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Une vidéo totalisant plus de 7.000 partages en moins de 24 heures sur Facebook prétend montrer que des votes à l’élection présidentielle ivoirienne avaient déjà été enregistrés à Yamoussoukro, la capitale politique de la Côte d’Ivoire, à la veille de l’ouverture du scrutin. C’est faux: les papiers présentés sur ces images sont des bordereaux de livraison de matériel envoyé aux bureaux de vote. “Ils ont déjà voté ? Oui, ils ont déjà voté !”, clame une personne sur la vidéo, en faisant défiler des feuilles portant l’inscription, en lettres capitales, "scrutin présidentiel du 31 octobre 2020".Ces papiers portent le logo de la Commission électorale indépendante (CEI), organe chargé de l’organisation de l’élection. Cette séquence de 59 secondes, a été diffusée le 30 octobre, à la veille de l’élection présidentielle ivoirienne.Une publication sur la page Facebook PDCI TV, du nom du parti d’un des candidats de l’opposition ivoirienne Henri Konan Bédié, a totalisé plus de 5.700 partages en moins de 24 heures.Elle accuse de fraude “les bandits du RHDP”, le parti du président sortant Alassane Ouattara, candidat à un troisième mandat controversé. Capture d’écran Facebook, réalisée le 31 octobre 2020Cette séquence a été largement reprise sur d’autres pages Facebook, cumulant plusieurs milliers de partages supplémentaires (1, 2, 3, 4...). Elle a également été relayée sur Twitter (1, 2, 3), notamment sur le compte officiel de Guillaume Soro, l’un des principaux opposants au troisième mandat d’Alassane Ouattara dont la candidature n’a pas été validée par le Conseil constitutionnel de Côte d’Ivoire. Quelques 7.5 millions d'électeurs étaient appelés aux urnes le 31 octobre pour voter pour l’un des quatre candidats en lice: le président Ouattara (78 ans), au pouvoir depuis 2011, l'ex-président et chef du principal parti d'opposition Henri Konan Bédié (86 ans), l’ancien Premier ministre de Laurent Gbagbo Pascal Affi N'Guessan (67 ans) et le candidat indépendant Kouadio Konan Bertin (51 ans). L’opposition, menée par les candidats Henri Konan Bédié et Pascal Affi N’Guessan, ont appelé leurs partisans à un "boycott actif" de l'élection qui constitue, selon elle, un "coup d’Etat électoral". Ils ne se sont toutefois pas retiré du scrutin Bordereaux de livraisonEn regardant attentivement cette vidéo, on remarque rapidement que sur la deuxième ligne des papiers présentés comme des preuves de vote est écrit "bordereau de livraison".En-dessous figure un tableau où l’on peut lire en haut de chaque colonne les mots "désignation", "quantité embarquée", "quantité reçue", "nombre de colis" et "observation". La colonne "désignation" énumère: "kits de bureaux de vote", "kits gel", "kits biométriques", "batterie secours", "kit gel main" et "kit cache-nez" (loupe rouge). On voit aussi en bas de la page, les mentions "visa chef d’entrepôt", "convoyeur", "réceptionnaire", suivies de dates et de signatures (loupes vertes). Capture d’écran de la vidéo qui circule sur Facebook, réalisée le 31 octobre 2020A l’emplacement du "cachet du chef d'entrepôt" est imprimé "Commission électorale indépendante". Capture d’écran de la vidéo qui circule sur Facebook, réalisée le 31 octobre 2020Toutes ces mentions correspondent à l’équipement, électoral et anti-Covid, reçu par des bureaux de vote de Yamoussoukro. "Semer le terreur et la division"Sur son compte Facebook, la CEI a d’ailleurs publié en fin de journée le 30 octobre un démenti en cerclant de rouge la mention "bordereau de livraison”. “Une vidéo circulant sur les réseaux sociaux cherche à tromper les internautes en affirmant que le vote s’est déjà tenu à Yamoussoukro. C'est une fake news. Vous pouvez lire qu'il s'agit en réalité des bordereaux de livraison du matériel électoral en vue du scrutin de demain”, affirme la CEI."Ensemble disons non à la circulation des fake news", exhorte-t-elle: "Les fake news polluent les discussions pour semer la terreur et la division". Capture d’écran Facebook, réalisée le 31 octobre 2020Election sous tension Ces derniers jours, de nombreuses fausses informations ont circulé sur les réseaux sociaux ivoiriens, alimentant un contexte déjà tendu autour de cette élection présidentielle.Une vidéo vérifiée par l’AFP le 29 octobre prétendait montrer une militante pro-Ouattara en plein préparatifs de bourrage d’urne, alors qu’elle manipulait des spécimens utilisés pour expliquer le fonctionnement du vote à la population. Le 30 octobre, des incidents ont éclaté à Yamoussoukro, capitale politique de Côte d'Ivoire, où la vidéo semble être tournée.Ils ont opposé plusieurs centaines de jeunes aux forces de l'ordre. Les troubles ont duré toute la matinée. Aucun bilan n'était disponible dans l'immédiat.Au total, une trentaine de personnes sont mortes dans le pays dans des troubles et des violences intercommunautaires depuis le mois d'août et l’annonce de la candidature du président Ouattara.La crainte d'une escalade des violences est forte dans ce pays d'Afrique de l'ouest, dix ans après la crise post-électorale de 2010-2011 qui avait fait 3.000 morts.L’opposition conteste la candidature d’Alassane Ouattara à un troisième mandat controversé. La Constitution ivoirienne n'autorise en effet que deux mandats présidentiels, mais selon le pouvoir, l'adoption d'une nouvelle Constitution en 2016 a remis le compteur à zéro. L’opposition juge que cette candidature viole la nouvelle constitution adoptée en 2016, qui limite à deux le nombre de mandats présidentiels successifs.Le Conseil constitutionnel a validé la candidature d'Alassane Ouattara, estimant que le changement de constitution avait remis à zéro le compteur des mandats du président.
(fr)
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