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L'annonce par Florent Pagny de son cancer du poumon a fait ressurgir des rumeurs sur les réseaux sociaux de liens de causalité entre vaccination anti-Covid-19 et "cellules cancéreuses". Attention : ces affirmations sont infondées, rappellent la Ligue nationale contre le cancer et des spécialistes interrogés par l'AFP. Le chanteur français Florent Pagny a annoncé la semaine dernière avoir annulé tous les concerts restants de sa tournée des 60 ans en raison d'une "tumeur cancéreuse" au "poumon" qui ne pouvait "pas s'opérer". Cette annonce a suscité de nombreux commentaires de soutien sur les réseaux sociaux, dont celui du présentateur Nikos Aliagas ou encore du chanteur Matt Pokora, mais également des interrogations. "Il paraît que le vaccin réactive les cellules cancéreuses... Un médecin honnête pour confirmer ?" , s'interroge ainsi une internaute sur Twitter en relayant une vidéo de BFMTV portant sur Florent Pagny. En réponse à ce tweet, plusieurs internautes ont relayé des affirmations similaires. "Comme je l'écris depuis 1 an, ces thérapies géniques ont fait presque tripler le nombre de cancers en 2021 ! On le voit bien ici chez les militaires US tous vaccinés. En France silence total dans les merdias", écrit notamment l'un d'eux."Je connais 2 personnes vaccinées en rémission avec une réactivation fulgurante de leur cancer", ajoute un autre, sous-entendant de la même manière un lien entre vaccination contre le Covid-19 et cancer.Ce lien a également été fait le 12 janvier dernier par le professeur Christian Perronne qui a soutenu, devant la chambre des députés du Luxembourg, que les oncologues américains avaient "montré qu'il y avait une augmentation des morts par cancers après la vaccination". Cette affirmation a été démontée par l'AFP ici, parmi d'autres infox relayées par M. Perronne.Attention : ces affirmations, qui avaient déjà circulé au début de la pandémie, sont dénuées de tout fondement scientifique, insistent la Ligue nationale contre le cancer et des scientifiques contactés par l'AFP."Il n’y a rien qui permet de lier les vaccins ARN messager au cancer", explique Jérôme Hinfray, chargé de communication scientifique à la Ligue, à l'AFP le 27 janvier 2022. "Le vaccin est injecté mais il a une durée de vie extrêmement courte dans l'organisme, cet ARN ne peut en aucun cas pénétrer dans le noyau de la cellule et interférer avec ce génome et amener des mutations, c'est du fantasme"."Ces technologies vaccinales ne sont pas sorties du chapeau, ca fait très longtemps qu'on travaille sur l’ARN, les premiers essais de vaccination datent des années 1990 on a déjà beaucoup de recul par rapport à cette technologie qui, en plus, est envisagée comme une des meilleurs pistes pour le traitement contre le cancer", ajoute-t-il. "Donc là, il n'y a aucun rationnel d'ordre scientifique" qui permettrait d'établir un lien entre vaccination anti-Covid-19 et cancer. "Il n’y a pas de rationnel", abonde auprès de l'AFP Maya Gutierrez, spécialiste en oncologie médicale à l'institut Curie. "Et au niveau du timing, c’est beaucoup trop court, c'est impossible qu’une vaccination puisse entrainer des phénomènes comme cela, il y a deux incohérences dans ce discours, sur le mécanisme et le timing". ( AFP / STEPHANE DE SAKUTIN)En revanche, poursuit Jérôme Hinfray, "on a bien une problématique du cancer avec le Covid mais ce n'est pas celle-là, c'est la perturbation du système de soins : on a des prises en charge qui reculent dans le temps, des gens qui arrivent à des âges de dépistage et qui ne peuvent pas y accéder... D'ici quelques années on va avoir un retour de bâton de la mortalité par cancer, on n'aura pas pu la traiter à temps".Cette inquiétude avait déjà été partagée en septembre par l'Inserm qui notait que la pandémie avait "très fortement fragilisé la lutte globale contre le cancer". "Les confinements successifs ont limité l’accès au soin et ont conduit à une réduction significative du dépistage, du diagnostic et de l’orientation vers les hôpitaux des patients atteints de cancer", s'alarmait l'institut. Certains de ses scientifiques s'étaient notamment penchés, avec leurs collègues de l’Université de Montpellier et de l’Institut du Cancer de Montpellier (ICM), sur les conséquences de l'épidémie sur la prise en charge du cancer colorectal en France pendant le premier confinement du printemps 2020.En septembre 2020, une étude de l'institut Gustave Roussy avait quant à elle évalué la hausse prévisible de la surmortalité entre 2 et 5%. ( AFP / ANNE-CHRISTINE POUJOULAT)L’idée que la vaccination contre le coronavirus réactiverait les cellules cancéreuses a par ailleurs été déjà démentie par de nombreux scientifiques. L’AFP Factuel notamment vérifié plusieurs de ces théories, comme ici par exemple (en anglais). En février 2021, des publications, partagées plus d'un millier de fois sur Facebook, avaient, elles, affirmé que les "pro-masques se donn[aient] le cancer", car "priver une cellule de 35% de son oxygène pendant 48 heures" pouvait la rendre "cancéreuse". Ces affirmations avaient été démenties par des scientifiques interrogés par l'AFP. "Il n'existe aucune preuve indiquant que le port du masque pourrait avoir un effet cancérigène. Surtout que si vous le portez correctement, il ne devrait pas trop affecter votre respiration", avait notamment déclaré Jason Locasale, chercheur spécialiste du métabolisme du cancer à l'Université Duke, en Caroline du Nord aux Etats-Unis. Pour Jérôme Hinfray, cette utilisation du cancer par des opposants à la vaccination n'a rien d'anodin. "Il y a encore cet impact psychologique très fort : en liant la vaccination anti-Covid 19 au cancer, vous êtes sûrs d’avoir le maximum d’impact sur l’esprit des gens, ça reste associé à la mort même si d'immenses progrès ont été réalisés".
(fr)
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