?:reviewBody
|
-
Le SADS, ou "syndrome de la mort subite de l'adulte", aurait été créé pour justifier des décès liés au vaccins contre le Covid-19, prétendent des articles de blogs relayés depuis la mi-juin. C'est faux, selon les autorités sanitaires et plusieurs experts interrogés par l'AFP : les syndromes de mort par arythmie soudaine, dont l'acronyme en anglais est SADS, sont connus et étudiés par la communauté scientifique depuis des décennies. Le SADS n'a par ailleurs pas été identifié par les autorités sanitaires comme un effet secondaire potentiellement lié à la vaccination."Les morts subites causées par le vaccin sont maintenant si courantes qu'ils lui ont attribué un nom de SYNDROME : le syndrome de la mort subite de l'adulte (SADS)", assurent des articles de blogs (ici, là, là) partagés plusieurs centaines de fois depuis la mi-juin."Le syndrome de la mort subite : Un nom de code pour la mort par vaccination", prétend même un post Telegram vu plus de 10.000 fois depuis le 20 juin. Des allégations semblables ont été relayées sur Facebook et Twitter. Capture d'écran, prise le 08/07/2022 Capture d'écran, prise le 08/07/2022 Des internautes ont également assuré qu'outre ce "syndrome de la mort subite de l'adulte", ce qui est présenté comme son équivalent infantile, le SIDS (acronyme en anglais faisant référence au "Sudden Infant Death Syndrome", connu en français sous le nom de la mort inattendue du nourrisson, ou MIN), serait également lié à la vaccination.Des affirmations semblables ont été largement partagées dans des publications sur Facebook, Twitter et Instagram en anglais depuis la mi-juin. Pourtant, deux chercheurs interrogés par l'AFP ont expliqué que ni le SIDS, ni le SADS, qui sont connus depuis de longues années, ne figurent parmi les effets secondaires potentiellement liés à la vaccination contre le Covid-19 fin juin 2022. La mort inattendue du nourrisson, et son acronyme anglais SIDSLe SIDS, pour "Sudden infant death syndrome" auquel il est fait référence sur les réseaux sociaux, est l'équivalent en anglais de la mort inattendue du nourrisson, ou MIN, qui correspond au "décès d'un nourrisson survenant brutalement alors que rien, dans les antécédents connus du nourrisson, ne pouvait le laisser prévoir", indique ainsi sur son site l'Observatoire national français des MIN (OMIN), qui vise à, notamment, recenser les données sur les MIN en France.Ces morts inattendues ont lieu "le plus souvent pendant le sommeil" des nourrissons et peuvent "toucher un bébé de 0 à 24 mois, mais dans 8 cas sur 10, elle survient avant l'âge de 6 mois", indique le site des Hôpitaux Civils de Lyon.Au fil des années, ces décès inattendus chez les nourrissons ont eu plusieurs appellations, comme le note une enquête nationale publiée sur le site de Santé Publique France sur les morts inattendues des nourrissons entre 2007 et 2009. "Le concept de mort subite du nourrisson (MSN) apparaît dès le dix-neuvième siècle, sous le terme 'Sudden Infant Death Syndrome' (SIDS) chez les Anglo-Saxons : il s'agit d'enfants en bonne santé, retrouvés décédés dans leur berceau sans explication apparente", précise ainsi l'enquête.Le SIDS est ainsi largement documenté par les autorités sanitaires nord-américaines. Le ministère de la santé du Canada indique ainsi sur une page dédiée à ce syndrome qu'il correspond au "décès subit, durant le sommeil, d'un nourrisson de moins d'un an qui demeure inexpliqué même après un examen approfondi du cas, y compris un examen de la scène du décès, une revue des antécédents cliniques et une autopsie complète".Les causes exactes des morts inattendues des nourrissons restent ainsi méconnues. Leur nombre est en baisse générale au Canada, notamment depuis que le pays a commencé à recommander aux parents de coucher les nourrissons sur le dos, pour éviter de gêner leur respiration. D'autres facteurs, comme l'allaitement, ont aussi pu être associés avec des risques plus faibles de morts inattendues du nourrisson dans des études. Une femme porte un nouveau-né à l'hôpital "Communautaire de Référence" à Port-Salut, à Haiti, le 18 août 2021 ( AFP / Reginald LOUISSAINT JR)En France, depuis 1975, le nombre de MIN a, de façon générale, baissé, selon des recherches publiées sur le site de Santé Publique France en 2008. Néanmoins, l'OMIN note que "la France reste l’un des pays à fort taux de MIN au sein de l'Europe avec 250 à 350 décès d'enfants par an", précisant encore que "malgré la baisse des taux de MIN observée à la suite des campagnes de prévention au début des années 1990, la MIN continue d'être la principale cause de décès chez les nourrissons âgés de un mois et un an dans les pays développés, notamment en France".Outre les allégations partagées sur les réseaux sociaux affirmant que le SIDS (ainsi que le SADS) sont liés à la vaccination anti-Covid, d'autres affirmations virales, notamment en Amérique du Nord, qui circulent depuis plusieurs années et visent particulièrement les parents de jeunes enfants, prétendent que ce syndrome est lié à la vaccination de façon générale. Cependant, selon les autorités sanitaires du Canada et des Etats-Unis, il n'existe pas à ce jour de données permettant d'établir que la vaccination aggrave le risque des morts inattendues des nourrissons. Au contraire, la vaccination "n'augmente pas le risque de SIDS, et peut même le réduire", d'après le ministère de la santé du Canada.Les CDC, pour "Centers for Disease Control and Prevention", qui forment la principale agence de santé publique américaine, indiquent aussi sur leur site