?:reviewBody
|
-
Une vidéo partagée près de 5 000 fois sur les réseaux sociaux depuis le 27 mars montre la rédactrice en chef d'un média autrichien affirmer que "la pandémie (...) viendra de la vaccination" et qu'elle représente "un réel danger" tant pour les personnes vaccinées que pour les autres. C'est faux. De nombreux experts ont souligné auprès de l'AFP l'efficacité de la vaccination pour ralentir la propagation du Covid-19, et des premières observations en vie réelle sont encourageantes."La rédactrice en chef d'un journal autrichien sonne l'alerte", peut-on lire sur une publication Facebook, "elle exprime ses inquiétudes concernant le futur et dit clairement que : 'tout sera pire après la vax.ination', exprime un autre internaute ici, en faisant référence à la même vidéo. Capture d’écran de la page Facebook Éveil et Vérité qui partage la vidéo d’Elsa Mittmannsgruber rédactrice en chef du média autrichien Wochenblick, prise le 02/04/2021."Tout ça grâce aux gens qui se seront fait vacciner derrière se fiasco Covid ! On dit merci à qui ? Aux merdias qui les auront bien lessivés et à se gouvernement mafieux", s'indigne un utilisateur sur Twitter, tandis qu'un autre relaie le même genre d'allégations ailleurs. Captures d'écran de deux tweets viraux reprenant la vidéo, prises le 31/03/2021.Ce qui est dit dans la vidéoElsa Mittmannsgruber est rédactrice en chef du média autrichien Wochenblick. Dans la vidéo, publiée pour la première fois le 18 mars, elle dit être "désolée" de nous "décevoir" si nous espérons que "grâce à la vaccination tout sera bientôt terminé" puisque les choses "vont aller de pire en pire."D'après elle, il y aura une augmentation massive des décès à cause de la vaccination, tant pour les personnes vaccinées, que les autres. Pour appuyer son argumentaire, elle cite les propos d'une immunologiste irlandaise, Dolores Cahill qui "met en garde contre le fait que le système immunitaire va attaquer l'organisme qu'il devrait défendre lorsque le vacciné va entrer en contact avec des virus corona de forme naturelle" ce qui pourrait avoir "des conséquences fatales." La rédactrice en chef ajoute à cela la théorie d'un scientifique flamand, Geert Vanden Bossche, qui "prédit que la vaccination de masse transformera le virus corona, en soi inoffensif, en un monstre incontrôlable. Elle deviendra plus infectieuse, plus agressive et rendra également les jeunes générations malades." "Les chiffres" en Israël confirmeraient, selon elle, ces deux idées : "le nombre de décès est considérable et il semble que le virus ait changé de nature en quelques semaines seulement, après les vaccinations de masse. Soudain, le virus n'affecte plus les personnes âgées avec les comorbidités préexistantes, mais entre-temps, une augmentation massive des cas critiques de Covid-19 a également été observée chez les jeunes, y compris chez les nouveaux nés."La vaccination "plus dangereuse" que le Covid-19 ? FauxLa dangerosité des vaccins est un argument central de la rhétorique anti-vaccin, revenu en force avec le Covid-19.Alors que le monde sortait difficilement de la première vague de l'épidémie, Jason Newland, pédiatre et spécialiste des maladies infectieuses à la faculté de médecine de la Washington University à Saint-Louis (Etats-Unis), rappelait que "les vaccins ont sauvé des millions de gens et non tué des millions de gens."L'efficacité des vaccins dans la lutte contre les maladies infectieuses fait l'objet d'un consensus scientifique.Les autorités sanitaires soulignent qu'en général, "les avantages de la vaccination dépassent de loin les risques, et l'on observerait un bien plus grand nombre de cas de maladies et de décès sans les vaccins", (Organisation mondiale de la santé, mars 2018) et que "le risque de développer une maladie grave en ne se vaccinant pas est beaucoup plus important que celui de voir apparaître un effet indésirable lié à la vaccination" (Agence française de santé publique, janvier 2018).Ainsi le succès des vaccins contre la rougeole ou la poliomyélite.La sécurité des vaccins est en outre surveillée de près par l'OMS, qui recense et étudie tout effet indésirable survenu après l'administration d'un vaccin.En France par exemple, l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) assure la surveillance