PropertyValue
?:author
?:datePublished
  • 2022-02-23 (xsd:date)
?:headline
  • Non, un panneau "chasse en cours" n'oblige pas les promeneurs à rebrousser chemin (fr)
?:inLanguage
?:itemReviewed
?:reviewBody
  • Après la mort accidentelle d'une randonneuse tuée par une balle perdue lors d'une battue, une publication très virale assimile les panneaux de signalisation "chasse en cours" à une obligation, pour les promeneurs, de changer d'itinéraire. Cette signalétique n'a pourtant qu'une simple valeur informative et ne fait qu'inciter les promeneurs à renforcer leur vigilance, indiquent à l'AFP le ministère de la Transition écologique et deux représentants des chasseurs. Un panneau triangulaire jaune et rouge avertissant d'une "chasse en cours": publiée sur Facebook dans un groupe de chasseurs, une publication partagée plus de 8.000 fois depuis le 21 février prétend que la présence de cette signalisation équivaut à une obligation pour les éventuels promeneurs de changer d'itinéraire et de passer leur chemin. "Lorsque je conduis je respecte le panneau STOP. Lorsque je me promène je dois respecter ce panneau (chasse en cours, ndlr) et changer mon itinéraire. C’est simplement être intelligent", affirme la publication, qui relaye la photo d'un chemin forestier sur lequel est posé un de ces panneaux triangulaires sur lequel figure une silhouette de sanglier. Capture d'écran Facebook prise le 23 février 2022.Le timing de cette publication n'est pas anodin : elle a été mise en ligne deux jours après la mort accidentelle d'une randonneuse de 25 ans, tuée par une balle perdue lors d'une battue aux sangliers dans le Cantal. Si l'auteure présumée du tir, une adolescente de 17 ans détentrice du permis de chasse, a depuis été mise en examen pour "homicide involontaire", ce drame a relancé le débat, parmi les candidats à la présidentielle, sur la nécessité ou non d'encadrer plus strictement cette pratique comptant 1,1 million d'adeptes en France. Le panneau présenté sur Facebook comme un moyen pratique d'éviter ce type d'accident a-t-il pour autant vraiment une force contraignante pour le public, comme l'affirme la publication ?Les passionnés de chasse auxquels s'adresse le message sont les premiers à en douter, comme en témoignent plusieurs réponses à la publication : "Ce panneau appelle à la vigilance de tous les utilisateurs de la nature sans pour autant interdire quoi que ce soit", "le problème est que ce genre de panneau n'interdit rien !!!", "les chemins sont accessibles à tous, à nous chasseurs de faire attention"... Capture d'écran réalisée sur Facebook le 23 février 2022. Capture d'écran réalisée sur Facebook le 23 février 2022.  Leur scepticisme est justifié : si la pose de cette signalétique est obligatoire pour certains types de chasse, elle n'a aucun caractère contraignant pour les promeneurs, comme l'ont indiqué à l'AFP le ministère de la Transition écologique, la Fédération nationale des chasseurs et l'Association nationale des chasseurs de grand gibier.Un panneau à "simple caractère informatif""Les panneaux visent à partager de l'information et n'obligent pas les piétons à changer leur itinéraire", indique à l'AFP le ministère de la Transition écologique."Ce panneau n’a qu’un caractère informatif. Il n’emporte aucune obligation de modifier son itinéraire de promenade mais constitue pour les organisateurs de chasses collectives - ou battues - une obligation d’information tirée de la loi chasse du 24 juillet 2019", abonde auprès de l'AFP la Fédération nationale des chasseurs (FNC). Depuis l'entrée en vigueur de cette loi, l'article L424-15 du Code de l'environnement prévoit en effet plusieurs règles censées garantir "la sécurité des chasseurs et des tiers" : le "port obligatoire du gilet fluorescent pour les chasseurs en action collective de chasse à tir au grand gibier", "une remise à niveau décennale obligatoire portant sur les règles élémentaires de sécurité pour les chasseurs" et "la pose de panneaux de signalisation temporaire sur ou à proximité immédiate des voies publiques lors des actions collectives de chasse à tir au grand gibier". Un arrêté daté du 5 octobre 2020 précise en outre que cette pose doit être réalisée par l'"organisateur" de cette battue avant son lancement "pour signaler les entrées principales de la zone de chasse", et que les panneaux doivent être retirés le même jour, à l'issue de la battue. "La loi du 24 juillet 2019 a créé cette règle nationale de sécurité alors qu’elle était auparavant déjà inscrite dans une très grande majorité de schémas départementaux, rédigés par les fédérations de chasseurs et approuvés par les préfets", complète la FNC.Comme le soulignait son président, Willy Schraen, lors de son audition au Sénat dans le cadre de la mission d'information sur la sécurité de la chasse, le 1er février, l'utilisation de ces panneaux "permet une information locale et précise au moment même de l'action de chasse." Des panneaux à installer aux "endroits stratégiques" "Avant l'adoption de la loi, la pose du panneau +chasse en cours+ était fortement recommandée mais pas obligatoire, la loi n'a fait que conforter les décisions prises dans les schémas départementaux de gestion cynégétique pour contraindre les rares départements qui n'avaient pas pris de telles mesures", confirme à l'AFP Gérard Bedarida, président de l'Association nationale des chasseurs de grand gibier (ANCGG).Bien avant l'adoption de ce texte, le département de la Lozère indiquait par exemple, dans son "schéma départemental de gestion cynégétique 2014-2020" - établi, comme tous les SDGC, pour une période de six ans renouvelable - qu'"afin de mieux informer les autres usagers de la nature, les chasseurs sont encouragés à signaler qu’une chasse est en cours grâce à des panneaux positionnés le long des routes