?:reviewBody
|
-
Une publication partagée plusieurs centaines de fois sur Facebook depuis début février affirme que des élèves ont été testés de force au Covid-19 dans une école suisse. C'est faux : les élèves ont pu refuser ce test de dépistage. L'internaute affirme par ailleurs, à tort, qu’il est possible d’invoquer le "code de Nuremberg" pour refuser un test de diagnostic, comme l'a expliqué une avocate à l'AFP. "ALERTE : En suisse, dans le canton de Lucerne des tests nasals sur les enfants du primaire (dès la première) ont été effectué sans le consentement des parents", s'indigne cet internaute sur Facebook. Il appelle les parents à "envoyer une lettre à la direction de l’école de vos enfants en spécifiant que vous refusez tout acte médical et test sur votre enfant (Code de Nuremberg)". Capture d'écran réalisée le 09/02/2021 sur Facebook L'auteur de cette publication conseille aux parents qui pensent "aussi" que ces tests "sont inutiles et peuvent être potentiellement dangereux si ils sont mal faits" de s’y opposer. Il affirme enfin que "selon des données scientifiques bien connues aujourd’hui les enfants ne sont ni vecteurs ni contaminants".Dans plusieurs villes suisses, des écoles ont été fermées et des dépistages à grande échelle ont été organisés après la découverte de plusieurs cas de Covid-19, a rapporté la RTS le 29 janvier 2021. Cependant, à l'école évoquée par cet internaute, aucun élève ni membre du personnel n'a été forcé de réaliser un test de diagnostic. Comme l'a expliqué une avocate suisse à l'AFP, l'obligation de réaliser un test ne va pas, en soi, à l'encontre des principes du code de Nuremberg, élaboré après la Seconde Guerre mondiale pour encadrer toute expérimentation médicale sur des humains. Enfin, les tests de diagnostic du Covid-19, comme les tests PCR ou antigéniques, permettent d'identifier les personnes qui sont porteuses du virus. Ils ne sont pas dangereux, comme l'ont expliqué à plusieurs reprises des experts à l'AFP. Le canton de Lucerne dément avoir forcé quiconque à réaliser un test La publication ne dit pas le nom de l'école qu'elle évoque, mais des internautes ont partagé dans les commentaires des documents du canton de Lucerne et de l'école Maihof, dans la ville de Lucerne, chef-lieu du canton du même nom. Le document émis par l'école de Maihof décrit la campagne de dépistage qui a eu lieu après la découverte de cas de virus mutants du Covid-19. Il est indiqué que le médecin du canton et le service de santé local ont organisé des tests pour tous les élèves et enseignants qui étaient à l'école cette semaine-là. "Le test est obligatoire", indique le document. Document signé par la direction de l'école Maihof et partagé en commentaires par les internautes . Capture d'écran réalisée le 09/02/2021 sur FacebookUn autre document, également partagé par les internautes, est signé par l'Office du médecin cantonal, responsable des questions médicales concernant la santé publique, et par le département de la santé du canton de Lucerne. Il indique la date de la campagne de test, le 29 janvier 2021. S'il est écrit (dans le point 4.d) que "tous les professeurs et les étudiants sont obligés de se faire tester avec des tests rapides (antigéniques, NDLR)", il est toutefois précisé que "si vous ne souhaitez pas être testé, vous devez vous mettre en quarantaine". Il est donc possible de refuser que son enfant soit testé à l’école et de le garder en quarantaine à domicile. Une partie d'un document signé par le canton de Lucerne et partagé en commentaires par les internautes . Capture d'écran réalisée le 09/02/2021 sur Facebook"Dans le cas de l'examen à grande échelle à l'école Maihof de la ville de Lucerne, il y avait une obligation de base d'être testé, mais la possibilité de renoncer à cette obligation a été laissée ouverte", ont indiqué à l'AFP les autorités cantonales de Lucerne, par la voix du médecin cantonal Roger Harstall. Ces personnes ont dû alors s'isoler et ont été invitées à se rendre chez leur médecin de famille pour faire un test, a-t-il précisé par e-mail, le 4 février 2021. Personne n'a donc été contraint de réaliser ce test, selon les autorités cantonales, qui l'ont rappelé dans un communiqué de presse publié le 1er février. L'AFP a également contacté la direction de l'école Maihof, qui a confirmé par mail le 9 février 2021 que "les enfants n'ont pas été forcés à faire le test. Il y avait également la possibilité de ne pas faire le test et de se mettre en quarantaine pendant 10 jours. Certains l'ont fait".Quant à l'accusation de l'internaute, qui affirme que "les personnes qui ont effectué les tests n'étaient pas expérimentées", elle est également fausse selon Roger Harstall : "les tests ont été effectués sur place par du personnel médical formé (médecins, pharmaciens, infirmiers)". Le code de Nuremberg ne permet pas de refuser un test de diagnostic du Covid-19 "Si vous aussi vous pensez que ces tests sont inutiles (...), vous pouvez envoyer une lettre à la direction de l’école de vos enfants en spécifiant que vous refusez tout acte médical et test sur votre enfant (Code Nuremberg)", affirme l'auteur de la publication. L'évocation du code de Nuremberg pour refuser un traitement médical, comme le vaccin, revient régulièrement sur les réseaux sociaux. L'AFP a déjà expliqué dans un précédent article, en anglais, que les principes du code de Nuremberg sont compatibles avec la vaccination. Le procès des vingt médecins et trois scientifiques impliqués dans des expérimentations médicales dans l’Allemagne nazie est le premier des douze procès organisés en zone d'occupation américaine à la fin de la guerre. Entre décembre et août 1947, le tribunal militaire