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  • 2022-06-13 (xsd:date)
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  • Non, le soleil n'est pas responsable à 95% du réchauffement climatique (fr)
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  • Le réchauffement climatique dépendrait "à 95% de phénomènes naturels liés au soleil", prétendent des publications partagées plus d'un millier de fois sur les réseaux sociaux depuis début juin. A l'appui, une citation d'un scientifique italien, climato-sceptique notoire. Cette théorie va à l'encontre du consensus scientifique sur l'origine humaine du changement climatique de ces dernières années, ont expliqué plusieurs experts à l'AFP. Les derniers rapports du GIEC rappellent par ailleurs l'urgence de diminuer nos émissions carbone."Le réchauffement climatique dépend du moteur météorologique dominé par la puissance du soleil. Les activités humaines affectent le niveau de 5 %: 95 % dépendent plutôt de phénomènes naturels liés au soleil. Attribuer aux activités humaines le réchauffement climatique est sans fondement scientifique", affirme cette publication, partagée plus de 1400 fois depuis le 5 juin 2022. L'auteur cite un scientifique italien, Antonino Zichichi, présenté comme "professeur émérite de physique supérieure à l'université de Bologne, et auteur de plus de 1.100 travaux scientifiques, dont sept découvertes, cinq inventions". Le texte est accompagné de deux photos: à gauche, Antonino Zichichi, à droite, la jeune militante écologiste Greta Thunberg, qui, toujours selon le scientifique italien "n'aurait pas dû interrompre ses études". Capture d'écran réalisée le 13/06/2022 sur FacebookLa théorie selon laquelle le réchauffement climatique serait majoritairement lié aux variations du soleil est populaire au sein de la communauté climato-sceptique et sur les réseaux sociaux. En avril, l'AFP avait vérifié des publications partageant des affirmations similaires.L'AFP a interrogé plusieurs climatologues. Tous ont réfuté la citation d'Antonino Zichichi, rappelant que cette théorie va à l'encontre des connaissances actuelles de la communauté scientifique internationale, qui s'accorde sur le rôle déterminant de l'activité humaine dans le réchauffement climatique de ces dernières années.Dans ces trois derniers rapports, le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec) a par ailleurs alerté sur la nécessité de réduire les émissions de gaz à effet de serre pour limiter la hausse des températures.Qui est Antonino Zichichi ? Antonino Zichichi est un scientifique italien, spécialisé dans la physique nucléaire. Aujourd'hui retraité, il a notamment travaillé pour l'Organisation européenne pour la recherche nucléaire (le Cern). Une recherche de son nom sur le site Google Scholar renvoie à plusieurs articles cosignés par Antonino Zichichi, mais aucun ne traite la question du changement climatique. Le site Climateranlti.it, dédié aux questions climatiques et animé par des scientifiques italiens a, à plusieurs reprises critiqué la position climato-sceptique d'Antonino Zichichi (1,2). Dans un article, publié en 2012, deux scientifiques l'accusaient notamment de "diffuser de la désinformation sur la question, afin de contrecarrer les politiques nécessaires à la réduction des émissions de gaz à effet de serre". Cet article avait été publié en réaction à une tribune, publiée le 27 janvier 2012 dans le quotidien américain The Wall Street Journal, intitulée "Pas besoin de paniquer à propos du changement climatique" et signée, entre autres, par Antonino Zichichi. "Antonino Zichichi est un climato-sceptique italien bien connu. Il a travaillé dans le domaine de la physique nucléaire il y a 50 ans et il n'a pas d'expérience en climatologie: aucune publication sur le climat revue par les pairs", a déclaré le 9 juin 2022 à l'AFP le glaciologue Luca Mercalli, président de l’Association italienne de météorologie et de la revue associée Nimbus. "Les rapports d'évaluation 5 et 6 du GIEC admettent clairement la responsabilité humaine à presque 100% dans le réchauffement climatique", a poursuivi Luca Mercalli.Antonino Zichichi fait par ailleurs partie des scientifiques du think tank américain "The Heartland Institute", "une organisation climatosceptique, dont le rôle a été décrit dans le livre de N. Oreskes sur les "fabricants de doute", a expliqué à l'AFP Pascal Yiou, climatologue et chercheur au Laboratoire des Sciences du Climat et de l'Environnement (LSCE), interrogé le 8 juin 2022.Par ailleurs, tous les experts interrogés par l'AFP ont assuré ne pas connaître la "World Federation of Scientists", dont Antonino Zichichi se revendique fondateur et président.L'AFP a contacté Antonino Zichichi le 9 juin 2022, afin de l'interroger sur la citation partagée dans les publications que nous vérifions. Au moment de la publication de cet