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  • 2021-03-05 (xsd:date)
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  • Attention à cet "ultimatum" trompeur autour du Covid-19 (fr)
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  • Présenté comme un "ultimatum" porté par 1.500 professionnels de santé, un post massivement relayé sur Facebook somme l'exécutif de lever les restrictions sanitaires liées à la pandémie de Covid-19, qualifiée de "plus grande arnaque sanitaire du XXIe siècle". Mais cette publication colporte des affirmations très contestables, notamment sur la dangerosité du virus et l’ampleur de l’épidémie, et certains de ses signataires supposés ignorent tout de son existence.Son nom lui donne des allures de grande organisation internationale: le collectif auto-proclamé "United Health Professionnals" affirme avoir envoyé une lettre au président Emmanuel Macron et aux gouvernements de 30 pays pour exiger la "levée immédiate de toutes les mesures liberticides" liées au Covid-19 et la "fin de la vaccination considérée comme nocive, inutile et dangereuse". Capture d'écran de la page Facebook de United Health Professionnals.Cet "ultimatum" daté du 12 février, partagé plus de 4.400 fois sur Facebook et également relayé sur Twitter, prend la forme d’une longue missive qui compile des citations de praticiens opposés à la stratégie sanitaire déployée contre le Covid-19, et mêle informations exactes et mensongères pour dénoncer une épidémie "amplifiée, dramatisée et instrumentalisée par des malfaiteurs". Qui est derrière cette publication?Dans un court texte en anglais sur sa page Facebook, United Health Professionnals se présente comme un collectif de professionnels de santé de "différents pays" qui s'est donné pour mission d'alerter "gouvernements et citoyens sur les mesures très dangereuses et sans preuves prises pour lutter contre le Covid-19". Ce compte, créé le 14 juillet 2020 et suivi par plus de 2.100 abonnés, est géré par un seul administrateur, basé en France.Dans son "ultimatum", ce "collectif" dit représenter 1.500 professionnels de santé disséminés dans différents pays. Contactés jeudi 4 mars, plusieurs praticiens français présentés comme des membres de ce collectif assurent toutefois tout ignorer de cette structure et de cette initiative. "J'avais signé un texte sur les effets du confinement mais je n'ai jamais signé cet ultimatum et je ne fais pas partie de cette organisation", affirme ainsi à l'AFP le médecin généraliste Fabien Quedeville. Parmi la demi-douzaine de personnes contactées par l'AFP, seul le médecin Michel Angles a confirmé son affiliation à cette structure.Des affirmations contestables sur la létalité du virusPour contester le bien-fondé des restrictions sanitaires, la publication s’attache comme beaucoup d'autres sur Facebook, à minimiser la gravité et l'ampleur de l'épidémie, quitte à prendre quelques libertés avec les faits.Elle affirme notamment que le "taux de létalité" du Sars CoV-2 --soit le nombre de morts rapporté au nombre de personnes infectées-- serait faible et s’échelonnerait entre 0,13 et 0,15%.Comme l'avait déjà montré AFP Factuel en octobre, ce chiffre provient d'un calcul tronqué réalisé à partir de déclarations d’un responsable de l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Le 12 octobre dernier, l'agence onusienne avait elle-même contesté cette estimation en précisant que ce taux était en réalité environ quatre fois supérieur et "avoisinait 0,6%".Reprenant une affirmation qui a beaucoup circulé au début de l’épidémie, la publication assure également que la grippe saisonnière serait bien plus contagieuse que le Covid-19 et qu'il est donc infondé d'exiger des tests PCR négatifs comme le font certains pays à l'entrée sur leur territoire. Tests anti-Covid à la frontière franco-allemande le 2 mars. (AFP / Jean Christophe Verhaegen)"La grippe infecte bien plus de personnes par an avec un milliard de personnes infectées chaque année se propage plus rapidement et comporte plus de populations à risque et pourtant, aucun test n'est exigé pour les voyages", assure la publication.Cette affirmation manque de contexte. Dans une note publiée en novembre 2018, l'OMS a effectivement évalué à environ un milliard le nombre de cas de grippe recensés dans le monde chaque année mais elle précisait aussi que seuls 3 à 5 millions d'entre eux s'avéraient graves et que le nombre de décès annuels qui lui étaient imputables se situait entre 290.000 et 650.000. Depuis son apparition fin décembre 2019, l'épidémie de Covid affiche un bilan bien plus lourd de 2,56 millions de morts dans le monde, selon les derniers chiffres officiels compilés jeudi 4 mars par l'AFP.Le Covid se propage par ailleurs "plus facilement" que la grippe, avaient affirmé plusieurs experts ainsi que l'autorité de santé américaine des Centers for Disease Control dans l'article d’AFP Factuel déjà mentionné plus haut.L’épidémie "finie" et l’exemple tanzanienSelon l'"ultimatum" relayé sur Facebook, l'épidémie aurait dû être déclarée finie dès la fin de l'année dernière mais ne l'a pas été du fait de "malfaiteurs" qui veulent la faire "faire durer (...) le plus longtemps possible pour arriver à leurs fins"."En effet, en médecine, le seuil épidémique à partir duquel on déclare le commencement et la fin d'une épidémie se situe entre 150 et 200 cas pour 100.000 habitants", est-il écrit.Mais les chiffres officiels dessinent une tout autre réalité: