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  • 2022-09-02 (xsd:date)
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  • Une inflation à 12%, deux fois supérieure aux chiffres de l'Insee ? Attention à ces affirmations (fr)
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  • "La réalité de l’inflation n’est pas à un chiffre mais bien deux : 12% !" : alors que l'Insee a fait état d'une hausse des prix au mois d'août de 5,8%, de nombreux internautes soutiennent que ce chiffre sous-évalue le phénomène. S'appuyant sur le titre d'une chronique du journaliste Eric Revel diffusée le 30 août, plusieurs posts affirment que l'inflation actuelle est ainsi "deux fois plus" importante que "les chiffres officiels". Mais les deux chiffres ne sont pas comparables, ont indiqué deux économistes et l'Insee à l'AFP. Le chiffre de 12%, qui provient d'une étude de la société d'analyse IRI France, est basé sur une quarantaine de produits de grande consommation alors que l'Insee prend en compte des milliers de prix sur l'ensemble des postes de dépense des ménages.En août, les prix en France ont augmenté de 5,8% par rapport à août 2021, selon les chiffres (encore provisoires) de l'Insee publiés le 31 août. Une inflation qui continue de faire souffrir les ménages, même si elle marque un léger ralentissement après la hausse de +6,1% en juillet par rapport à juillet 2021.Mais selon plusieurs tweets partagés plusieurs milliers de fois (ici ou ici) en quelques jours, ce chiffre sous-évaluerait encore la force de l'inflation, qui serait de 12%, "soit deux fois plus que les chiffres officiels".Un chiffre issu d'une étude sur une quarantaine de produits de grande consommationCes tweets s'appuient sur le titre d'une chronique économique du journaliste Eric Revel sur Sud Radio datée du 30 août et titrée : "La réalité de l'inflation n'est pas à un chiffre mais bien deux : 12% !". Capture d'écran de la chaîne Youtube de Sud Radio (réalisée le 2 septembre 2022)Qu'a dit exactement Eric Revel dans son intervention? Pour montrer la différence entre "le calcul officiel de l'Insee et (...) ce que les Français constatent dans leur vie quotidienne", Eric Revel s'est appuyé sur une étude réalisée par IRI et commandée par Le Monde, qui a mesuré l'évolution des prix sur un an d'une quarantaine de produits de grande consommation, essentiellement des produits alimentaires. Pâtes, riz, steaks hachés: l'analyse pointe au total une augmentation de 12% (11,7% exactement) sur le mois d'août.D'où cette conclusion du chroniqueur : "La réalité que vivent les Français, c'est une inflation à deux chiffres (...) et non pas le chiffre officiel de 6%"."L'Insee mesure chaque mois plus de 100.000 prix"Mais la "réalité" vécue par les Français peut-elle être calculée en s'appuyant sur une quarantaine de produits de grande consommation ? Non, aux yeux du professeur d'économie à l'Université Paris-Cité Philippe Moati, interrogé par l'AFP le 1er septembre. "Je ne doute pas de la réalité du chiffre [d'IRI]. Mais on ne peut pas affirmer que les chiffres sur l’inflation sont faux à partir de 40 produits".Un panel aussi jugé trop réduit par l'Insee lui-même. "L’Insee mesure chaque mois plus de 100.000 prix", explique Sébastien Faivre, chef de la division des prix à la consommation de l'Insee interrogé par l'AFP le 1er septembre. "Il me paraît donc difficile de réduire la consommation d’une personne à 40 produits"."40 produits ne peuvent pas couvrir raisonnablement l'ensemble de la diversité des comportements de consommation et toute la dépense d'un ménage sur l'alimentation", pointe-t-il. "L'Insee vise aussi à une représentativité de l'ensemble de la consommation", poursuit-il.Contacté par l'AFP, IRI France confirme aussi que "l’objet de ce panier n’avait pas vocation à donner un autre chiffre sur l’inflation en France de celui communiqué mensuellement par notre institut ou par l’Insee", comme l'a expliqué Emily Mayer, experte des produits de grandes consommation au sein de l'Institut IRI à l'AFP. "L'objectif est de montrer que sur un panier de produits du quotidien, l’inflation est plutôt de 12%. Mais ce chiffre n’a d’autre réalité que ce panier de 38 produits". Par ailleurs, IRI effectue un suivi exhaustif des produits de grande consommation globalement similaire à celui de l'Insee, qui donne une inflation moyenne de 8,3% sur l'alimentaire pour le mois d'août sur 225 catégories de produits, plus proche du chiffre de l'Insee (7,7%). "C’est ce chiffre là qui fait foi. Et le panier est juste une illustration concrète de ce que ça peut donner sur un panier du quotidien qui comporte 38 produits", indique Emily Mayer. "[Eric Revel] a raison de dire que ces produits de grande consommation sont des produits du quotidien", poursuit Philippe Moati. "Mais combien pèsent réellement ces produits dans le budget des Français ? Chaque catégorie de produit est en réalité pondérée dans l’indice en fonction de son poids dans la consommation des ménages".Car l'alimentation ne représente qu'une partie dans le calcul de l'inflation."L’alimentation dans l’indicateur de l’Insee ne représente que 16,5%", complète Mathieu Plane, économiste à l'OFCE contacté par l'AFP. "Plus de 80% de notre consommation ne passe donc pas par l’alimentation - et l'alimentation ne se restreint pas à 40 produits. Remettre en cause le chiffre d’inflation de l'Insee sur cette base, c’est donc aller un peu vite en besogne".Une nuance reconnue par le chroniqueur lui-même sur