article, il n'avait pas répondu.Consensus scientifique sur l'origine du changement climatique La citation de Antonino Zichichi est tirée d'une tribune publiée dans le quotidien conservateur italien Il Giornale le 30 septembre 2019. Dans le dernier paragraphe de cette tribune, le scientifique italien assure que le climat et la pollution sont "deux choses totalement différentes" et que le réchauffement climatique "dépend du moteur météorologique dominé par la puissance du soleil. Les activités humaines affectent le niveau de 5 %: 95 % dépendent plutôt de phénomènes naturels liés au soleil".Comme expliqué plus haut, les derniers rapports du GIEC énoncent clairement la responsabilité de l'activité humaine dans la hausse des températures. Dans le premier volet de son sixième rapport d'évaluation (2021-2022), publié le 9 août 2021, les experts du GIEC écrivent qu'il est "incontestable que l'influence humaine a réchauffé l'atmosphère, les océans et les terres".Le 4 avril 2022, le GIEC a publié le troisième volet de ce sixième rapport, alertant sur l'urgence de la prise de plusieurs mesures.Un pourcentage qui ne s'appuie sur aucune source scientifique L'AFP a interrogé les climatologues sur le pourcentage évoqué par Antonino Zichichi."Je n'ai aucune idée d'où il peut tirer ces proportions", a commenté Gerhard Krinner, directeur de recherche au CNRS et chercheur à l'Institut des Géosciences de l'Environnement de Grenoble, interrogé par l'AFP le 8 juin 2022."A mon avis, c'est probablement de la pure invention de sa part. Les meilleures estimations actuelles sont que l'activité humaine explique 100% du réchauffement observé depuis la période préindustrielle", a ajouté le chercheur, citant entre autres, un article, publié dans la revue scientifique Nature Climate Change le 18 janvier 2021.Cet article conclut que "les forçages anthropiques (c'est-à-dire les perturbations dues aux humains et provoquant des changements climatiques) ont entraîné un réchauffement de 0,9 à 1,3 °C de la température moyenne mondiale de l'air à proximité de la surface en 2010-2019 par rapport à 1850-1900, alors que le réchauffement observé est de 1,1 °C". Ce pourcentage est "une énorme simplification", a déclaré le 8 juin François-Marie Bréon. Selon le chercheur du LSCE, il trouverait peut-être sa source dans le calcul des flux d'énergie envoyés par le soleil vers la Terre: "Si on me demandait un chiffre de ce type, je dirais que le soleil apporte autour de 250 Watt par mètre-carré (W.m-2) alors que les activités humaines apportent, essentiellement du fait de l’augmentation de l'effet de serre, 2,5 W.m-2. On est donc plutôt sur du 1%-99%", a-t-il commenté. Cependant, "le soleil est pratiquement constant. Ses variations sont inférieures à 0,1%, alors que la contribution humaine est passée de 0 à 2,5 W.m-2", provoquant un déséquilibre. Par ailleurs, plusieurs observations permettent aux scientifiques d'établir la responsabilité de l'activité humaine dans le réchauffement climatique de ces dernières années et d'écarter celle du soleil.L'activité solaire a plutôt tendance à stagner, voire à diminuer "Pour pouvoir dire que le soleil est la cause du réchauffement climatique, il faudrait commencer par montrer une variation de l'activité du soleil. Or on ne voit pas une telle variation", explique François-Marie Bréon.Comme le rappelle la NASA sur cette page dédiée à l'impact des cycles solaires sur le climat de la Terre, "les scientifiques s'accordent à dire que le cycle solaire et les variations à court terme de l'irradiance qui lui sont associées ne peuvent être la principale force à l'origine des changements climatiques que nous observons actuellement sur Terre", rappelant que "la production d'énergie du Soleil ne varie que de 0,15 % au cours du cycle, soit moins que ce qui serait nécessaire pour provoquer le changement climatique que nous observons"."Les variations solaires ont un effet sur le climat. Seulement, les variations qu'on a observées au cours des derniers siècles liées à l'énergie solaire sont faibles et ne sont pas suffisantes pour expliquer les variations de températures qu'on observe aujourd'hui. Ces dernières décennies il y a plutôt eu une diminution de l'activité solaire", a résumé Frank Pattyn, directeur du Laboratoire de glaciologie à l'Université libre de Bruxelles, interrogé le 31 mars 2022.L'Organisation météorologique mondiale (WMO) rappelle également sur son site que "les mesures par satellite effectuées au cours des 30 dernières années montrent que la production d'énergie du Soleil n'a pas augmenté et que le récent réchauffement observé sur Terre ne peut être attribué à des changements dans l'activité solaire".Les changements de températures diffèrent dans la haute et la basse atmosphère "Il y a trois grandes manières d'affecter le bilan d'énergie reçu à la surface de la terre" et donc d'influencer