selon Santé publique France, le taux d'incidence entre le 22 et le 28 février dernier était de 221 cas pour 100.000 habitants dans l'Hexagone, avec un pic de 563,2 dans les Bouches-du-Rhône, soit bien au-delà du seuil épidémique fixé à 173 cas pour 100.000 habitants. Capture d'écran du site de Santé publique France.La publication cite par ailleurs en exemple le chef d'Etat tanzanien qui a été l'un "des rares présidents à avoir compris", dès juin dernier, que l’épidémie de Covid était terminée dans son pays.Depuis plusieurs mois, le président John Magufuli clame certes que la Tanzanie a été "libérée" du Covid-19 grâce notamment aux prières mais il a toutefois infléchi son discours depuis la mi-février alors que le pays est frappé par une vague de décès officiellement attribués à des pneumonies, comme l’a rapporté l’AFP. La Tanzanie, qui a cessé de publier des données sur le Covid-19 depuis avril 2020, a par ailleurs été appelée le 21 février par l’OMS à mieux "protéger sa population" contre l’épidémie.Un confinement inutile et nocif?A l'heure où les restrictions sanitaires suscitent parfois lassitude ou contestation, la publication affirme que le confinement a été inutile et a même directement causé des décès."Au Royaume Uni : le confinement a tué 21,000 personnes", affirme ainsi le post, sans citer de sources.Ce chiffre renvoie en réalité à une estimation d'un "document de travail" ("working paper") établi en juin 2020 par deux universitaires et deux membres d'un cabinet de conseil et qui n'a jamais été publié dans une revue scientifique ou approuvé par des pairs -- étape indispensable de validation scientifique. Contactés par l’AFP, ses auteurs n'ont pas donné suite.Même si certains effets délétères du confinement sur la prise en charge des malades hors-Covid ou sur la santé mentale ont été documentés, ce chiffre choc n'a jamais été validé ou repris par les autorités sanitaires ou politiques britanniques. Selon une étude réalisée au printemps 2020 par des chercheurs de l'Imperial College de Londres, le confinement et d'autres mesures prises pour freiner l'avancée de l'épidémie de Covid-19 auraient, au contraire, épargné la vie de 59.000 personnes dans 11 pays européens, dont 2.500 en France.Le discrédit sur les vaccinsAlors que la campagne de vaccination bat son plein dans plusieurs pays occidentaux, soulevant de nombreuses infox (ici, là ou là), l'"ultimatum" appelle les gouvernements à l'interrompre immédiatement et procède en deux étapes jeter le discrédit sur les vaccins.En étant cette fois factuellement exact, le texte rappelle d'abord que plusieurs grands laboratoires pharmaceutiques --dont certains fabriquent des vaccins anti-Covid-- ont eu maille à partir avec la justice américaine: en 2009, Pfizer a ainsi écopé d'une amende de 2,3 milliards de dollars pour des pratiques commerciales trompeuses liées à un anti-inflammatoire tandis qu’AstraZeneca a dû verser 520 millions de dollars en 2010 pour avoir recommandé l'usage non autorisé d'un neuroleptique.La publication renoue, toutefois, avec des affirmations factuellement plus incertaines en abordant deux épisodes récents où des vaccins ont été mis en cause.Elle évoque ainsi le fiasco du vaccin Dengvaxia développé par Sanofi-Pasteur contre la dengue qui a été injecté aux Philippines à quelque 840.000 écoliers avant que le laboratoire n'alerte en novembre 2017 sur de possibles effets secondaires graves pour les personnes vaccinées qui n'avaient jamais été exposées au virus. Dans la foulée, Manille avait suspendu la campagne de vaccination.Des cas de décès suspects d'enfants ont été signalés aux autorités et des poursuites ont été engagées le 1er mars 2019 dans le pays contre six responsables de Sanofi. Le laboratoire français nie, lui, tout lien entre ces décès et son vaccin.Evoquant un "scandale d’Etat", la publication sur Facebook affirme elle que la procureure générale du pays, Persida Acosta, aurait avancé l'estimation de "500 enfants décédés à la suite de ce vaccin". Mais ce chiffre est sujet à caution: le correspondant de l'AFP aux Philippines n'en a pas retrouvé trace et, en avril 2018, seuls 65 décès suspects avaient été rapportés aux autorités. Des parents d'enfants ayant reçu le vaccin Dengvaxia assistent à une une audition au Sénat philippin le 21 février 2018. (AFP / Noel Celis)L'"ultimatum" s’attarde également sur la controverse autour du vaccin Pandemrix contre le virus H1N1 qui est soupçonné d'avoir causé des cas de narcolepsie, notamment en Suède et en Finlande, après des campagnes de vaccination en 2010-2011. "Le vaccin a fait, rien qu'en Europe, 1,500 victimes de narcolepsie dont 80% d’enfants", affirme la publication, sans citer de sources.Si la controverse est bien réelle, ce chiffre semble exagéré: selon un bilan officiel mentionné en septembre 2012, plus de 450 cas de narcolepsie ont été signalés en Europe après la vaccination contre le H1N1, pour la plupart en Finlande et en Suède, sans qu'un lien de causalité soit formellement établi avec ce vaccin développé par GlaxoSmithKline. Capture d'écran d'un communiqué de l'Agence nationale de sécurité des médicaments.En juillet 2011, l'Agence européenne du médicament (EMA) avait conclu que la balance bénéfice/risque du Pandemrix restait positive mais qu'en raison de rares cas survenus chez des personnes jeunes, le vaccin ne devait être utilisé qu'en l'absence d'autres vaccins disponibles. (fr)
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