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Un document indiquant que sept patients sur les huit en réanimation dans le centre hospitalier de Haguenau au 6 décembre démontrerait que les vaccins contre le Covid sont inefficaces, prétendent des publications largement relayées sur Internet. Ces déductions sont trompeuses, a fait valoir l'hôpital dans un communiqué. Des données au niveau national, de la DREES notamment, montrent à l'inverse que les personnes non-vaccinées admises en services de soins critiques sont plus nombreuses que les vaccinées."Voila la vérité", "une efficacité vax négative", "c'est ça la réalité des hôpitaux'', affirment des dizaines de publications partagées à plusieurs milliers de reprises sur Twitter (ici, ici, ici, ici, ici) et Facebook et vues plusieurs dizaines de milliers de fois sur Telegram depuis la mi-décembre, partageant la photo d'un compte-rendu sur lequel figure le nom du centre hospitalier de Haguenau.Les mêmes affirmations ont ressurgi ces derniers jours dans d'autres publications, et la photo a aussi été relayée dans un article dénonçant la mise en place d'un "monde totalitaire" publié le 20 décembre sur un site belge et partagé plus de 1.400 fois depuis selon l'outil de mesure d'audience sur Internet Crowdtangle. Capture d'écran Twitter, prise le 06/01/2022 Capture d'écran Twitter, prise le 06/01/2022 Cependant, le Centre hospitalier de Haguenau a, en réaction, publié un communiqué en disant "regretter" que ce document ait été relayé sur Internet sans contexte et "manifestement instrumentalisé sans que les éléments permettant d'en comprendre le contenu n'aient été repris", ajoutant notamment que parmi les personnes vaccinées présentes en réanimation, trois étaient immunodéprimées, et donc plus vulnérables, tandis qu'une autre avait un schéma vaccinal "douteux ou incomplet". Trois patients immunodéprimés, trois patients "en fin de schéma vaccinal"La photo relayée sur les réseaux sociaux est un "compte-rendu synthétique des débats se déroulant en cellule Covid du Centre Hospitalier de Haguenau", selon le communiqué de l'hôpital publié le 20 décembre.Ce dernier explique en effet qu'"à la date du 6 décembre 2021, huit patients dont sept patients vaccinés étaient présents en réanimation. Toutefois, parmi les patients vaccinés : trois patients étaient immunodéprimés avec un traitement immunosuppresseur, traitement qui diminue significativement l'efficacité de la vaccination par baisse de la production d'anticorps, trois patients en fin de schéma vaccinal n'ayant pas encore bénéficié de leur dose de rappel (3e dose) et un patient dont le schéma vaccinal était incomplet ou douteux". En effet, certaines personnes immunodéprimées, dont le système immunitaire ne fonctionne pas correctement, peuvent être, malgré la vaccination, vulnérables face au virus, comme le relatent ces articles de l'AFP et du Monde du 4 janvier 2022.Ce peut-être le cas d'environ 30% des près de 300.000 personnes immunodéprimées en France, selon cet article de l'AFP. Et pour elles, "quand des anticorps sont produits, la protection conférée par les vaccins reste bien inférieure au reste de la population", souligne aussi Yvanie Caillé, fondatrice de Renaloo, une association de patients atteints de maladies rénales.Cela ne permet néanmoins pas d'affirmer que les vaccins ne sont pas du tout efficaces pour réduire les formes graves du Covid-19 sur la population dont le système immunitaire fonctionne correctement.En effet, comme le note cette page du site de l'Inserm qui recense les données connues au 9 décembre, les vaccins restent efficaces contre les formes graves du virus dans la majorité des cas.En outre, les données à ce jour tendent à montrer l'efficacité de la troisième dose de vaccin. Selon les auteurs d'une large étude publiée le 8 décembre 2021 dans le New England Journal of Medicine portant sur plus de 850.000 personnes âgées de plus de 50 ans en Israël, une troisième dose du vaccin de Pfizer-BioNTech préviendrait ainsi à 90 % la mortalité liée au variant Delta.Des cas d'"échecs vaccinaux", parfois mentionnés dans les publications, qui correspondent à des infections avec des symptômes importants du Covid-19 malgré une vaccination complète, peuvent par ailleurs être signalés aux autorités sanitaires en France, et font l'objet d'un suivi dans le cadre de la pharmacovigilance.C'est à travers ce procédé que les autorités sanitaires avaient recommandé à l'été 2021 de compléter