des vaccins contre le Covid-19 et publie des points de santé régulier (ici le plus récent en date du 26 mars).Le vaccin AstraZeneca fait actuellement l'objet d'analyses de la part de l'Agence européennne des médicaments (EMA) et des "recommandations actualisées" sont attendues début avril.Le gendarme européen du médicament a recensé 62 cas de thromboses veineuses cérébrales dans le monde, dont 44 dans les 30 pays de l'Espace économique européen (UE, Islande, Norvège, Liechtenstein) pour 9,2 millions de doses de vaccin administrées dans cette zone.Quatorze décès ont été enregistrés, sans pouvoir toujours être imputables de façon sûre à la thrombose, selon la directrice de l'EMA Emer Cooke, citée dans cette dépêche AFP du 31 mars 2021. Les quatre vaccins contre le Covid-19 autorisés à ce jour, ceux des laboratoires Pfizer/BioNTech, Moderna, AstraZeneca et Johnson & Johnson, ont suivi les étapes imposées avant une mise sur le marché européen et français, dont l'efficacité oscille entre 67% et 95%.Depuis, c'est la course à la vaccination partout dans le monde, la pandémie ayant fait au moins 2 829 089 morts dans le monde depuis fin décembre 2019. Le système immunitaire attaque l'organisme à cause du vaccin? FauxL'affirmation selon laquelle le système immunitaire va attaquer l'organisme qu'il devrait défendre lorsque le vacciné va entrer en contact avec des virus corona de forme naturelle de Dolores Cahill, méconnaît le principe même de la vaccination, qui justement "consiste à protéger un individu contre une maladie en stimulant son système immunitaire", comme l'Inserm l'explique sur son site.Les propos de cette immunologiste irlandaise ont été vérifiés à plusieurs reprises par l'AFP (1, 2) lorsqu'elle avait publié une vidéo sur sa page Facebook le 12 janvier 2021, dans laquelle elle affirmait les vaccins à ARN messager (ARNm) contre le Covid-19 "tueront par tempête cytokinique", une sur-réaction du système immunitaire, qui s'attaquerait aux organes en confondant les protéines du virus et celles initiées par le vaccin.Il est vrai que les vaccins à ARNm peuvent provoquer davantage d'inflammations que les autres vaccins. "Les premières technologies ont été ralenties aux essais cliniques car ils produisaient de fortes inflammations", expliquait Eric Muraille en février 2021 à l'AFP, biologiste et immunologiste à l’Université libre de Bruxelles et maître de recherche au Fonds de la recherche scientifique, mais les chercheurs ont, en une vingtaine d'années, réussi à "stabiliser l'ARN pour induire une bonne réponse immunitaire"."Lorsqu'une personne reçoit le vaccin, certaines de ses cellules lisent les instructions de l'ARN et produisent temporairement la protéine de pointe. Le système immunitaire de la personne reconnaîtra alors cette protéine comme étrangère et produira des anticorps et activera les cellules T pour l'attaquer", expliquait l'EMA lors de son feu vert au vaccin à ARN de Moderna le 6 janvier 2021.Si la personne fait de nouveau face au virus Sars-Cov-2, "son système immunitaire le reconnaîtra et sera prêt à défendre l'organisme contre lui."Les anticorps ne peuvent donc pas trouver des protéines virales plusieurs mois après la vaccination dans les cellules ou dans les organes et le risque qu'une telle inflammation se produise est extrêmement faible, comparé à son efficacité.Les vaccins ARNm (Pfizer et Moderna) ne stoppent pas simplement le développement de symptômes de la maladie, mais également une infection elle-même, constituant ainsi un outil important pour empêcher la propagation du virus, selon une étude américaine du 30 mars 2021 menée par les Centres américains de prévention et de lutte contre les maladies (CDC)."Cette étude démontre que nos efforts de vaccination nationaux fonctionnent", selon la directrice des CDC, Rochelle Walensky, citée dans une dépêche AFP.La vaccination favorise la mutation du virus ? FauxLa théorie de Geert Vanden Bossche, sur laquelle s'appuie Elsa Mittmannsgruber, repose sur l'idée que les campagnes de vaccination actuellement en cours dans le monde seraient potentiellement plus dangereuses que le virus lui-même, car elles pourraient provoquer une "fuite immunitaire adaptative" massive, c'est-à-dire le développement de variants plus résistants aux vaccins et donc, selon