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Une publication partagée plus de 30.000 fois depuis le 8 juillet affirme que le lac Vert, dans la commune de Soultzeren (Haut-Rhin), "contient des cyanobactéries" qui auraient mis en danger la santé du chien de l'internaute à l'origine du post Facebook. En effet, des cyanobactéries se développent dans le lac Vert à un taux élevé et peuvent nuire à la santé des chiens qui s'y baignent. Partagée plus de 30 000 fois depuis le 8 juillet, cette publication Facebook affirme que son autrice se promenait avec sa chienne près du lac de Soultzeren, aussi appelé lac Vert, dans le Haut-Rhin. Après s'y être baignée, sa chienne aurait vu son état de santé "se dégrader tellement qu'elle n'arrivait plus à tenir sur ses pattes". En cause selon l'internaute : "des cyanobactéries". Capture d'écran d'une publication Facebook prise le 20 juillet 2020.Contactée par l'AFP le 16 juillet, Angélique Beyer, la propriétaire de la chienne et l'autrice de cette publication, explique avoir alerté l'Agence Régionale de Santé (ARS) Grand Est qui lui aurait confirmé que l'état de santé de son chien pouvait être dû à la présence de cyanobactéries dans le lac.De son côté, l'ARS Grand Est, jointe par l'AFP le 15 juillet, confirme avoir été alertée par l'internaute, sans plus de précisions.Le lac Vert contient bien des cyanobactéries à un taux élevéLes dernières analyses des eaux du lac Vert ont été réalisées le 16 juillet, soit 8 jours après la publication de la propriétaire de la chienne, selon Georges Walter, directeur de l'environnement et du cadre de vie au Conseil départemental du Haut Rhin, contacté par l'AFP le 17 juillet. Chaque millilitre analysé contenait 143.500 bactéries.Le premier seuil "d'alerte et d'information" pour la présence de cyanobactéries dans l'eau est à 20.000 cellules par millilitres (avec une marge de 20 %) toujours selon l'ARS. Tableau d'analyses des eaux du lac Vert datant du 16 juillet 2020 fourni par le Conseil départemental du Haut-Rhin à l'AFP le 17 juillet 2020. Légende associée au tableau d'analyses des eaux du lac Vert datant du 16 juillet 2020 fournie par le Conseil départemental du Haut-Rhin à l'AFP le 17 juillet 2020.Ces cyanobactéries sont des "organismes microscopiques qui peuvent proliférer dans les eaux douces", selon l'ARS Grand Est. "Elles ressemblent à des algues microscopiques de couleurs diverses allant du vert au bleu vif, pouvant former des dépôts ou des mousses en surface de l’eau. Elles peuvent aussi ne pas être visibles." Ces cyanobactéries peuvent produire des toxines nocivesIl faut différencier la présence de cyanobactéries et la toxicité de l'eau: la production de toxines par une cellule de cyanobactérie dépend de plusieurs facteurs (présence de certains gènes, paramètres environnementaux), précise à l'AFP le 18 juillet Jean-François Humbert, directeur de recherches à l'Institut national de la recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (Inrae). Deux des quatre types de cyanobactéries identifiées dans le lac Vert sont signalées comme potentiellement dangereuses: selon les analyses du Conseil départemental, l'une est "neurotoxique" (elle peut émettre des toxines qui peuvent influer sur le système nerveux) et l'autre est "à risque pour les animaux en cas d'ingestion". "Il est désormais bien connu que de nombreux genres de cyanobactéries (dont ceux cités dans [l]e document [du Conseil départemental]) peuvent potentiellement produire différents types de cyanotoxines mais que cette production sera très variable d'une prolifération à l'autre", poursuit Jean-François Humbert.Le Conseil départemental n'analyse pas le taux de toxines dans les eaux du lac, selon Georges Walter, car la baignade et la consommation de poissons pêchés y sont interdites.En clair, sans mesure des toxines dans l'eau du lac, il n'est pas possible d'affirmer avec absolue certitude qu'elle causera forcément des problèmes de santé aux animaux qui s'y baignent. Néanmoins, deux vétérinaires contactées par l'AFP, commentant les analyses fournies par le Conseil départemental, conseillent aux riverains d'empêcher leurs animaux de companie de s'y baigner."Il est possible qu’une intoxication aux cyanobactéries ait pu avoir lieu," confirme Christelle Junot-Decosne, vétérinaire libérale contactée par l'AFP le 17 juillet. Julie Vein, vétérinaire ayant exercé au laboratoire de toxicologie de l'Institut national d'enseignement supérieur et de recherche en alimentation, santé animale, sciences agronomiques et de l'environnement à Lyon, explique à l'AFP que "si toutes les cyanobactéries ne sont pas toxinogènes. "A priori, ces analyses révèlent la présence d'une cyanobactérie produisant des neurotoxines. Il vaut mieux ne pas y aller," conclut-elle. Angélique Beyer, l'internaute à l'origine de la publication virale, explique que la présence des cyanobactéries dans le lac n'était pas notifiée lors de sa promenade, le 4 juillet. Selon le Conseil départemental cependant, des panneaux comme on peut les voir ci-dessous ont été installés dès le 1er juillet pour avertir les riverains. Photo des abords du lac Vert à Soultzeren (Haut-Rhin) où l'on voit un panneau mentionnant le texte suivant : "Présence de cyanobactéries. Espèces aquatiques impropres à la consommation. Pêche non recommandée.". Cette photo a été obtenue par l'AFP auprès du Conseil départemental du Haut-Rhin le 17 juillet 2020.Les cyanobactéries toxiques sont dangereuses pour les chiens"Lorsque le chien avale de l'eau contenant des cyanobactéries toxiques, les toxines vont se répandre dans son organisme. Les symptômes dépendent du type de toxine présente dans l’eau," détaille Nastasia Michaels, journaliste pour le site de la Fondation 30 millions d'amis jointe par l'AFP le 16 juillet.Certaines toxines (les hépatotoxines) touchent le foie et peuvent causer des vomissements ou des convulsions, tandis que d'autres (les neurotoxines) "attaquent le système nerveux de l’animal, ce qui se traduit dès les premières minutes par une salivation excessive, des tremblements, des paralysies et enfin des difficultés respiratoires entraînant la mort", poursuit-elle. Le problème reste cependant méconnu: une étude américaine de 2013 analysant 67 cas d'intoxications suspectées aux cyanobactéries a établi que dans 58 % des cas étudiés, ces situations étaient fatales, relève la vétérinaire Christelle Junot-Decosne. Comme nous le précisions dans une dépêche en août 2017, plusieurs chiens étaient morts en Maine-et-Loire après s'être baignés dans des eaux contenant des cyanobactéries toxiques.En 2019, deux autres sont décédés à la suite d’une baignade dans des eaux contaminées, près de Candes-Saint-Martin et à Vouvray. Ainsi, il vaut mieux retenir son chien lorsque la présence de cyanobactéries est signalée ou suspectée. En cas d'intoxication supposée, "rincez, enlevez au maximum les cyanobactéries dans les poils, et allez chez le vétérinaire", conseille Christelle Junot-Decosne.
(fr)
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