la vaccination avec une dose du produit de Janssen avec un autre vaccin, des cas d'échecs vaccinaux ayant été recensés par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), et dans les données de pharmacovigilances américaines. Pour les autres vaccins, le dernier point de surveillance de l'ANSM mis à jour le 24 décembre ne fait pas état d'un nombre inquiétant de cas d'échecs vaccinaux.Les semaines suivantes, une majorité de patients non-vaccinés en réanimation à HaguenauLe centre hospitalier de Haguenau indique également qu'au 20 décembre, date de publication de son communiqué, la majorité des patients en réanimation dans l'hôpital étaient, à l'inverse, non-vaccinés. Au "20 décembre 2021, neuf patients Covid [étaient] hospitalisés dans notre service de réanimation dont huit n'[étaient] pas vaccinés et un patient [était] vacciné mais immunodéprimé", précisait l'hôpital.Cette tendance s'observe toujours au 6 janvier 2022, date à laquelle "dix patients sont en réanimation, dont neuf non vaccinés", précise le centre hospitalier à l'AFP. "Ces éléments sont bien évidemment à rapprocher à la proportion de la population vaccinée dans le Bas-Rhin et illustrent une sur-représentation de personnes non vaccinées hospitalisées en soins critiques pour motif Covid", précisait encore le communiqué du 20 décembre.Au 6 décembre, 76% des Bas-Rhinois étaient complètement vaccinés selon les chiffres de Santé Publique France consultables sur l'observatoire Géodes. Ce chiffre atteint quasiment les 77% au 6 janvier.Plus de non-vaccinés que de vaccinés en réanimation, à l'échelle nationale"Ces éléments corroborent les dernières données diffusées par la Direction de la Recherche, des Etudes, de l’Evaluation et des Statistiques (DREES) du 17 décembre 2021, établissant qu'une personne non vaccinée et atteinte du Covid présente plus de 3 fois plus de risques d’être hospitalisée et 4,6 fois plus de risques d'être prise en charge en soins critiques qu'une personne vaccinée", précise encore le Centre hospitalier bas-rhinois.A l'échelle nationale, les indicateurs montrent en effet que la majorité des personnes admises dans les services de soins critiques en France, dont font partie les services de réanimation, sont non-vaccinées.Les données de la DREES indiquent ainsi que pour la période du 22 novembre au 19 décembre, en moyenne, pour un million de personnes non-vaccinées, on observait 598 entrées en soins critiques. Pour un million de personnes vaccinées avec rappel, ce chiffre tombait 23 personnes entrées en réanimation.La DREES en déduit ainsi dans son dernier rapport daté du 31 décembre que "la protection vaccinale contre les évènements liés au Covid-19, dans les premiers mois suivant l’obtention d'un schéma vaccinal complet, est élevée pour toutes les classes d’âge et particulièrement élevée contre le risque de décès ; elle est comprise entre 80 % et 85 % pour les formes symptomatiques et entre 90% et 95% pour les décès".Elle conclut aussi à partir de ces données que "l'existence d'un rappel pour les personnes dont le statut complet remonte à plus de six mois améliore fortement la protection vaccinale (...) à plus de 90%".D'autres données, prenant en compte uniquement les patients en réanimation (et pas dans tous les services de soins critiques), indiquent également qu'une majorité d'entre eux est non-vaccinée, comme le détaillent aussi cet article de CheckNews et cet autre des Décodeurs. Dans une enquête décomptant les patients présents le 29 décembre 2021 dans 165 services de réanimation sur tout le territoire français, la Société française d’anesthésie et de réanimation (SFAR) parvenait à une proportion de 80% de non-vaccinés contre 20% de vaccinés. Les hôpitaux de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) estimaient au 4 janvier la proportion des patients non-vaccinés en réanimation à 70 à 75%, auprès des Décodeurs.Une tribune signée par 500 médecins parue le 2 janvier dans La Provence estimait à 90% le taux des non-vaccinés dans les services de réanimations des hôpitaux de l'Assistance publique-Hôpitaux de Marseille (AP-HM).Au 5 janvier, près de 3.700 malades en services de soins critiques en France, alors que la barre des 300.000 cas de Covid enregistrés en 24h vient d'être franchie. Graphique montrant l'évolution des hospitalisations et des personnes en soins critiques en France, au 5 janvier ( AFP / Sophie RAMIS, Simon MALFATTO)
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