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Une publication partagée plus d'un millier de fois en moins d'une semaine sur Facebook entend dénoncer le "mensonge" des autorités vantant un “vaccin salvateur” contre le nouveau coronavirus. Ce texte d’un psychanalyste belge compare en outre le Covid-19 à la grippe saisonnière, sous-estimant sa dangerosité. En réalité, selon les études et spécialistes consultés par l'AFP, le Covid-19 entraîne davantage de cas sévères et au moins trois fois plus de décès que la grippe. Et si le vaccin est présenté comme indispensable pour faire refluer l’épidémie, l’OMS avait déjà prévenu il y a des mois qu’il ne ferait sans doute pas disparaître le virus. "D'un mensonge à une vérité révélée", c'est le titre de cet "article" relayé plusieurs milliers de fois sur Facebook depuis le 15 janvier 2021 et qui prétend révéler un "énorme mensonge de propagande" autour du vaccin et du Covid-19. Ce texte cite plusieurs déclarations de scientifiques de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) sorties de leur contexte et s’appuie sur ces extraits pour mettre en cause ce qu’il qualifie de "propagande" officielle. Cette "propagande" ou "narratif officiel" consisterait à présenter le vaccin comme libérateur du Covid-19, alors que plusieurs membres de l'OMS ont - effectivement - récemment déclaré qu'il ne disparaîtrait pas.L'auteur compare également le Covid-19 et la grippe saisonnière, affirmant qu'ils présentent les mêmes symptômes et doivent être traités de la même façon. Capture d'écran réalisée sur Facebook le 22/01/2021Ce texte a été rédigé par Michel Rosenzweig, un psychanalyste belge qui a notamment publié des articles dans le magazine Nexus, magazine se présentant comme "indépendant" mais épinglé par le site Conspiracy Watch comme appartenant à la mouvance conspirationniste notamment pour la "forte occurrence d’articles condamnant les 'élites mondialisées'". Michel Rosenzweig est également intervenu dans la production audiovisuelle Hold Up, truffée de fausses informations vérifiées par l'AFP. Le coronavirus est bien plus grave que la grippe "Pour les personnes qui ont encore un temps de cerveau disponible à l’exercice de leur raison et qui n’ont pas encore été hypnotisées par l’endoctrinement du narratif officiel", écrit Michel Rosenzweig, "il ne leur aura pas échappé qu’en fait, le coronavirus est bel et bien apparenté à une affection virale respiratoire connue sous le nom de syndrome respiratoire aigu sévère (SARS) appelée SARS-COV 2 pour l’occasion et qu’à ce titre il convient de le traiter comme une autre affection respiratoire très similaire dans sa symptomatologie, très connue et saisonnière, celle véhiculée par une autre famille de viridés, les virus de type infuenza, bref, la...grippe saisonnière." Les virus du Covid-19 et de la grippe présentent des symptômes similaires, comme l'explique l'OMS sur son site : le tableau clinique de ces deux maladies est "marqué par des manifestations respiratoires. La symptomatologie est très variée : tandis que certains sujets sont asymptomatiques ou ont des symptômes bénins, d’autres présentent des manifestations graves voire décèdent". En juillet 2020, la Fondation américaine pour l’asthme et les allergies a publié un tableau, basé sur les données de l’OMS et des CDC (Centers for Disease Control and Prevention, qui forment l'agence de santé publique américaine), afin d’aider les personnes à différencier la grippe, du Covid-19, des allergies et de l'asthme. Capture d'écran réalisée le 20/01/2021 sur le site de la Fondation américaine pour l'Asthme et les Allergies Néanmoins, si certains de leurs symptômes et de leurs infections sont comparables, le virus Sars-Cov-2 entraîne davantage de cas sévères et de décès que celui de la grippe, ce qui explique le traitement médical et politique particulier de l'épidémie de Covid-19. Le 17 décembre 2020, une étude de l'Inserm et du CHU de Dijon publiée dans The Lancet Respiratory Medicine et relayée dans cette dépêche a comparé les données de 130 000 patients hospitalisés pour le Covid-19 ou la grippe saisonnière. Cette étude a notamment démontré que le taux de mortalité parmi les patients hospitalisés après avoir contracté le Covid-19 est trois fois plus élevé que parmi ceux hospitalisés à cause de la grippe saisonnière. En outre, une plus grande proportion de patients Covid-19 a souffert d’une maladie grave nécessitant des soins intensifs et près de deux fois plus de personnes ont été hospitalisées pour Covid-19 au plus fort de la pandémie par