départementales." Le périmètre englobé par les "voies publiques" --mentionnées depuis 2019 dans le Code de l'environnement-- donne en revanche lieu à des interprétations différentes. Si Gérard Bedarida estime qu'il s'agit des "routes sur lesquelles les voitures peuvent circuler" mais pas des "chemins publics de randonnée", Brigitte Soulary, présidente de la Fédération française de la randonnée pédestre (FFRandonnée), penche pour une acception plus large, qu'elle détaille à l'AFP : "De notre point de vue, cela concerne aussi les chemins publics ouverts aux promeneurs : accès aux forêts, sentiers, qu'ils soient balisés ou non." Sur ce point, le ministère de la Transition écologique précise à l'AFP que les "voies publiques" couvrent "au sens de l'article L111-1 du Code de la voirie routière l'ensemble des biens du domaine public de l'Etat, des départements et des communes affectés aux besoins de la circulation terrestre, à l'exception des voies ferrées"."En pratique, la pose de panneaux sur les routes nationales et les autoroutes n'est pas libre et ce sont les autres voies publiques qui sont notamment visées", poursuit le ministère tout en indiquant que "l’idée est qu’ils soient mis aux endroits stratégiques pour que les automobilistes, promeneurs ou d’autres personnes aient connaissance de l’action de chasse en cours pour renforcer leur vigilance ou leur prudence."Les départements restent libres de préciser spécifiquement tous les lieux dans lesquels ils souhaitent voir ces panneaux installés lors des battues. Le SDGC 2021-2027 du territoire de Belfort préconise ainsi de les positionner "sur les chemins d’accès et les chemins de randonnée (pédestre, équestre) des enceintes chassées" tandis que son équivalent dans les Alpes-Maritimes prône la "pose de fanions ou de panneaux signalant la battue ou la traque sur les pistes" ainsi qu'à "l’entrée et à la sortie des chemins inscrits au Plan départemental des itinéraires de promenade et de randonnée traversés par des battues". Deux mesures prises en complément de la "pose obligatoire de panneaux de signalisation temporaire à l’entrée et à la sortie des routes (communales, départementales, nationales)" concernées par une battue. Des chasseurs du Lot le 7 novembre 2021 à Montamel (archive). ( AFP / Valentine CHAPUIS)Une incitation à la prudence Dans les deux cas de figure - route ou sentier -, la portée des panneaux "chasse en cours" reste en tout cas simplement informative, ainsi que le détaille Gérard Bedarida et contrairement à ce qu'affirme la publication."Pour les voitures, le risque lié à la chasse ne réside pas tant dans les tirs que dans la traversée du gibier et des chiens sur la route, assure le patron des chasseurs de gibiers. Lespanneaux visent donc à alerter les conducteurs pour éviter des accidents. Sur les chemins, il n'y a rien d'impératif pour les promeneurs : ils sont libres de continuer leur route, de faire demi-tour ou de faire un détour pour éviter la zone de battue. A mon sens, les panneaux +chasse en cours+, en plus de prévenir les promeneurs, incitent surtout les chasseurs à sécuriser ces passages pour éviter des tirs dans la zone."Du côté de la FFRandonnée, on incite "clairement les randonneurs qui croisent ces panneaux à ne pas s'engager sur le chemin où se déroule la battue", précise Brigitte Soulary, tout en déplorant une signalisation "pas suffisamment claire" et un positionnement parfois imprécis. "Souvent, les panneaux sont mis d'un côté de la zone de chasse mais pas de l'autre, ou alors dans des zones pas très visibles car les chasseurs redoutent des manifestations anti-chasse, indique-t-elle. Il faut que ce soit signalé sur tout le pourtour du périmètre de chasse, sur toutes les entrées possibles."Dans un souci conjoint d'information des promeneurs, la FNC et la FFRandonnée, aidés par d'autres associations, ont mis en ligne une page de conseils intitulée "Vivre la nature ensemble". Egalement accessible via un QR code disposé sur certains panneaux "chasse en cours", elle indique notamment : "Si vous entendez des coups de fusil, des chiens de chasse aboyer, des chasseurs, vous êtes vraisemblablement à proximité d’une battue de chasse collective. Si vous en avez la possibilité, essayez de modifier votre itinéraire (en veillant toutefois à éviter de traverser la battue) et de choisir un autre lieu de promenade." Cette page recommande plus généralement de signaler sa présence au premier chasseur rencontré, de se faire voir et entendre depuis un endroit dégagé ou encore de rester sur les sentiers plutôt que de s'en éloigner, "les chasseurs [s'attendant] plus à rencontrer des randonneurs sur les sentiers qu’en dehors." La ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, le 15 février 2022 à l'Elysée (archive). ( AFP / Ludovic MARIN)Vers "des jours sans chasse" ? La question de l'accès conjoint des promeneurs, sportifs et chasseurs aux espaces naturels publics, tels que les forêts, divise parmi les candidats à la présidentielle. Certains d'entre eux, comme Yannick Jadot et Jean-Luc Mélenchon, plaident pour l'interdiction de la chasse le week-end et pendant les vacances scolaires, quand Marine Le Pen, Eric Zemmour ou encore Fabien Roussel prônent le maintien de cette "tradition" française. Interrogée sur le drame du Cantal par France Bleu Occitanie, mardi 22 février, la ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, a pour sa part estimé qu'il fallait "réfléchir collectivement" à une interdiction de la chasse aux mineurs mais aussi à la mise en place de jours sans chasse."Ça existe déjà au niveau local, a-t-elle observé. Je crois que c'est le moment pour tout le monde de se mettre autour de la table pour réfléchir à des jours sans chasse, mais qui doivent se faire territoire par territoire". (fr)
?:reviewRating
rdf:type
?:url