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Un hectare de chanvre produirait autant d'oxygène que 25 hectares de forêt, selon des publications partagées plus de 100.000 fois sur Facebook depuis juin 2022, qui listent sept autres qualités et avantages prétendus de la culture du chanvre industriel. Mais ce chiffre est exagéré selon des experts interrogés par l'AFP, qui soulignent également que la comparaison manque de contexte, en vertu des différences entre les types de forêts et des nombreuses qualités de celles-ci sur le long terme. Démêlons le vrai du faux de ces allégations.Depuis le mois de juin 2022, une liste des qualités et vertus de la culture du chanvre est régulièrement publiée sur Facebook, partagée plusieurs dizaines de milliers de fois, comme dans cette publication ou celle-là. On retrouve aussi cette liste partagée plusieurs centaines de fois sur Twitter en juillet dernier.Selon ces publications, un hectare de chanvre "produit autant d'oxygène que 25 hectares de forêt" et peut produire "la même quantité de papier que 4 hectares d'arbres". Le chanvre serait un "piège à radiations", poussant en quatre mois, pouvant être cultivé partout dans le monde, nécessitant peu d'eau et aucun pesticide, qui, s'il était développé, pourrait mener l'industrie des pesticides à "disparaître".On retrouve certaines de ces allégations sur des sites commercialisant le chanvre assurant que "la culture du chanvre, c'est l'absorption de plus de CO2 qu'une forêt”, et qu'elle aurait un bilan carbone négatif.Pour ces publications, le chanvre est une plante aux vertus nombreuses, qui serait révolutionnaire sur le plan environnemental, et beaucoup plus intéressante qu'une forêt, souvent vue par le grand public comme un écosystème idéal pour l'environnement émettant beaucoup d'oxygène. Le message sous-entend qu'il faut développer la culture du chanvre, voire même, si on l'interprète à l'extrême, qu'il vaut mieux cultiver du chanvre que des forêts. Capture d'écran prise sur Facebook, le 24/08/2022Si la majorité de ces publications mentionnent le chanvre, quelques-unes parlent de "cannabis". D’un point de vue botanique, le chanvre industriel et le cannabis viennent à l'origine d’une seule et même espèce, "Cannabis Sativa”, qui est "très diversifiée" en de nombreuses espèces et sous-espèces, selon Michel Chauvet, agronome et ethnobotaniste, chercheur à l'INRA de Montpellier. Cette nomenclature est utilisée par les botanistes pour regrouper toutes les variétés possibles de "Cannabis Sativa".Par le passé, le chanvre industriel ou chanvre textile a par exemple porté d’autres noms, comme "Cannabis chinensis Delile, Cannabis foetens Gilib., Cannabis generalis E.H.L.Krause, Cannabis gigantea Crévost" selon la botaniste Isabelle Charissou. Le chanvre indien, ou "Cannabis indica", peut aussi être appelé "Cannabis sativa subsp. indica"."Les chanvres textiles se cultivent surtout en climat tempéré, et on a sélectionné des formes hautes et peu ramifiées (et aujourd'hui à faible teneur en THC)" explique Michel Chauvet. Le chanvre industriel correspond à une sous-catégorie de nombreuses plantes de l’espèce "Cannabis sativa L.", sélectionnées pour leur quantité insignifiante de THC (tétrahydrocannabinol, la substance psychotrope) dans la plante au moment de la culture. La culture du chanvre industriel est soumise à la réglementation française et européenne, autorisant uniquement la culture de variétés dont les plantes doivent contenir moins de 0,3% de THC. Seuls les agriculteurs actifs peuvent cultiver du chanvre et uniquement en respectant une liste de variétés autorisées, inscrites au Catalogue officiel français et au Journal Officiel européen. Chaque année en août, le taux de THC est contrôlé dans 30% des surfaces cultivées dans l’Union Européenne, par le biais de prélèvements sur la végétation analysés en laboratoire.Par ailleurs, "les chanvres à usage psychotrope se cultivent surtout en climat tropical, et on a sélectionné des formes courtes et ramifiées, riches en THC" ajoute le chercheur, qui mentionne que si l’on souhaite utiliser un nom botanique pour ces derniers, ils s’appellent "Cannabis sativa subsp. indica (Lam.) E. Small & Cronquist", une distinction purement scientifique et qui ne détaille pas toutes les sous-variétés possibles pour cette utilisation.Un hectare de chanvre produit 25 fois plus d'oxygène qu'un hectare de forêt ? La comparaison est peu pertinente, et exagéréeCette affirmation sur la production