que "des études ont conclu que les vaccins ne causent pas et ne sont pas liés au SIDS"Rachel Moon, la présidente du groupe de recherches sur le SIDS de l'Association Américaine de Pédiatrie, avait déjà affirmé en juillet 2021 auprès de l'équipe de vérification de l'AFP aux Etats-Unis que bien que la période au cours de laquelle le risque de SIDS est élevé chez les nourrissons et la période durant laquelle les bébés se font vacciner coïncident, "plusieurs études ont examiné cette question et ont constaté qu'il n'y a pas de relation de cause à effet, ce qui signifie qu'il s'agit d’une coïncidence temporelle". Le syndrome de mort par arythmie soudaine, ou SADSLes publications sur les réseaux sociaux prétendent aussi que les décès liés aux vaccins ont été regroupés sous l'appellation SADS, qui correspond, en anglais, aux "Sudden Arrythmia Death Syndromes", nommés dans les publications "Sudden Adult Death Syndrome", et traduits en "syndrome de la mort subite de l'adulte".Ils consistent en "une variété de troubles de l'arythmie cardiaque, qui sont souvent génétiques et peuvent être responsables de mort soudaines chez des jeunes, apparemment en bonne santé", selon le site de la fondation canadienne des syndromes de mort subite par arythmie. Parmi les troubles du rythme cardiaque pouvant être considérés sous cette appellation figurent ainsi le syndrome du QT long, la tachycardie ventriculaire polymorphe catécholaminergique (TVPC), le syndrome de Brugada, la cardiomyopathie ventriculaire droite arythmogène (CVDA), le syndrome QT court et le syndrome de Timothy. Ces derniers conduisent à un rythme cardiaque anormal (l'arythmie), qui, s'il n'est pas traité, peut conduire à un arrêt cardiaque et au décès de la personne. Mais les troubles rassemblés sous l'acronyme SADS ne sont pas nouveaux, à l'inverse de ce que prétendent les publications sur les réseaux sociaux, rappelle Cyrus Hadadi, directeur associé de la recherche sur l'arythmie cardiaque à l'Institut de recherche médicale MedStar Heart & Vascular Institute à Washington. Selon lui, le premier cas a en effet été documenté en Allemagne au dix-neuvième siècle."En tant que cardiologues, nous traitons le SADS depuis des années", a-t-il assuré le 24 juin 2022 à l'AFP. Il a ajouté que bien que chaque cas soit unique, les troubles du SADS sont génétiques, les enfants ayant 50 % de chances d'hériter de la maladie de leurs parents. Cyrus Hadadi a par ailleurs assuré qu'il n'y a pas de lien établi entre les vaccins et l'arythmie cardiaque. "Rien ne permet de dire que le SADS est causée par la vaccination contre le Covid-19", a-t-il précisé, ajoutant qu'il n'avait pas observé de hausse récente des cas de SADS.Le ministère de la santé canadien a de son côté indiqué à l'AFP le 23 juin n'avoir connaissance d'aucune augmentation des signalements de SADS depuis le début du déploiement du vaccin contre le Covid-19. "À ce jour, aucune déclaration de SADS après la vaccination contre le Covid-19 n'a été soumise à l'agence de la santé publique ou à Santé Canada [le ministère de la santé canadien, NDLR]", selon ce dernier. "Les avantages des vaccins autorisés au Canada continuent de l'emporter sur les risques", a encore indiqué Santé Canada.La "Fondation SADS" aux États-Unis, composée selon son site de familles et de professionnels de santé qui "font progresser les soins pour les personnes atteintes d'arythmie cardiaque qui peuvent entraîner une mort soudaine", recommande elle aussi que les patients atteints de SADS reçoivent le vaccin contre Covid-19. "Rien n'indique que les vaccins disponibles contre le Covid-19 causent l'apparition de SADS ou l'aggravent", a indiqué la fondation dans un communiqué publié le 21 juin.En France, le SADS ne figure pas parmi les effets secondaires surveillés des vaccins contre le Covid, selon la foire aux questions sur la vaccination mise à jour le 7 juillet 2022 sur le site "vaccination info-service".Une étude publiée le 23 juin dans la revue médicale The Lancet Infectious Diseases a évalué des données provenant de 185 pays et territoires, et a conclu que les vaccins contre le Covid-19 ont empêché près de 20 millions de décès dans l’année suivant leur introduction.Les myocardites, différentes du SADSPar ailleurs, de rares cas de myocardites, des inflammations du muscle cardiaque, et de péricardites, des inflammations de la membrane qui entoure le cœur, ont été signalés après la vaccination contre le Covid-19, et sont surveillées par les autorités sanitaires depuis l'ouverture de la campagne de vaccination anti-Covid à toute la population en France, comme détaillé dans cet article.Cependant, ces inflammations cardiaques sont différentes du SADS, comme l'a précisé Jeffrey Hsu, cardiologue au département de santé de l'Université de Californie à Los Angeles (UCLA), le 23 juin à l'AFP. "La myocardite est un état dans lequel il y a inflammation du tissu cardiaque, tandis que la SADS est une mort soudaine causée par des conditions dans lesquelles le tissu cardiaque semble normal", a-t-il expliqué. "Rien ne prouve que les vaccins contre le Covid-19 causent l'un ou l'autre des troubles pouvant mener à la SADS", a résumé Jeffrey Hsu.Depuis le début de la pandémie de Covid-19, de nombreuses études ou publications scientifiques font l'objet d'interprétations trompeuses sur les réseaux sociaux. En mai 2020, l'AFP avait rappelé quelques repères pour s'y retrouver dans un article. L'AFP a réalisé plus de 770 articles de vérification en français liés au Covid-19 depuis le début de la pandémie, au 23 juin 2022.
(fr)
|