le climat, avait déjà détaillé Pascal Yiou à l'AFP en avril.Premièrement: les éruptions volcaniques, qui émettent des gaz allant jusqu'à la haute atmosphère et de la vapeur d'eau, qui est aussi un gaz à effet de serre. Par ailleurs, les poussières provoquées par les éruptions volcaniques atténuent le rayonnement solaire, créant un déséquilibre entre la troposphère (couche basse de l'atmosphère, où nous vivons) et la stratosphère (couche haute de l'atmosphère): "Lors d'une éruption volcanique, la haute atmosphère se réchauffe tandis que la surface de la terre est plus froide", explique Pascal Yiou.Le rayonnement solaire est un deuxième facteur naturel jouant sur le climat, a poursuivi le chercheur. Celui-ci affecte toute l'atmosphère, troposphère et stratosphères confondues.Troisièmement, les gaz à effet de serre, comme le CO2, peuvent également dérégler le climat. "Ces gaz sont émis près de la surface de la Terre et restent généralement dans les premiers kilomètres de l'atmosphère, et réchauffent ces basses couches", explique Pascal Yiou.Suivant ces principes, si le soleil était à l'origine du réchauffement climatique, les scientifiques observeraient un réchauffement égal de la troposphère et de la stratosphère. Or, "on observe une augmentation de la température dans la basse atmosphère et une diminution dans la hausse atmosphère ce qui signifie que le réchauffement est principalement dû à des gaz à effet de serre", indique Frank Pattyn. Une observation modélisée notamment par le Prix Nobel de physique de 2021, Syuroko Manabe. Infographie sur les lauréats du Nobel de physique 2021 et leurs travaux sur le changement climatique ( AFP / Gal ROMA, Sophie RAMIS, Bertille LAGORCE)Ce phénomène est également expliqué sur le site de l'Institut royal d'aéronomie spatiale de Belgique.La composition des atomes de carbone permet de déterminer leur origine Les scientifiques peuvent par ailleurs déterminer la provenance des molécules de CO2 (émissions humaines ou naturelles). L'élément carbone existe sous différentes formes, qu'on appelle les "isotopes", définis par la lettre "C" suivie d'un chiffre. Le carbone formé à l'origine à partir de matière végétale, comme le charbon et le pétrole, est pauvre en C13, mais contient du C12.L'atmosphère est composée d'un certain nombre de ces isotopes. Or, avait expliqué en avril à l'AFP Laurent Bopp, chercheur au LSCE et spécialiste des liens entre le climat et cycle du carbone océanique "ces soixante dernières années on voit que la quantité de carbone augmente dans l'atmosphère mais que la quantité de C13 diminue. C'est le signe qu'on injecte dans l'atmosphère du carbone pauvre en C13, donc du carbone issu d'émissions anthropiques", c'est-à-dire humaines.Par ailleurs, le charbon et le pétrole ne contiennent pas du tout d'isotope C14, puisque celui-ci, radioactif, disparaît en une dizaine de milliers d'années - bien moins que le temps qu'il ne faut pour que les matières végétales se transforment en charbon ou en pétrole.Or, en observant l'atmosphère, les scientifiques ne détectent pas - ou très peu - de carbone 14. "On voit qu'on a une source de CO2 très vieille", très probablement, donc, issue du charbon ou du pétrole, a ajouté Gerhard Krinner.La répartition géographique du carbone donne également des indications aux scientifiques. Cette source de carbone est plutôt "issue de l'hémisphère nord, car l'augmentation de CO2 dans l'hémisphère sud a un ou deux ans de retard". L'hémisphère nord, plus industrialisé et plus peuplé, émet en effet davantage de carbone, comme l'avaient déjà établi des chercheurs du LSCE en 2019.Les scientifiques observent également "une lente et faible diminution de la concentration d'oxygène dans l'atmosphère, ce qui montre qu'une qu'il y a un processus de combustion à grande échelle", a commenté Gerhard Krinner. "Jusqu'à la fin du XXème siècle, il y avait une petite ambiguïté, l'activité solaire avait un petit rôle dans les changements de température. Au XXIème siècle, c'est 100% du réchauffement climatique qui est lié à l'activité humaine", a conclu Pascal Yiou.Quant à la différence entre pollution et changement climatique, souligné par Antonino Zichichi dans sa tribune citée plus haut, Gerhard Krinner à expliqué à l'AFP qu'il existe "bien sûr, des types de pollution qui n'ont rien à voir avec le changement climatique", a-t-il ajouté, prenant l'exemple d'une "pollution radioactive de type Tchernobyl", qui "est bien une pollution qui n'a aucun lien avec le changement climatique". Néanmoins, le lien entre la pollution liée à des gaz à effet de serre (et à d'autres émissions, comme celle des aérosols sulfatés liés à la combustion des énergie fossile) et le changement climatique est, elle, bien établie.12 août 2022 avec coquille corrigée dans l'intertitre sur le carbone (fr)
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