d'oxygène fait référence au processus de toute plante en croissance, la photosynthèse. "Toutes les plantes consomment du CO2, utilisent la lumière pour le convertir en matière végétale et libèrent de l'oxygène comme sous-produit. Ce processus s'appelle la photosynthèse" explique Scott Denning, climatologue et professeur de sciences atmosphériques à la Colorado State University. Plus la plante pousse vite, plus ce flux d'échange équivalent entre le carbone et l'oxygène sera important. Une plante en forte croissance récemment plantée, comme le chanvre, aura donc un "flux" plus important qu'une forêt ancienne, si l'on considère ce flux sur un an par exemple.Pour Philippe Ciais, chercheur au Laboratoire des Sciences du Climat et de l'Environnement du Commissariat à l’Énergie Atomique et aux énergies alternatives, il n'y a pas d'intérêt à comparer la production d’oxygène de deux cultures, c'est-à-dire leur flux, même si un type de plante va avoir un flux plus important qu'une autre."La production d'oxygène par la photosynthèse est compensée presque entièrement par la consommation d'oxygène par la respiration des plantes et des microbes", explique le chercheur, qui ajoute qu'"un système qui produit plus d'oxygène va inévitablement en consommer plus. Donc la comparaison est sans intérêt".Mais au-delà du flux lors de la croissance des plantes, le carbone qu'elles utilisent pour grandir, "pompé" de l'atmosphère, vient se stocker dans la plante, que ce soit du chanvre ou un arbre, jusqu'à atteindre un équilibre. C'est ce qu'on appelle la séquestration de carbone, ou "stock". Pour calculer les interactions des plantes avec l'atmosphère, les experts se réfèrent donc plutôt à la quantité de carbone stockée qu'à l'oxygène rejeté. Pour cela, ils comptent la production de biomasse par hectare, c'est-à-dire la quantité de matière organique d'origine végétale cultivée sur un hectare, puis la quantité de carbone stockée dans cette biomasse par hectare.Selon les estimations de Jean-Pierre Sarthou, agriculteur et professeur en agronomie et agroécologie à l'INP-ENSAT et à l'INRAE de Toulouse, la culture d'un hectare de chanvre stocke plutôt autour de deux fois plus de carbone qu'un hectare de forêt, que 25 fois plus : en considérant des valeurs moyennes, le chercheur arrive à 8,78 tonnes de CO2 capté et 23,4 tonnes d'O2 produits pour le bois, et 15,5 tonnes de CO2 capté et 41,5 tonnes d'O2 produits pour le chanvre.Pour Estelle Delangle, responsable de projet au pôle européen du chanvre, les chiffres officiels de la filière sur le carbone stocké sont un peu en dessous de cette estimation, et indiquent que "la captation sur un hectare de chanvre est égale à la captation d'un hectare de forêt". Elle confirme le chiffre de 15 tonnes de CO2 par hectare pour le chanvre, et souligne qu'il est comparé à celui d'une forêt bien installée, qui capte moins de carbone qu'une forêt jeune.Une différence de chiffres qui n'a rien d’anormal, selon l'agronome Jean-Pierre Sarthou : l'ordre de grandeur de productivité à l'hectare de biomasse, la matière organique végétale cultivée, peut varier fortement selon de nombreuses conditions, et il est possible de considérer des valeurs moyennes plutôt hautes, ou basses. Pour le chanvre, les tonnes de biomasse par hectare varient du simple au triple, en fonction du rendement (le produit que donne la terre par rapport à la surface cultivée), qui dépend de la qualité des semences, des sols, de la réussite de la culture… Pour les forêts, selon le type d'essence utilisée, et si la forêt est en pleine croissance ou non, le rendement en production de bois varie également fortement."Les chiffres de captation carbone vont énormément varier en fonction de nombreux facteurs, tant pour la culture du chanvre que pour les systèmes forestiers", explique Henri Blandinières, chercheur au département de la production agricole durable à l'Université catholique du Sacré-Cœur à Milan.Pour Alain Karsenty, chercheur et économiste au CIRAD, le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement, le type d'arbres planté est aussi crucial. Selon le chercheur, "une jeune forêt composée d'essences à croissance rapide, comme des pins Douglas, va absorber beaucoup plus qu'une plantation de chênes, mais le stock [de carbone] dans 50 ou 60 ans sera beaucoup moins important". Une forêt de chênes, à l'inverse, atteindra son maximum de stockage de carbone autour de 150 ans. "Rien n'égale les forêts en terme de stock", ajoute