lui, plus dangereux. Si ce risque théorique existe, il peut être évité par une campagne de vaccination massive et rapide et ne justifie pas un arrêt de la vaccination. Un arrêt total des campagnes de vaccination n'empêchera pas l'apparition de nouveaux variants, dont la plupart sont apparus avant le début de la vaccination.Au contraire, laisser le virus circuler librement favoriserait les mutations et donc le risque d'apparition de variants plus infectieux (plus facilement transmissibles) ou plus dangereux, comme le démontre cet article de l'AFP Factuel, dans lequel les propos de Geert Vanden Bossche, font l'objet d'une vérification.À ce stade, trois variants sont considérés comme des "variants préoccupants", selon la dénomination officielle de l'OMS : les variants anglais, sud-africain ou brésilien. Ils circulent respectivement dans 125, 75 et 41 pays, selon le dernier point de l'OMS.C'est un processus naturel, puisque le virus acquiert des mutations au fil du temps, pour assurer sa survie, comme l'explique cette vidéo:Des études sont en cours notamment pour savoir s'ils peuvent sensiblement diminuer l'efficacité de la vaccination. Toutefois, même si les vaccins sont moins efficaces contre certains variants, cela ne veut pas dire qu'ils ne sont plus efficaces du tout."Les vaccins contre le Covid-19 ne fabriquent pas le variant", a expliqué Olivier Schwartz, responsable de l'unité virus et immunité à l'Institut Pasteur, contacté par l'AFP fin mars. "Le risque, c'est en revanche qu'ils ne soient pas assez efficaces pour empêcher ces mutations."Le nombre de décès en augmentation en Israël ? FauxEn Israël, contrairement à ce que la rédactrice en chef de Wochenblick soutient, le nombre de décès du Covid-19 n'a pas explosé à cause de la campagne de vaccination, comme l'expliquait récemment l'AFP."Cette information est complètement fausse. Israël a connu des réductions spéctaculaires de l'ensemble des infections au SRAS-CoV-2, de la maladie grave à Covid-19 (sans augmentation significative de la maladie grave pédiatrique) et de la mortalité associée au Covid-19 au cours de ses campagnes de vaccination", a démenti auprès de l'AFP le ministère de la Santé israélien le 07 avril.Cette campagne s'est avérée déterminante pour contrôler l'épidémie, selon les autorités sanitaires et les chiffres publiés par le gouvernement israélien ici, attestent d'une nette baisse de la mortalité : et il y a eu 11 morts du Covid-19 le 1er avril, contre 101 au 20 janvier. Capture d'écran des graphiques du site worldometers.info sur le nombre de morts par jours en Israël, prise le 02/04/2021.Une étude israélienne publiée en février 2021 montrait que "les personnes vaccinées infectées par le SARS-CoV-2 après leur vaccination ont des charges virales 4 fois moins fortes que les personnes non vaccinées infectées par le SARS-CoV-2. Ces données suggèrent que les personnes vaccinées contre la Covid-19 sont moins infectieuses, quand elles sont infectées après la vaccination", expliquait le Dr Marie-Ghislaine De Goer, ingénieure au sein de l'unité Immunologie intégrative des tumeurs et immunothérapie du cancer de l'Inserm dans un mail à l'AFP le 25 mars."L'administration d'une vaccination efficace à la majorité de la population âgée de 16 ans et plus, en quelques semaines, est un élément clé dans la diminution de la létalité et du nombre de morts à laquelle nous assistons actuellement", avait par ailleurs indiqué à l'AFP Jérusalem, Anat Danieli Lev, porte-parole du ministère de la Santé, dans un mail le 29 mars.Un point sur la vaccination en EuropeDe manière générale, les spécialistes consultés par l'AFP confirment bien que l'ampleur et la rapidité des campagnes de vaccination décuplent les chances de juguler l'épidémie face à la troisième vague en Europe.Au 1er avril, plus de 152 millions de doses ont été injectées dans la zone Europe de l'OMS (qui inclut la Russie, la Turquie, Israël et les anciennes républiques soviétiques du Caucase et d'Asie centrale), selon des données compilées par l'AFP à partir de sources officielles. Cela représente un quart des 596 millions de doses administrées dans le monde, alors que la zone n'héberge que 12% de la population mondiale.Édit du 07/04/2021 : ajout citation du ministère de la Santé israélien.
(fr)
|