PropertyValue
?:author
?:datePublished
  • 2021-05-19 (xsd:date)
?:headline
  • Covid, VIH, grippe, cancer, Alzheimer : pourquoi cette comparaison virale sur les réseaux sociaux n'est pas pertinente (fr)
?:inLanguage
?:itemReviewed
?:reviewBody
  • Des publications Facebook partagées des centaines de fois depuis la mi-mai mettent en parallèle le développement "en l'espace d'un an" de plusieurs vaccins contre le Covid-19 et la difficile recherche de traitements contre le VIH, le cancer et Alzheimer. "Bizarre", en concluent ces publications, qui suggèrent de se méfier des vaccins anti-Covid. Mais comparer des maladies aussi différentes n'est pas pertinent, mettent en garde des experts interrogés par l'AFP, qui pointent plusieurs erreurs factuelles contenues dans ces publications."Pas de vaccin contre le VIH après 40 ans de recherche... Pas de vaccin fiable contre la grippe... Pas de traitement contre la maladie d'Alzheimer... Pas de traitement efficace contre le cancer après 100 ans de recherche... Rien. Un virus apparaît mystérieusement et en l'espace d'un an, un vaccin est créé en même temps par quatre compagnies pharmaceutiques différentes et nous devons TOUS le prendre avec contraintes et sous peine de REPRÉSAILLES?! Non merci !", indique un message copié-collé sur plusieurs pages Facebook ces derniers jours. Capture d'écran Facebook prise le 18/05/2021 Capture d'écran Facebook prise le 18/05/2021 "C'est pour cela que je refuse catégoriquement le vaccin de tous les laboratoires", commente une internaute sous l'une de ces publications. Capture d'écran Facebook prise le 18/05/2021L'auteur du visuel souligne une réalité : la course au vaccin contre le Covid-19 a été menée à une vitesse inédite.Quatre vaccins anti-Covid ont été autorisés au sein de l'Union européenne ces derniers mois : les vaccins de Pfizer/BioNTech et Moderna, utilisant la technologie ARNm, et les vaccins AstraZeneca et Johnson & Johnson, utilisant la technologie du "vecteur viral" qui prennent comme support un type de virus très courant appelé adénovirus."Jamais dans l'histoire, la recherche sur les vaccins n'a progressé aussi rapidement", déclarait mi-novembre le directeur général de l'OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus.Pour autant, le message, qui, sur la base d'une comparaison entre le nouveau coronavirus, le VIH, la grippe, le cancer et Alzheimer, appelle à se méfier des vaccins anti-covid, est trompeur.VIHComparer de la sorte "deux maladies aussi différentes" que le Covid-19 et le VIH est "stupide", expliquait en décembre à l'AFP le professeur Jean-Daniel Lelièvre, chef du service d'Immunologie clinique au CHU Henri Mondor et responsable de la recherche clinique au sein du Vaccine Research Institute, alors que des publications comparant les deux maladies circulaient sur les réseaux sociaux.Pourquoi la recherche vaccinale contre le Covid-19 a-t-elle progressé aussi rapidement, alors que près de quatre décennies de recherche n'ont pas suffi pour trouver un vaccin efficace contre le VIH ?"C'est assez simple : on a, en gros, des vaccins pour des maladies qui guérissent, c'est-à-dire pour des maladies contre lesquelles on a une protection naturelle. Avec la rougeole, la grippe, l'hépatite B, il y a une immunité naturelle qui se crée. Dans le cas du Sars-Cov-2, on va guérir parce qu'on fait des anticorps contre le Sars-Cov-2. Donc on reproduit [avec le vaccin] ce que fait la nature, parce qu'on sait exactement comment l'organisme humain se défend contre ce virus", explique le Pr Lelièvre."Or, si vous prenez des maladies infectieuses complexes, comme le VIH, personne n'en guérit. La réponse immunitaire contre le VIH ne se fait pas, elle est incomplète. Le VIH détruit le système immunitaire. Donc c'est pour ça que le parallélisme entre [VIH et Sars-Cov-2] est impossible", ajoute-t-il. Veillée nocturne à Katmandou (Népal) à l'occasion de la Journée mondiale de lutte contre le