le chercheur.Selon Henri Blandinières, chercheur agronome, la comparaison entre le chanvre et une forêt est aussi difficile si le chiffre de productivité utilisé n'est pas détaillé : "la productivité va dépendre beaucoup des différentes forêts, de plusieurs dizaines de grammes de carbone par mètre carré et par an à plusieurs milliers de grammes de carbone par mètre carré et par an, entre une forêt boréale et équatoriale".De plus, le chanvre n'est pas laissé sur pied durant plusieurs années comme les arbres d'une forêt, le but est de le récolter annuellement. Et selon Alain Karsenty, économiste, "toute opération de récolte est une perturbation, et va émettre du CO2. On aura de toute façon des émissions de CO2 avec les machines qui passent, le compactage des sols...". Un champ de chanvre, qui peut être utilisé sous forme d'huile pour les cosmétiques, de graines pour l'alimentation et de fibres pour les textiles et la construction, à Saint-Agnet, dans le sud-ouest de la France, le 11 juillet 2022. ( AFP / Gaizka Iroz)Enfin, pour les scientifiques interrogés par l’AFP, il est plus intéressant de considérer le cycle entier de la vie d'une plante. A l'état naturel, tout écosystème, toute plante, finit par mourir et par se décomposer, relâchant tout le stock de carbone accumulé et arrivant à un bilan neutre. Mais en agriculture ou agroforesterie, la plante est récoltée puis transformée, et ne va pas se décomposer. Le carbone accumulé est donc séquestré, stocké, arrivant à un bilan positif d'émissions d'oxygène puisque le carbone ne se relâche pas dans l'immédiat dans l'atmosphère. Quels que soient les différents débouchés du chanvre et du bois, le "stock" de carbone finit cependant forcément par être relâché lorsque ce qui est produit finit par être utilisé, détruit, brûlé, ou se décompose.Pour la durée de séquestration du carbone, "tout va dépendre de l'utilisation de la plante qui va être récoltée" pour Alain Karsenty, économiste au CIRAD. Cela peut varier de quelques années ou moins pour du bois de chauffage, du papier, des vêtements en fibres de chanvre, de l'huile de chanvre, ou de la litière animale en copeaux de chanvre, qui vont être consommés rapidement.Mais la séquestration peut aller jusqu’à plusieurs dizaines d'années, pour des domaines où les produits restent en place jusqu'à 80 ou 90 ans : une charpente en bois, de la menuiserie, ou pour de l'isolation et du béton végétal en chanvre. Le chanvre, comme le bois, peut donc avoir un bilan positif en émissions d'oxygène pendant des années ou des décennies, et il y a "peu de cultures annuelles qui peuvent se targuer de continuer à stocker [du carbone] pendant 30, 40 ans, alors que le blé va être consommé tout de suite" a expliqué Alain Karsenty à l'AFP."Si on regarde uniquement la question du carbone, il faut maintenir les écosystèmes qui ont le plus de stock carbone, les vieilles forêts, les tourbières. Il faut conserver ces forêts, planter, ou favoriser la régénération naturelle" explique Alain Karsenty.Et les forêts ont bien d'autres intérêts. "Nous avons besoin des forêts pour d'autres raisons : elles nettoient l'eau, elles fournissent des habitats pour les plantes et les animaux, elles fournissent de l'ombre", affirme Scott Denning, climatologue et professeur de sciences atmosphériques à la Colorado State University. La déforestation n'est donc pas une solution, pour toutes ces raisons : "il est ridicule de couper des arbres pour faire de l'agriculture", conclut le chercheur.Le papier du chanvre est recyclable huit fois ? C'est une confusionCette affirmation sur la recyclabilité du papier du chanvre est une confusion, selon Estelle Delangle, responsable de projet au pôle européen du chanvre. "Le papier chanvre ne se recycle pas vraiment, car ses deux principales utilisations sont le papier à cigarettes et les billets de banque", explique-t-elle à l'AFP. Mais la pâte à papier de chanvre, non recyclée, peut bien être utilisée pour renforcer d'autres papiers recyclés. Par ailleurs, le chanvre est aussi utilisé dans l'industrie automobile pour alléger des composants en plastiques. Ces pièces sont bien recyclables "huit fois sans perte de performance", selon Estelle Delangle.Le chanvre pousserait en quatre mois, et l'arbre en 20 à 50 ans ? Plutôt vraiC'est bien vrai, selon le chercheur Henri Blandinières et la responsable de projet au pôle européen du chanvre Estelle Delangle. En fonction de la qualité des conditions de croissance et des semis, le