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  • 2021-10-07 (xsd:date)
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  • Non, le secret de la confession n'est pas "plus fort que les lois de la République" (fr)
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  • Le secret de la confession est-il "plus fort que les lois de la République", comme l'a affirmé mercredi le président de la conférence des évêques de France ?  Si le secret de la confession est bien considéré comme un secret professionnel, la loi autorise sa levée en cas de révélation "d'agressions ou atteintes sexuelles infligées à un mineur" ou à une personne vulnérable, rappellent les expertes interrogées par l'AFP. Les ecclésiastiques n'ont pas d'obligation de dénoncer ces faits mais peuvent être poursuivis pour non empêchement d'un crime. Le droit canonique plus fort que le droit pénal ? Au lendemain de la parution du rapport Sauvé révélant l'ampleur de la pédocriminalité dans l'Eglise, les propos du président de la conférence des évêques de France (CEF) ont suscité une vague de critiques et d'indignation.Invité mercredi sur Franceinfo, Éric de Moulins-Beaufort a insisté sur l'importance du respect du secret de la confession. "Le secret de la confession s'impose à nous et s'imposera à nous et en ce sens là il est plus fort que les lois de la République parce qu'il ouvre un espace de parole libre, qui se fait devant Dieu", a-t-il souligné. Qu'en est-il réellement ? Contrairement à ce que laisse entendre le président de la CEF, également archevêque du diocèse de Reims, le secret de la confession est bien régi par le droit français et ce dernier s'impose face au droit canonique, rappellent les expertes interrogées par l'AFP. Dans le droit canonique, le secret confessionnel est un droit inviolable et absolu sous peine d'excommunication. "Il est absolument interdit au confesseur de trahir en quoi que ce soit un pénitent, par des paroles ou d'une autre manière, et pour quelque cause que ce soit", peut-on lire. "A l'obligation de garder le secret sont également tenus l'interprète, s'il y en a un, et aussi tous ceux qui, d'une façon ou d'une autre, ont eu, par la confession, connaissance des péchés."Dans une note datée du 8 décembre 2020 et citée dans le rapport Sauvé, la CEF enfonce le clou en soulignant qu'il n'est "pas permis à un prêtre de faire usage de ce qu'il a entendu en confession et donc, il ne peut en aucun cas signaler aux autorités judiciaires un pénitent, que ce soit l'auteur, la victime ou le témoin." Les déclarations du président de la CEF mercredi sur franceinfo s'inscrivent dans cette lignée. Or, souligne Sarah Massoud, secrétaire nationale du syndicat de la magistrature auprès de l'AFP, c'est "juridiquement faux". "Le droit canonique n'est absolument pas supérieur au droit commun français, le secret confessionnel n'est pas supérieur aux lois de la République".En France, le secret confessionnel est reconnu comme un secret professionnel, à l'instar notamment des médecins ou des avocats - secret dont la violation est passible de 15.000 euros d'amende et d'un an de prison selon l'article 226-13 du code pénal.  ( AFP / GUILLAUME SOUVANT)Ce secret professionnel n'est toutefois pas absolu. Dans le cas des ecclésiastiques, le secret professionnel ne s'applique pas aux confidences faites hors confession. Pour tous ceux tenus au secret professionnel y compris donc les ecclésiastiques, le code pénal distingue également des cas où le secret de la confession peut être levé. Selon l'article 226-14, aucune poursuite pénale ne peut être engagée contre "celui qui informe les autorités judiciaires, médicales ou administratives de privations ou de sévices, y compris lorsqu'il s'agit d'atteintes ou mutilations sexuelles, dont il a eu connaissance et qui ont été infligées à un mineur ou à une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique".Concrètement "les ministres du culte sont tenus de garder le secret des confidences reçues à raison de leur qualité", explique à l'AFP une source judiciaire, mais conformément à l’article 226-14 "ils ne peuvent pas être poursuivis pour violation du secret professionnel " en cas de révélation "d'infractions de sévices graves ou d’atteintes sexuelles sur un mineur de quinze ans ou à une personne vulnérable"."Ils n'ont pas en revanche d’obligation de dénoncer ces faits", explique une source judiciaire. Mais "ils sont susceptibles d’être poursuivis pour non empêchement d’un crime si les éléments constitutifs sont réunis" conformément à l'article 223-6 du code pénal qui prévoit que "quiconque pouvant empêcher par son action immédiate, sans risque pour lui ou pour les tiers, soit un crime, soit un délit contre l'intégrité corporelle de la personne s'abstient volontairement de le faire est puni de 5 ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende".Pour Christine Lazerges, professeure de droit, juriste et membre de la commission Sauvé,  "c'est une vieille coutume que de considérer que le prêtre est lié par le secret de la confession quels que soient les faits. Or, il en est délié dans le cas de signalement des violences sexuelles ou abus sexuels à l'égard d'un mineur". "Il se trouve que jusqu'à présent il n'y a pas eu de jurisprudence mais il n'y a aucune raison pour que le droit de la République ne s'applique pas aux prêtres. C'est un peu comme si un imam disait que la charia s'applique là où il veut qu'elle s'applique en dépit du droit français", ajoute l'ancienne députée socialiste.  ( AFP / THOMAS COEX)La réticence des ecclésiastiques à briser le secret du confessionnal avait déjà été pointée du doigt dans un rapport du Sénat publié en 2019. "Il ressort des auditions que certains ministres du culte se retranchent derrière ce secret pour justifier l'absence de dénonciation de certains faits, ce qui est parfois mal ressenti par les victimes", pouvait-on lire.Deux ans plus tard, la commission Sauvé appelle l'Eglise à relayer "un message clair aux confesseurs et aux fidèles" : le secret de la confession "ne peut déroger à l'obligation de signaler aux autorités judiciaires et administratives" les cas de violences sexuelles infligées à un mineur ou à une personne vulnérable. Rendu public mardi, le rapport de la commission, également connue sous le nom de CIASE (commission indépendante sur les abus dans l’Église) est accablant : depuis 1950, 216.000 mineurs ont été victimes de prêtres, diacres et religieux en France.Le nombre grimpe même à 330.000 si l'on ajoute les personnes agressées par des laïcs travaillant dans des institutions de l'Église (enseignants, surveillants, cadres de mouvements de jeunesse...).A la suite de ce rapport, le pape François a exprimé "sa honte" pour la "trop longue incapacité de l'Eglise" à mettre les victimes "au centre de ses préoccupations". Le chef de l'Etat français Emmanuel Macron a de son côté salué "l'esprit de responsabilité de l'Eglise française qui a décidé de regarder ce sujet en face" . (fr)
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