sida, le 30 novembre 2020 (AFP / Prakash Mathema)L'arrivée aussi rapide de vaccins s'explique par "un développement technologique majeur, l'ARN messager", utilisé par Pfizer/BioNTech et Moderna, "qui a permis d'accélérer le processus", rappelait en décembre le Pr Olivier Schwartz, virologiste et responsable de l'unité Virus et immunité à l'Institut Pasteur.Par ailleurs, le Sars-Cov-2 "n'est pas très différent du Mers-Cov et du Sars-Cov-1", qui avait entraîné une épidémie en Asie du Sud-Est en 2003, note le Pr Lelièvre."On avait fait toute cette recherche vaccinale pour le Sars-Cov-1. C'était allé jusqu'à des essais de phase 1 mais la maladie s'était arrêtée, donc on n'avait pas pu aller jusqu'à des essais de phase 3. D'un point de vue vaccinologique, on était dans un monde idéal, parce que c'est un nouveau virus, mais très proche de l'autre, sur lequel on avait toutes les connaissances", détaille-t-il.Si le Sars-Cov-2 était apparu aux débuts des années 1980, comme le VIH, la recherche vaccinale "aurait demandé beaucoup plus de temps",  juge-t-il.L'arrivée aussi rapide de vaccins contre le Covid-19 a aussi été rendue possible par une accélération tous azimuts des procédures de recherche, de production industrielle et d'évaluation, appuyée par des financements colossaux, comme l'explique cette dépêche AFP. Le développement et la mise sur le marché d'un nouveau vaccin prennent d'habitude dix ans en moyenne.L'Agence européenne des médicaments (EMA) insiste cependant sur le fait que "les mêmes standards réglementaires élevés de qualité, de sécurité et d'efficacité sont appliqués aux vaccins contre le Covid-19" qu'aux autres.GRIPPELe message copié-collé sur Facebook souligne que "quatre compagnies pharmaceutiques différentes" ont développé un vaccin anti-Covid "en l'espace d'un an", alors qu'aucun "vaccin fiable" n'existe contre la grippe. "Bizarre", selon l'auteur du message."Il est vrai qu'il y a des virus à ARN contre lesquels on vaccine plutôt pas très bien, comme le virus de la grippe. L'efficacité générale [du vaccin contre la grippe saisonnière] est entre 30 et 60% [selon les années], et peut baisser entre 10 et 30% chez les personnes très âgées, mais c'est un cas particulier, avec un gène qui mute beaucoup", expliquait en septembre à l'AFP Marie-Paule Kieny, virologue et présidente du Comité scientifique vaccin Covid-19. Pour autant, comparer les vaccins contre la grippe et ceux contre le Covid n'est pas pertinent car "le virus de la grippe mute beaucoup plus que le coronavirus SARS-CoV-2, obligeant à changer chaque année les souches vaccinales pour anticiper le nouveau virus de la saison suivante", note Patrick Berche, professeur émérite de microbiologie et ancien directeur de l'Institut Pasteur de Lille, interrogé mardi 18 mai. Le virus de la grippe ne cesse donc d'évoluer, c'est la raison pour laquelle la composition du vaccin est actualisée tous les ans, d'après les recommandations de l'OMS, et qu'une injection annuelle est nécessaire pour être immunisé. C'est aussi la raison pour laquelle le vaccin peut, selon les années, être moins efficace, avec des "taux de protection de l'ordre de 40% les mauvaises années, quand le virus vaccinal n'est pas bien adapté à la nouvelle souche", selon Patrick Berche."Cependant, cette protection évite en général les formes graves", souligne le spécialiste. Un résident d'une maison de retraite se fait vacciner contre la grippe saisonnière à Bozouls (Aveyron), le 14 octobre 2020 (AFP / Lionel Bonaventure)ALZHEIMER"A l'heure d'aujourd'hui il n'y a pas de traitements curatifs contre la maladie d'Alzheimer. On dispose de molécules à visée symptomatique" et il existe "des molécules en test, à des phases plus ou moins avancées", explique à l'AFP Nadir Kadri, neurogériatre et chef de service au CHU de Rouen. Pour autant, "cette comparaison [avec le Covid] n'est pas du tout pertinente", juge-t-il. "Pour Alzheimer, on est dans une maladie