs enfants. Globalement, les résultats recueillis auprès de 17.854 parents sont à peu près fidèlement retranscrits par le post Facebook. La proportion de migraines est toutefois surévaluée dans le post (57% contre 53,3% dans l'étude) qui fait par ailleurs état de "sensations d'étouffement" chez les enfants alors que les travaux allemands ne parlent que "sensation d'essoufflement" ("feeling of shortage of breath"). Capture d'écran du site researchsquare.com prise le 09/02/2021Surtout, le post Facebook ne fait aucune mention des biais relevés par les chercheurs eux-mêmes, qui observent notamment que le questionnaire a été notamment relayé dans des forums "qui critiquent par principe les mesures de protection anti-corona prises par le gouvernement", au risque d'influer sur les réponses. Capture d'écran du site researchsquare.com prise le 09/02/2021"Il est très important pour nous que nos résultats ne conduisent pas les parents à développer une opinion fondamentalement négative sur le port du masque chez les enfants", soulignent les chercheurs, qui admettent que les enfants souffrant du port du masque demeurent un phénomène "relativement limité et non-représentatif".On ne retrouve pas trace de ces réserves dans le post qui affirme, au contraire, que ces chiffres traduisent les "répercussions du port du masque chez les enfants et les adolescents". Que sait-on de l'impact sanitaire du masque chez les enfants?C'est le 29 octobre, au lendemain de l'annonce du deuxième confinement, que le gouvernement a décidé de rendre obligatoire le port du masque en primaire dès l'âge de 6 ans, contre 11 ans auparavant. Face à la diffusion de variants plus contagieux, le protocole a encore été durci lundi 8 février et seuls les masques de catégorie 1 peuvent être désormais portés à l'intérieur des établissements scolaires. Fraîchement accueillie à l'époque par les syndicats enseignants, le port obligatoire du masque à l'école n'a pas été appliqué assez longtemps en évaluer l'éventuel impact sanitaire, a affirmé le 8 février à l'AFP le Pr Romain Basmaci, urgentiste en pédiatrie à l'Hôpital Louis-Mourier de Colombes (Hauts-de-Seine) et secrétaire général de la Société française de pédiatrie (SFP). (Damien Meyer / AFP)"Les données ne sont pas assez solides pour pouvoir trancher", précise-t-il, tout en assurant ne pas avoir eu, à ce stade, de remontées d'informations significatives sur des effets sanitaires liés au port du masque."Autant on a vu (pendant les confinements, ndlr) une augmentation des signalements, des maltraitances, des troubles psychiatriques etc., autant on n'a pas vu augmenter des consultations pour des problèmes liés au masque", ajoute-il, indiquant toutefois que "ça ne veut pas dire que ça existe ou que ça n'existe pas".Selon une foire aux questions actualisée le 18 août 2020, l'équivalent américain de la SFP, l'American Academy of Pediatrics, se montre plus affirmatif : le port du masque n'altérerait pas la capacité des enfants "à se concentrer ou à apprendre à l'école" et n'affecterait pas leur développement pulmonaire ou leur système immunitaire.La propagation du virus et les enfantsPour justifier leur rejet du masque à l'école, le collectif lyonnais affirme sans réserves que les enfants ne sont pas "porteurs" ou "transmetteurs" du virus. Capture d'écran Facebook prise le 09/02/2021Le débat est pourtant loin d'être tranché dans la communauté scientifique. Fin 2020, des études réalisées aux Etats-Unis, en Inde ou en Corée du Sud ont battu en brèche l'idée que les enfants étaient peu contagieux mais de récents travaux britanniques de grande ampleur ont abouti à des conclusions bien plus nuancées.Une chose est sûre : on ne peut pas affirmer qu'ils sont totalement étrangers à la circulation du virus. "Les enfants peuvent être porteurs avec des charges virales comparables à celles des adultes, ils peuvent être malades mais ils le sont beaucoup moins que les adultes et ils sont beaucoup moins transmetteurs que les adultes", résume pour l'AFP le Pr Basmaci, interrogé le 8 février.Lundi 8 févier, le syndicat SNMSU-Unsa des médecins scolaires a appelé à la fermeture des écoles pendant l'ensemble de la période scolaire toutes zones confondues au motif que "la circulation du virus en milieu scolaire, de la maternelle au lycée, chez les élèves comme chez les personnels, est de plus en plus forte, avec un nombre croissant de variants"."Les élèves, y compris ceux de moins de 11 ans, sont bien contaminés et contaminateurs, ils sont des maillons actifs de la chaîne de transmission, surtout depuis l’apparition des nouveaux variants", affirme le syndicat.Dans des conclusions publiées le 20 janvier, l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) estimait, elle, que les écoles n'avaient jusque-là pas été des "foyers de super propagation" sauf "dans quelques cas où les mesures de protection n'ont pas été bien mises en oeuvre". L'agence onusienne en concluait que les fermetures d'écoles devaient intervenir en "dernier recours" et se limiter aux "zones de transmission intense" du virus.
(fr)
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