chanvre peut pousser en quatre mois si les conditions sont favorables, avec une moyenne plutôt autour de cinq à six mois, selon Estelle Delangle.La croissance d'une forêt est bien comptée sur un cycle de 30, 40 ou 50 ans selon le chercheur Jean-Pierre Sarthou, et peut évidemment rester sur pied beaucoup plus longtemps avant de mourir, si elle n'est pas exploitée.La fleur de chanvre, un véritable "piège à radiations" ? InfondéLes agronomes et scientifiques interrogés par l'AFP ont affirmé n'avoir jamais entendu parler de cette allégation. Elle pourrait faire référence à un processus appelé la "phytoremédiation" ou "phytoréhabilitation".La technique constitue à faire pousser des plantes dites "hyperaccumulatrices", qui stockent en grandes quantités des polluants comme les métaux lourds via leurs racines et leurs feuilles, et permettent de contribuer au nettoyage des sols de sites pollués. Le chanvre, le tournesol, ou le colza, sont seulement quelques exemples des 500 plantes hyperaccumulatrices, pouvant être utilisées pour le traitement de nombreux types de pollutions. Un champ de chanvre, qui peut être utilisé sous forme d'huile pour les cosmétiques, de graines pour l'alimentation et de fibres pour les textiles et la construction, à Saint-Agnet, dans le sud-ouest de la France, le 11 juillet 2022. ( AFP / Gaizka Iroz)L'utilisation de la phytoremédiation pour décontaminer des sols proches d'accidents nucléaires, comme les alentours de la centrale de Fukushima, a été évoquée de manière théorique, mais n'a jamais été testée ni mise en place.Le processus est évoqué par exemple dans cet article, publié en 2003 dans la revue "Plant and Soil" par Slavik Dushenkov, scientifique à Rutgers, l'université du New Jersey. Dans ce cas, les plantes seraient récoltées, séchées, incinérées dans des installations spécialisées, puis les cendres seraient traitées comme des déchets nucléaires.Le chanvre peut être cultivé partout dans le monde, nécessite très peu d'eau, et n'a pas besoin de pesticides ? Vrai, en théoriePour le premier point, Estelle Delangle le confirme, "le chanvre peut être cultivé partout dans le monde, oui, techniquement, mais il fera pas les mêmes rendements partout". Concernant l'irrigation, en parlant bien du chanvre en plein champ, le chanvre industriel, il ne nécessite pas ou peu d'irrigation, en raison de "son système racinaire profond", explique Estelle Delangle.Mais ses grandes racines pouvant aller jusqu'à deux à trois mètres de profondeur, et son système racinaire profond allant chercher les nutriments loin dans le sol, nécessitent de bonnes conditions pour se développer, selon Henri Blandinières."Cela va dépendre en majorité du type de sols sur lesquels va être cultivée la culture", rappelle le chercheur, précisant qu'"il faut avoir accès à des réserves hydriques profondes, et développer des caractères de tolérance au stress hydrique". La qualité du sol et la gestion de l'irrigation peuvent donc limiter le développement du chanvre, et l'empêcher de profiter de ses caractéristiques biologiques. Champ de betteraves pendant l'irrigation par l'eau en plein soleil, près de Saint-Georges-sur-Eure, dans le centre de la France, le 13 août 2022 ( AFP / Jean-François Monier)Enfin, les insecticides et pesticides sont effectivement peu ou pas utilisés dans la culture du chanvre, plante robuste et résistante aux insectes. La croissance très forte de la plante étouffe aussi les mauvaises herbes, enlevant la nécessité de désherber avec des herbicides comme avec d'autres cultures."Le chanvre est connu comme une culture qui n'a pas besoin de produits phytosanitaires, une culture bio" explique l'agriculteur et chercheur Jean-Pierre Sarthou. "Mais il a besoin d'engrais, d'azote : ça peut être du fumier, donc des matières organiques d'un agriculteur qui a des animaux, en restant en bio (...) ou des engrais azotés de synthèse et pour les fabriquer, on a besoin de beaucoup d'énergie, qui vient du pétrole".L'azote apporte aux plantes des molécules minérales, normalement produites par la transformation de l'humus présent dans le sol. Mais en l'absence d'un sol très riche en humus, il faut apporter de l'engrais, organique ou azoté. Dans le cas du chanvre, la culture a besoin d'une quantité d'azote "deux fois moins importante" que pour le blé ou le colza, selon Estelle Delangle, responsable de projet au pôle européen du chanvre. Quantité d'engrais azotés utilisés par hectare de terres cultivées dans le monde, par