rapport aux hospitalisations au plus fort de la saison grippale 2018/2019."Ce n'est pas la même maladie. La grippe peut donner des atteintes pulmonaires mais c'est plus fréquent dans les cas de Covid", a expliqué à l'AFP le président de la Belgian Respiratory Society (BeRS) le 19 janvier 2021, "le Covid-19 n'est pas une nouvelle grippe - c'est une autre maladie qui est grave et qui tue pas mal de gens". "Le Covid est différent de la grippe car il rend rarement malades les jeunes, mais s'attaque grièvement aux personnes âgées, même sans comorbidités", a précisé à l'AFP Dirk Van Renterghem, membre de l'Union professionnelle des médecins belges spécialistes en pneumologie. Interrogé le 19 janvier, il a expliqué que le Covid-19 entraîne également plus souvent des formes graves de la maladie, "il est plus souvent sévère, sinon mortel ou entraîne des invalidité chez un plus grand nombre de personnes". En outre, le Covid-19 peut également prendre des formes graves chez des personnes en moyenne plus jeunes que dans le cas de la grippe, comme l'expliquait dans ce précédent article Sibylle Bernard-Stoecklin, épidémiologiste à Santé Publique France.Il est également bien plus contagieux et les personnes infectées restent contagieuses plus longtemps, comme l'expliquent les CDC (Centres de prévention et de lutte contre les maladies) américains sur leur site : "Le Covid-19 semble se propager plus facilement que la grippe et provoque des maladies plus graves chez certaines personnes". On ne peut donc pas traiter les deux épidémies de la même façon. Selon les données de l'Institut de santé publique belge Sciensano publiées le 15 janvier 2021, les deux vagues de l'épidémie de Covid-19 et la canicule d'août ont provoqué en 2020 une augmentation de 16% du nombre de décès attendus (17 966 décès en plus) pour la Belgique. "Lors des années 2015 à 2019 nous avons également vécu une surmortalité suite aux canicules et à la grippe, mais avec un pourcentage moyen de 2 % par an. La surmortalité était beaucoup plus modérée", précise Sciensano. En France, l'année 2020 a connu une surmortalité de 9% par rapport aux années 2018 et 2019. Évaluation de la mortalité en 2020 en Belgique par Sciensano, basée sur les chiffres de Be-MOMO (Belgian Mortality Monitoring) . En jaune, la mortalité due au Covid-19 (cas confirmés et probables), en vert tous les autres décès. La ligne en pointillé représente l'intervalle de prédiction de la mortalité toutes causes confondues. Il est possible de diagnostiquer de façon précise le Covid-19 "Le Covid a remplacé la grippe puisque l’un et l’autre se confondent aisément sans diagnostic différentiel précis et approprié ce qui donne au total un nombre élevé de décès 'par' et 'du' Covid", affirme Michel Rosenzweig. Si certains symptômes sont communs entre grippe et Covid-19, comme vu plus haut, les tests RT-PCR (Reverse Transcription - Polymerase Chain Reaction) - ainsi que certaines spécificités dans le diagnostic permettent clairement de les distinguer. "Le Covid-19 présente des symptômes et des signes particuliers", a indiqué à l'AFP le pneumologue Dirk Van Renterghem : "la perte de l'odeur et du goût par exemple, ainsi que des signes sur une radio CT (un appareil à rayons X couplé à un ordinateur, NDLR) qui sont beaucoup plus marquants que dans les cas de grippe". "Il y a une image typique au niveau des poumons du Covid-19 qui prouve aux médecins que le patient est atteint du Covid", a confirmé à l'AFP le professeur en santé publique à l'Université libre de Bruxelles Yves Coppieters, interrogé le 18 janvier 2021. De plus, les tests RT-PCR permettent via un prélèvement nasopharyngé de déterminer si un patient est porteur ou non du virus à l'instant T, en amplifiant le matériel génétique du coronavirus dans l’échantillon pour confirmer ou pas sa présence. Ces tests détectent donc de façon précise si un patient est atteint du Covid-19 ou non, comme l'expliquait l'AFP dans un précédent article de vérification. Ces tests cherchent "des régions du génome qui sont spécifiques" à ce virus, expliquait ainsi le 8 septembre 2020 Vincent Enouf, directeur adjoint du Centre national de référence des virus des infections respiratoires de l'Institut Pasteur. La capacité d'un test à bien identifier un virus en particulier et à ne pas le confondre avec un autre pathogène s'appelle la spécificité. Actuellement, "on estime que la spécificité des RT-PCR est de l'ordre de 99%", déclarait dans le même article Cédric Carbonneil, chef du service d’évaluation des actes professionnels de la