de Nuremberg a jugé les expérimentations médicales, certaines particulièrement atroces, de médecins nazis dans les camps de concentration. A cette occasion, le tribunal a établi une liste de dix critères, regroupés dans le "code de Nuremberg", qui établissent les conditions auxquelles doivent satisfaire les expérimentations scientifiques pratiquées sur des humains.Le premier de ces critères, selon le code reproduit sur le site de l'hôpital Erasme (Bruxelles), indique que "le consentement volontaire du sujet humain est absolument essentiel". Le code de Nuremberg n'est cependant pas incompatible avec l'obligation de réaliser un test de diagnostic du Covid-19, a expliqué à l'AFP Samia Hurst, consultante du Conseil d’éthique clinique des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) et directrice de l’Institut Ethique, Histoire, Humanités à la faculté de médecine de Genève. "Le code de Nuremberg s'applique à la recherche clinique : lorsque des participants sont invités à aider la science à répondre à des questions scientifiques. Or, les tests dans les écoles ne sont pas réalisés dans le cadre d'une recherche clinique. Il s'agit de tests de screening (de dépistage, NDLR)", a-t-elle expliqué le 5 février 2021. Dans certaines situations, le consentement doit être demandé pour réaliser un test de dépistage. "Par exemple dans le cas d'initiatives de tests pour répondre à une question scientifique, comme : à quel point les enfants ramènent le coronavirus à la maison ?": Ici, le consentement parental est requis, mais cela ne s'applique pas à une campagne de dépistage menée dans le cadre d'une épidémie, selon la bioéthicienne. En Suisse, la loi fédérale sur les épidémies régit les dispositions sanitaires. L'article 32 prévoit que "Les autorités cantonales compétentes qui ont ordonné une surveillance médicale, une quarantaine, un isolement ou un examen médical peuvent pourvoir à leur exécution par voie de contrainte". En vertu de ce texte, les autorités cantonales peuvent obliger la population à effectuer un test. Mais obligatoire ne signifie pas forcé, a expliqué Samia Hurst, "Par exemple, le gouvernement a le droit de rendre la vaccination obligatoire, mais ça ne veut pas dire que quelqu'un qui ne veut pas être vacciné va être injecté de force. Ca veut dire qu'il aura une alternative contraignante", comme une quarantaine, une amende ou un accès restreint à certains lieux. Les tests de diagnostic du Covid-19 ne sont pas dangereux L’auteur estime que les tests "sont inutiles et peuvent être potentiellement dangereux si ils sont mal faits". Il affirme également que les tests PCR "sont des faux indicateurs" et "peuvent potentiellement créer une lésion". L'internaute semble confondre les tests RT-PCR, qui cherchent du matériel génétique du Sars-Cov-2, et les tests rapides antigéniques, qui cherchent des protéines virales. Plus rapides et plus simples, bien que moins fiables, les tests antigéniques sont ceux qui ont été utilisés à l'école Maihof. Les tests réalisés par prélèvement naso-pharyngé n'endommagent pas le cerveau, comme l'ont déjà expliqué plusieurs experts et médecins à l'AFP, ici et ici par exemple. Le test PCR "ne menace en aucun cas notre système nerveux", avait ainsi expliqué dans un précédent article John Dyer, immunologiste et professeur émérite à l'université de Nouvelles-Galles du Sud (Australie), joint le 10 juillet par l'AFP. ll est par ailleurs faux d'affirmer que ces tests sont inutiles, puisqu'ils détectent bien la présence du virus. Les enfants peuvent transmettre le Covid-19"Selon les données scientifiques bien connues aujourd’hui les enfants ne sont ni vecteurs ni contaminants", affirme enfin cet internaute. Les enfants sont-ils de gros transmetteurs du Covid-19? Si la science n'a toujours pas de réponse catégorique à cette question, très débattue car cruciale pour l'ouverture ou la fermeture des écoles, il est faux d'affirmer que les enfants ne sont pas contaminants. Les enfants "peuvent transmettre (le Covid-19) aux autres. Toutefois, cela semble arriver moins souvent que la transmission entre adultes", résumait une spécialiste de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), Maria Van Kerkhove, dans une vidéo consacrée à cette question, relayée dans cette dépêche du 4 novembre 2020. Sur son site, l'OMS indique que, les enfants étant généralement plus légèrement atteints par le virus et présentant moins de symptômes, "les cas peuvent parfois passer inaperçus. Il est important de noter que selon les premières données des études, le taux d’infection peut être plus élevé chez les adolescents que chez les enfants plus jeunes".La question de la fermeture des écoles est revenue au centre du débat avec l'apparition de nouveaux variants du coronavirus. Dans un rapport relayé dans cette dépêche, l'OMS notait que "les preuves de l'utilité de fermer les écoles pour réduire la transmission au sein de la communauté sont mitigées", tout en soulignant que la découverte à la fin de l'année de nouveaux variants plus contagieux "exige plus d'analyses par sexe et par âge pour mesurer si et comment l'impact de ces nouveaux variants sur les enfants pourrait différer" de celui de la souche originelle. Pour se protéger, l'OMS demande aux écoles de s'assurer d'avoir une bonne ventilation et des pratiques d'hygiène (lavage des mains et nettoyage des surfaces) et recommande aux enfants de plus de 12 ans et aux enseignants de porter un masque, lorsqu'"ils ne peuvent pas être assurés de se trouver à au moins 1 mètre de distance dans les zones à fort taux de transmission".Edit 09/02/2021 : ajoute citation de la direction de l'école Maihof et paragraphes sur les enfants et le virus
(fr)
|