multifactorielle. C'est beaucoup plus complexe, si je puis dire, qu'une maladie virale.""La maladie d'Alzheimer est une maladie extrêmement complexe, et quand les patients présentent des symptômes, cela fait déjà quinze ans au moins que les lésions sont là et ont déjà dégradé le cerveau", complète Bruno Dubois, professeur de neurologie à Sorbonne-Université et chef de service neurologie à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière."Deuxièmement, c'est une maladie qui attaque les neurones et qui dégrade toutes les connexions que ces neurones ont les uns avec les autres. Quand vous avez un neurone malade, vous en avez 10.000 qui ne peuvent plus travailler, et chacun de ces 10.000 est lui-même en connexion avec 10.000, donc c'est ça le problème. Vous êtes confrontés à un problème d'une complexité énorme", ajoute-t-il.Le Pr Dubois souligne par ailleurs que "les essais thérapeutiques qui visent à démontrer l'effet d'un médicament [contre Alzheimer] sont beaucoup plus lourds" et chronophages.Covid et Alzheimer "n'ont absolument rien à voir", abonde Philippe Amouyel, professeur de santé publique au CHU de Lille et directeur de la Fondation Alzheimer. "Cela n'a rien à voir en termes de recherche. Pour le Covid on a un micro-organisme qu'on est capable de séquencer, qui est la cause directe de la maladie. Pour Alzheimer, on a une maladie qui associe une évolution complexe, dans l'organe le plus complexe qu'est le cerveau, et surtout une évolution temporelle extrêmement longue", contrairement au Covid, détaille-t-il, rappelant qu'"on ne connaît pas complètement encore la cause ou les causes de la maladie"."C'est beaucoup plus complexe parce qu'on ne maîtrise pas tout et qu'il existe probablement plusieurs formes d'Alzheimer, donc il y a beaucoup plus de travail pour essayer de comprendre une entité et un modèle qui sont énormément plus complexes que ce tout petit virus", conclut-il. Une bénévole assiste une personne âgée atteinte par la maladie d'Alzheimer à Dax (Landes), le 9 septembre 2020 (AFP / Philippe Lopez)CANCER"Le combat contre le Covid-19 est plus facile [que celui contre le cancer] car la maladie n'est causée que par l'infection à un seul virus", le Sars-Cov-2, expliquait en décembre à l'AFP la virologue Alison Imrie, de l'université d'Australie occidentale, réagissant à un message similaire circulant en anglais sur les réseaux sociaux.Les cancers sont eux "des maladies multifactorielles dans lesquelles interviennent à la fois des facteurs biologiques et des facteurs liés aux comportements individuels et à l'environnement au sens large", comme le tabac, l'alcool, des déséquilibres alimentaires, des produits chimiques ou encore l'exposition au soleil, détaille la Ligue contre le cancer sur son site internet."C'est parfaitement faux de dire qu'il n'y a aucun traitement contre le cancer. Il y deux bons tiers des cancers qui sont guéris, et en partie grâce à des médicaments", souligne par ailleurs Iris Pauporté, déléguée à la recherche à la Ligue contre le cancer, alors que la publication copiée-collée sur Facebook affirme qu'il n'existe "pas de traitement efficace contre le cancer après 100 ans de recherche"."Le cancer du sein, qui est le cancer le plus fréquent en France, fait l'objet de plusieurs traitements, y compris médicamenteux, et qui font en sorte qu'on guérit 9 cancers du sein sur 10", rappelle Iris Pauporté à l'AFP.En outre, seuls 12 à 20% des cancers sont causés par des virus, selon la Société américaine de microbiologie (ASM), qui rappelle que certains vaccins, dont ceux contre le papillomavirus humain (virus à l'origine de 95% des cancers du col de l'utérus en France) et l'hépatite B (virus pouvant provoquer de cancers du foie), ont fait la preuve de leur efficacité contre pour prévenir ces cancers."La vaccination contre le papillomavirus humain peut prévenir environ 70 à 80% des cancers", selon l'ASM. (fr)
?:reviewRating
rdf:type
?:url