Haute autorité de Santé (HAS), "ce qui rend rarissime les résultats "faux positifs"."Les tests PCR amplifient le matériel génétique que vous voulez. On en utilise notamment pour détecter les MST, par exemple. Donc bien sûr que dans les tests PCR utilisés pour le dépistage du Covid détectent bien le matériel génétique du Covid 19 - ils sont programmés pour ça", a confirmé à l'AFP Yves Coppieters. En juin 2020, le Conseil supérieur de la santé belge expliquait dans un avis l'utilité du CT-Scan couplé à un test PCR par les hôpitaux pour trier les patients hospitalisés "à des fins de répartition entre zones hospitalières Covid – non-Covid". Il estimait dans le même avis que l'infection due à la maladie du coronavirus entraîne "une mortalité estimée 7 à 10 fois supérieure à celle de la grippe". Le vaccin est utile, même si le virus ne disparaît pas "Le vaccin, le vaccin le vaccin, rien que le vaccin, tout pour le vaccin, puisqu’on vous le répète tous les jours de manière écoeurante pour bien vous persuader qu’après avoir été dociles et compliants pendant une année bientôt, la vie va pouvoir reprendre, comme avant ou presque mais uniquement pour les personnes vaccinées, quand-même", s'indigne Michel Rosenzweig, qui entend dénoncer un "énorme mensonge de propagande que l’organisation mondiale de la santé et le groupe pharmaceutique Moderna viennent d’exposer à la face du monde". Il s'appuie pour illustrer ce prétendu "mensonge" sur plusieurs déclarations de scientifiques de l'OMS, tenues au cours d'une conférence de presse le 28 décembre 2020 et dont le transcript en anglais est disponible ici. Cependant, Michel Rosenzweig a omis de remettre ces déclarations dans leur contexte et de préciser que les responsables de l'OMS ont souligné une nouvelle fois l'importance du vaccin pour lutter contre l'épidémie, tout en restant prudents quant à son efficacité. Dans cette conférence de presse, la responsable scientifique de l'OMS Souma Swaminathan expliquait en effet que les données disponibles sur le vaccin ne permettaient pas encore de savoir si une personne vaccinée - et donc elle-même protégée - pouvait rester un vecteur possible de la maladie: "Pour l'instant, je ne pense pas que nous disposions de données sur aucun des vaccins pour être sûrs qu'ils empêcheront les gens de contracter l'infection et donc de la transmettre". Par prudence, avait-t-elle déclaré, "nous devons partir du principe que les personnes qui ont été vaccinées doivent également prendre les mêmes précautions jusqu'à ce qu'il y ait un certain niveau d'immunité collective, bien sûr, qui a été construit dans la population". David Heymann, président du groupe consultatif stratégique et technique de l'OMS sur les risques infectieux, indiquait dans la même conférence qu'"il semble que le destin du Coronavirus 2 du SRAS est de devenir endémique, comme l'ont été quatre autres coronavirus humains, et qu'il continuera à muter en se reproduisant dans les cellules humaines, en particulier dans les zones de transmission plus intense". Il ajoutait cependant : "Heureusement, nous disposons d'outils pour sauver des vies, et ceux-ci, combinés à une bonne politique de santé publique, comme nous l'avons souligné précédemment, nous permettront d'apprendre à vivre avec le COVID-19".Parmi ces outils, le vaccin permet de réduire le nombre de cas sévères du coronavirus et de morts, avait précisé Marc Ryan, directeur exécutif des urgences sanitaires. Le Covid-19 "restera une certaine menace, mais une menace de très faible niveau dans le contexte d'un programme de vaccination mondial efficace.""Nous l'avons vu avec la polio. Nous l'avons vu avec la rougeole (...) L'existence d'un vaccin, même à haute efficacité, ne garantit pas l'élimination ou l'éradication d'une maladie infectieuse", expliquait-t-il. Ces déclarations ne sont pas nouvelles. Depuis le début de la pandémie, l'OMS est restée prudente sur l'efficacité des vaccins pour éradiquer entièrement le coronavirus. Dans une conférence tenue le 13 mai 2020, l'Organisation avait déjà averti que le Covid-19 pourrait "ne jamais disparaître". Un membre du personnel de l'Hôpital universitaire de Bruxelles (UZ) reçoit une injection du vaccin Pfizer-BioNTech à Jette, le 19 janvier 2021. Les membres du personnel en contact avec des patients potentiellement infectés par le coronavirus sont les premiers à être vaccinés.