Twitter, quelques heures après sa chronique. "Le panier de l’Insee est plus représentatif !", a-t-il écrit. Indice des prix à la consommation (glissement annuel en %) de janvier 2017 à août 2022 ( AFP / Sylvie HUSSON, Sabrina BLANCHARD, Vincent LEFAI)L'alimentation, moins de 20% des dépenses moyennes en FrancePour calculer l'inflation, aussi appelée Indice de prix à la consommation (IPC), l'Insee s'appuie sur l'évaluation d'une longue liste de produits et services, qui ne se limite pas à l'alimentation. "Le chiffre de 5,8% représente la hausse des prix sur l’ensemble des prix sur la consommation", explique Sébastien Faivre. "On ne mesure pas uniquement l’alimentation. On va aussi prendre en compte l’énergie, les services, l’habillement, les produits de santé, le tabac, etc. : on couvre l’ensemble du champ de la consommation", décrit-t-il, expliquant par ailleurs que chaque catégorie est pondérée proportionnellement au montant total des dépenses des consommateurs français, révisé chaque année selon l'évolution de la consommation.L'IPC de l'Insee est expliqué ici et plus en détail là sur son site internet."L'alimentation et l'énergie représentent seulement 25% des dépenses des consommateurs en moyenne", soulève ainsi Mathieu Plane, qui s'appuie sur la pondération utilisée par l'Insee pour représenter la part dans chaque poste de dépense. "L'inflation renvoie très vite au panier de la ménagère sur l'alimentation, alors qu'il représente moins de 20% de notre consommation globale". Inflation réelle ou ressentie : quelle "réalité" pour "les Français" ? Pourquoi l'alimentation ou l'énergie concentrent-ils dès lors l'attention, alors que leur part réelle dans la consommation des ménages s'avère plus limitée ? "L'augmentation de ce type de produit est très visible et a un impact psychologique très fort", explique Philippe Moati. "Beaucoup de Français se fondent sur l'analyse de quelques produits du quotidien, ce qui provoque un effet de halo et pousse à généraliser".Le chiffre de 12% publié par IRI France a aussi le mérite de soulever l'hétérogénéité de la hausse des prix selon les produits. "Suivant les produits que l'on utilise pour le calcul, on peut observer des hausses extrêmement variées", reconnaît de son côté Sébastien Faivre. Par exemple, l'Insee estime l'inflation des produits alimentaires (hors produits frais) à 8,5% pour le mois d'août. Un chiffre qui ne reflète pas la hausse brutale du prix de certains produits, comme l'augmentation de plus de 10% du coût des produits à base de bœuf, ou de 17% pour les pâtes. "La pondération se fonde sur la structure moyenne du budget des Français. Mais selon qui vous êtes, votre structure de consommation ne correspond pas forcément à cette moyenne", précise Philippe Moati. "Si vous êtes un gros rouleur, que vous fumez beaucoup et mangez beaucoup de viande, votre indice personnel peut être actuellement très au-dessus de la moyenne". Autre facteur d'hétérogénéité : la gamme des produits. "La hausse des prix a été très inégale entre les différentes marques : les marques de premiers prix ont par exemple eu plus de mal à absorber la hausse des coûts des matières premières", met en avant Sébastien Faivre. "Si ces produits sont surreprésentés dans la composition du panier, il peut y avoir un effet sur le calcul de l'inflation", poursuit le spécialiste de l'Insee. D'où un ressenti particulièrement fort pour certaines catégories de population, comme les classes les plus modestes, affectées par la hausse du coût des marques de premier prix : en juillet, les 20% des consommateurs les plus modestes ont ainsi subi une inflation hors tabac légèrement supérieure à la moyenne, de l'ordre de 6,4%, contre 6,2% en moyenne.Mais malgré cette hétérogénéité, les économistes notent des ordres de grandeur respectés, quels que soient les profils de consommation, qui n'atteignent pas les deux chiffres.En France, une faible inflation par rapport au reste de la zone EuroEn matière de hausse des prix, la France résiste mieux que ses voisins de la zone Euro (9,1% d'inflation en moyenne dans la zone Euro en août sur un an), notamment grâce aux mesures prises par le gouvernement, du bouclier tarifaire contre la flambée des prix de l'énergie aux ristournes sur les prix du carburant. Au mois d'août, l'Insee a même noté un ralentissement de la hausse des prix.Une baisse attribuée "au ralentissement des prix de l'énergie", a expliqué l'Insee dans son communiqué, tandis que la hausse des prix des produits manufacturés et de l'alimentation s'accélère et que celle des prix des services progresse au même rythme qu'en juillet. En août, les prix de l'énergie ont tout de même bondi de 22,2%, mais de manière moins forte qu'en juillet, lorsque la hausse avait atteint 28,5%."C'est plutôt une bonne nouvelle qu'on ait eu une inflation plus faible sur le dernier mois mais on considère qu'on devrait avoir passé le pic de l'inflation plutôt au cours de l'année 2023", a-déclaré pour sa part la Première ministre Elisabeth Borne sur France Inter le 1er septembre.Interrogé sur le même sujet par le quotidien les Echos, le ministre de l'Economie et des Finances Bruno Le Maire a déclaré qu'on ne pouvait pas affirmer que le pic était passé et qu'il n'anticipait "pas de recul structurel de l'inflation avant 2023". Indicateurs économiques clés impactés par la guerre en Ukraine, débutée le 24 février 2022 ( AFP / Sophie STUBER, Anibal MAIZ CACERES) (fr)
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