pays en 2019 ( AFP / Valentin RAKOVSKY, Laurence SAUBADU)Les propriétés du chanvre permettent d'améliorer la qualité des sols, s'il est intégré à un système de rotation de culture, dans le but d'améliorer la résilience du système de l'agriculteur, pour Henri Blandinières, chercheur agronome."Le chanvre est aussi bénéfique sur la qualité des sols, ça a une capacité à structurer les sols et à les enrichir en déchets organiques" explique le chercheur, soulignant la facilité de culture de la plante poussant rapidement, et ajoutant que "l'intégration du chanvre dans un système de rotation culturel, permet de limiter le développement du cycle des pathogènes qu’on peut retrouver sur les grandes cultures".Si les textiles à base de chanvre se répandent, l'industrie des pesticides pourrait complètement disparaître ? FauxMême si les textiles à base de chanvre se développent fortement, permettant de diminuer la culture du coton et réduire l'utilisation des pesticides, le chanvre ne peut pas remplacer toutes les plantes cultivées."Il y a beaucoup de cultures alimentaires que le chanvre ne peut pas remplacer" explique Henri Blandinières, chercheur agronome. "L'usage global des pesticides ne peut pas disparaître, quel que soit le niveau de développement de l'industrie du chanvre".Le chanvre est utilisé traditionnellement pour le papier, l'alimentation animale, le paillage horticole, les litières pour chevaux ; et dans une moindre mesure dans des marchés nouveaux à plus forte valeur ajoutée : la construction, le textile, et dans le secteur automobile. Le papier représente 50% des débouchés de la filière chanvre. Le secteur de la construction, lui, génère 30% du chiffre d'affaires de la filière."Il y a une grosse volonté au niveau France de démarrer une filière chanvre textile 100% française", selon Estelle Delangle, responsable de projet au pôle européen du chanvre, "soit en utilisant les fibres courtes pour les mélanger avec d'autres fibres, pour faire des jeans, des chemises ; soit avec du chanvre équivalent lin, pour des utilisations haut de gamme, mais qui restent artisanales et à l'échelle du prototype". Cette photo prise le 27 juin 2022 montre une bobine de fil fabriquée à partir de fibres de chanvre dans l'entreprise "Les Chanvres de l'Atlantique" qui utilise le chanvre sous forme d'huile pour les cosmétiques, de graines pour l'alimentation et de fibres pour le textile et la construction à Saint-Geours-de-Maremne, dans le sud-ouest de la France. ( AFP / Gaizka Iroz)Les premiers jeans ont été fabriqués à partir de chanvre et le mot "canvas" est le nom des produits à base de chanvre ? FauxL'histoire du jean est lié à l'histoire du coton en Europe. Les "futaines", grandes étoffes de coton seul ou mélangé à du lin, de la laine ou du chanvre, étaient produites en grandes quantités en l'Italie du Nord, puis étaient exportées vers l'Angleterre. Selon l'Encyclopédie Universalis, "elles sont surnommées jean ou jeane dans les registres du port de Londres". "Dès l'implantation de l'industrie du coton dans le nord-est des États-Unis à la fin du XVIIIe et au début du XIXe siècle, le jean et le denim font partie des étoffes couramment fabriquées" selon l'Encyclopédie Universalis. Les tissus étant très résistants, ils sont utilisés pour les vêtements de travail. C'est au nord-est des Etats-Unis, en Nouvelle-Angleterre, dans la manufacture d'Amoskeag, que Levi Strauss achète le denim de ses pantalons de travail en 1860 et commence à commercialiser les premiers "jeans".On peut donc affirmer que ces derniers n'ont pas été fabriqués à partir de chanvre uniquement, mais que le chanvre a pu être utilisé mélangé avec du coton et du lin pour la confection des "futaines", étoffes à l'origine du développement des tissus de jean et de denim.Le mot "canvas" n'est quant à lui pas exactement le nom des produits à base de chanvre. Il fait probablement référence au mot "canevas", qui, en ancien français, veut dire "fait de chanvre", et peut définir une "très grosse toile écrue, de lin, de chanvre ou de fil d'étoupe, qui sert à confectionner les torchons" selon le dictionnaire Larousse. C'est de ce mot que vient le mot actuel "canevas", signifiant notamment "tissu de coton ou mélange de coton".29 août 2022 Ajout de quatre paragraphes pour préciser les variétés utilisées pour la culture du chanvre et la correction du taux de THC autorisé par la réglementation française et européenne.
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