(AFP / Hatim Kaghat)"Les vaccins protègent les vaccinés et provoquent un effet d'immunité de groupe, en ralentissant la transmission du virus", a expliqué à l'AFP Michel Bossens, gynécologue et membre du Conseil supérieur de la Santé, interrogé le 20 janvier 2021. "L’effet de groupe est surtout mesuré a posteriori, en observant l’évolution du nombre de malades à partir du début de la vaccination, dans les groupes des vaccinés et des non vaccinés". Cet effet de groupe, a-t-il expliqué par e-mail "a jusqu’à présent été observé pour tous les vaccins concernant les virus d’origine humaine. L’effet de groupe sera observable pour le SARS-CoV 2 dans quelques mois dans les pays les plus vaccinés (comme Israël). Pour des virus à pathologie lentes, tels que les HPV (papillomavirus, une infection sexuellement transmissible le plus souvent bénigne, NDLR) , il a fallu une dizaine d’années". "L'idée c'est de diminuer le nombre de cas sévères grâce à la vaccination", a confirmé à l'AFP Didier Cataldo. "On n'a pas non plus éradiqué la grippe, alors qu'il y a des vaccins. Mais on a réussi à diminuer sa mortalité". Le site du gouvernement belge d'information sur le coronavirus recommande "qu’au moins 70 % des Belges se fassent vacciner pour atteindre une efficacité vaccinale optimale dans la population et espérer qu’une immunité de groupe soit ainsi générée. L’immunité de groupe signifie qu’un groupe suffisamment important de personnes a développé une résistance au virus, rendant sa circulation difficile, voire impossible. De cette manière, le virus n’aura plus la possibilité de se propager en masse et de provoquer une grave épidémie avec les mesures de confinement qui l’accompagnent". Il indique cependant que, tant qu'une part suffisante de la population n'est pas vaccinée et que des personnes fragiles sont toujours exposées au virus, les mesures ne pourront pas être totalement levées. Capture d'écran réalisée sur le site info-coronavirus.be le 21/01/2021Récession mondiale "Le coronavirus mute, eh oui car c’est sa nature de muter en se répliquant grâce ou à cause des erreurs produites à chaque réplique et par conséquent, les vaccins devront s’adapter à un rythme encore inconnu mais probablement saisonnier", explique Michel Rosenzweig, qui poursuit : "un marché juteux en perspective et qui permettrait d’après le FMI qui ne perd pas le nord de doper la croissance de 9000 milliards de dollars d’ici...2025". Le Fonds monétaire international a en effet estimé mi-octobre 2020 que vacciner en masse la population mondiale contre le Covid-19 permettrait de doper la croissance de 9.000 milliards de dollars d'ici 2025. La présidente du FMI, Kristina Georgieva, a tenu ces propos lors d'une conférence de presse, à l'occasion de l'Assemblée annuelle du FMI le 14 octobre 2020, dont le transcript est disponible sur le site du FMI.Même si la vaccination permet une reprise d’activité, Kristina Georgieva a expliqué que son institution continuait à "prévoir la pire récession mondiale depuis la Grande Dépression", dans les années 30. Une situation qui "pourrait amputer d'environ 28.000 milliards de dollars la production mondiale au cours des cinq prochaines années". Projection de la croissance économique dans le monde en 2020 et en 2021. Source : Fonds Monétaire International (FMI)"La dette publique mondiale devrait atteindre un niveau record de 100 % du PIB en 2021. Cela s'explique en partie par le fait que les pays doivent augmenter leurs dépenses pour lutter contre la crise et assurer la reprise (...)", a-t-elle déclaré au cours de cette conférence. "Plus que jamais, nous avons besoin d'une coopération internationale forte - en particulier sur le développement et la distribution des vaccins. Des progrès plus rapides en termes de solutions médicales pourraient accélérer la reprise. Cela pourrait ajouter presque 9 000 milliards de dollars au revenu mondial d'ici 2025." Une idée qu'elle a également évoquée au cours d'une interview croisée avec Melinda Gates, le même jour. Kristalina Georgieva y déclare (à 14'13) à propos du vaccin : "Le FMI vient de calculer que si nous accélérons la distribution de vaccins et que tout le monde se fait vacciner le plus vite possible, nous pourrions accélérer la reprise. Nous allons générer presque 9 000 milliards de dollars de plus entre maintenant et 2025", déclare-t-elle. "9 000 milliards de dollars. Cela fait une énorme différence. Pour les pays pauvres et les pays riches, mais c'est particulièrement important pour les pays en développement. Nous voyons la pandémie accroître les divergences entre les riches et les pauvres, au sein des pays et entre les pays. Nous pouvons réduire cet écart."
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